Les discriminations dans l’entreprise et dans la fonction publique

Droit international et législation et réalité nationales

3e partie

L’origine nationale

L’origine nationale vise la nationalité de la personne .parfois il y a emploi des termes «ascendance nationale». Ce critère d’origine nationale cherche à lutter contre les distinctions entre les nationaux et les étrangers. A l’instar des autres critères, l’origine nationale en tant que critère illégitime de discrimination est affirmée dans plusieurs instruments internationaux des droits de l’Homme (convention des Nations Unies pour les droits des travailleurs migrants et des membres de leurs familles) et dans différentes conventions internationales du travail.

L’article 36 considère parmi les motifs non valables du licenciement, il ya celui fondé sur «l’ascendance nationale».

Discrimination pour origine  sociale

L’origine sociale en tant que critère qui peut constituer le fondement de la discrimination figure dans plusieurs instruments des droits de l’homme et dans des normes internationales du travail et dans les lois nationales. La discrimination pour l’origine sociale de la personne peut consister en l’apparence à une classe sociale, à une caste, à une catégorie socio- professionnelles ou à une tribu .c’est un critère difficile à délimiter.

Au Maroc ce critère est prévu dans l’article 9 du code du travail et dans le code pénal.

L’article 36 du code du travail précise que le licenciement pour raison sociale est fait partie des motifs non valables du licenciement.

Les insuffisances et les limites des critères

Les critères précités (la race, la couleur, le sexe, le handicap, la situation conjugale, l’opinion politique, la religion et l’appartenance syndicale) fixés par l’article 9 du code du travail ne comprennent pas l’âge en tant que critère qui peut être le fondement de la discrimination.

Par rapport à la constitution qui énumère une série de critères, dans son préambule, cet instrument prévoit la lutte contre «toute discrimination à l’encontre de quiconque, en raison du sexe, de la couleur, des croyances, de la culture, de l’origine sociale ou régionale, de la langue, du handicap ou de quelque circonstance personnelle que ce soit». Elle ne prévoit pas donc les considérations d’ordre politique, syndical, religieux, et l’ascendance nationale ». Toutefois, cet instrument ajoute un nouveau critère général celui de « quelque circonstance personnelle que ce soit.

L’article 9 du code du travail énumérant une série de critères de discriminations prohibés. Cette énumération est insuffisante et n’englobe pas par exemple, l’apparence physique, le nom de famille, l’état de santé et l’exercice du droit de grève.

Dans le code pénal, l’article 431 cite  l’origine nationale ou sociale,  la couleur, le  sexe,  la situation de famille ,  l’état de santé , le handicap,  l’opinion politique,  l’appartenance syndicale,  l’appartenance ou  la non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie , une nation ,une race ou une religion déterminée».

Le code du travail français institue l’interdiction de la discrimination pour exercice de grève alors que le code du travail marocain ne la prévoir pas

Au sein de l’OIT, il y a élargissement des critères de discrimination. Des critères « bien que non explicitement cités dans les instruments internationaux de base, sont de plus en plus identifiées en tant que  » critères émergents  » par les organes de contrôle de l’OIT. Ils concernent l’orientation sexuelle, l’âge (limite supérieure), l’état de santé, la grossesse et le harcèlement sexuel ». Un nouveau critère émerge lui aussi et qui porte sur l’aspect physique de la personne. Il s’agit du critère de « l’apparence physique » ou « lookisme » sur lequel peut être fondée la discrimination. Les personnes victimes de l’apparence physique peuvent être nombreuses. Absence quasi- totale des personnes qui ne sont pas belles dans les services d’accueil dans les hôtels, les Stations de télévision, les agences de voyages, les avions …

D) Le domaine des discriminations

Les discriminations peuvent émerger à divers stades de la relation du travail, au niveau de l’embauche, lors de l’exécution du travail (promotion, mutation), dans les rémunérations, l’exercice du pouvoir disciplinaire, l’accès à la formation, à la formation continue et aux stages.

La convention n° 111 et la recommandation 111 sur «la discrimination en matière d’emploi et de profession» précisent le champ de la discrimination, c’est-à-dire, «l’emploi» et la «profession» qui «recouvrent l’accès à la formation professionnelle, l’accès à l’emploi et aux différentes professions, ainsi que les conditions d’emploi».

Au Maroc, la constitution ne précise pas le domaine des discriminations interdites voire bannies. L’affirmation est donc générale dans le préambule alors que l’article 19 et focalisée sur l’égalité entre l’homme et la femme dans tous les domaines. Toutefois, l’Autorité pour la Parité et la lutte contre toutes formes des discriminations est compétente dans toutes les formes de discriminations.

a) L’embauchage

La discrimination à l’embauche est définie «comme une discrimination qui intervient lors du processus de recrutement et sur la base de critères qui ne permettent pas de juger concrètement les compétences professionnelles d’une personne à effectuer un travail demandé». Ces critères peuvent être l’origine du candidat, le sexe, l’âge, l’opinion politique, l’activité syndicale, la race, la couleur, l’ethnie ou la religion.

A travers le code du travail, le législateur impose par l’article 507 à l’employeur qui embauche des salariés, l’obligation de ne prendre «en considération, pour ce faire, que les qualifications, expériences et recommandations professionnelles des demandeurs d’emploi». Indirectement toute autre considération est quelle que soit sa nature est illégitime d’autant plus que l’article 9 du code interdit les discriminations en matière d’emploi basées sur les critères précités

Les discriminations à l’embauche peuvent impliquer les employeurs, les services publics de l’emploi et les intermédiaires privés de l’emploi.

L’article 478 paragraphe 1 du code du travail interdit aux agences de recrutement privées toute discrimination basée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, de nature à porter atteinte au principe de l’égalité des chances et de traitement en matière d’emploi.

 Régis par les principes de la neutralité et de l’égalité, les services publics de l’emploi sont tenus de traiter les questions de l’emploi et de l’intermédiation dans le marché du travail sans aucune distinction d’aucune sorte entre les demandeurs d’emploi.

b) La conduite et la répartition du travail

Lors de l’exécution du travail conformément aux clauses conventionnelles, il se peut que dans l’entreprise et dans les services publics, les employeurs et les chefs de services prennent des mesures discriminatoires à l’égard des salariés en matière de conduite du travail et la répartition du travail. Le but est de priver les salariés de certaines conditions du travail et de les démotiver. Cette discrimination peut avoir lieu pour les différentes raisons illégitimes prévues par les instruments internationaux du travail.

c) La formation professionnelle

Le droit à la formation professionnelle dans toutes ses variantes est reconnu de manière

Solennelle aux travailleurs et ne doit pas faire l’objet de discrimination entre eux, abstraction de toute considération. Il permet l’accès à l’emploi et au travail et  l’évolution de la carrière.

La Déclaration universelle des droits de l’homme de1948 reconnait dans l’article 26 le droit à l’éducation, énonce que « l’enseignement technique et professionnel doit être généralisé ». Elle ajoute que l’accès aux études supérieures doit être ouvert en pleine égalité à tous en fonction de leur mérite.

Le Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels de 1966     reconnait le droit au travail et la formation technique et professionnelle (art6) et prévoit que l’enseignement supérieur doit être accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun l’instauration progressive de la gratuité.

La convention relative à l’élimination de toutes les discriminations à l’égard des femmes de 1979 reconnait le droit à la formation et au recyclage y compris l’apprentissage, le perfectionnement professionnel et la formation permanente.

Le droit à la formation est un des domaines qui ne doit pas faire l’objet d’aucune discrimination pour quelle que raison que ce soit. Dans ce giron, la convention internationale du travail n° 140 sur le congé-éducation payé de 1974souligne l’utilité de la formation pour l’acquisition, le perfectionnement et l’adaptation des compétences nécessaires à l’exercice de la profession ou à la fonction ainsi qu’à la promotion et à la sécurité de l’emploi et ce, face au changement économique et structurel.

d) La rémunération

La rémunération, c’est-à-dire, le salaire comprend selon la convention n° 100 sur l’égalité homme-femme en matière de salaire. Le code du travail institue par l’article 346 l’interdiction de « toute discrimination relative au salaire entre les deux sexe pour un travail de valeur égale ».

En dépit du principe de la liberté de négociation des salaires et de leur fixation, le principe de l’égalité des salaires entre l’homme et la femme doit être respecté chaque fois qu’il y a un travail de valeur égale. Dans le code du travail, le salaire minimum est applicable à tout salaire abstraction faite du sexe et de l’âge. Toutefois, de manière générale, dans les entreprises, il n’y a pas d’évaluation de la valeur du travail pour déterminer le montant du salaire.

e) L’avancement

Par avancement, on entend l’évolution de la carrière du salarié et du fonctionnaire la promotion en cas d’existence d’un plan de carrière. Il peut aussi concerner la classification du personnel. La jouissance des critères d’avancement doit se faire d’une manière neutre et sans prise en considération d’aucun des critères discriminatoires prohibés par la loi.

f) L’octroi des avantages sociaux

Les avantages sociaux qui sont accordés par l’entreprise de manière unilatérale, conventionnelle ou par le règlement intérieur constituent des droits acquis. Ils doivent être accordés de manière égalitaire et en fonction de critères professionnels objectifs de performance, de rendement. En tout cas, aucun avantage social ne peut être accordé sur la base des critères prohibés par l’article 9 du code du travail.

g) Les mesures disciplinaires

Les mesures disciplinaires sont les décisions prises par l’employeur à la suite d’agissements des salariés considérés comme fautifs en vertu de la législation du travail, d’une convention collective, d’un règlement intérieur ou selon sa propre appréciation. Ces mesures peuvent comprendre la mutation, la mise à pied, le blâme, la rétrogradation, l’avertissement et éventuellement le congédiement. En dépit de l’existence d’un droit disciplinaire, l’employeur peut prendre des mesures discriminatoires à l’encontre de ses salariés.

h) Le licenciement

La règlementation des conditions et des procédures de licenciement collectif total ou partiel et de licenciement individuel a pour finalité la stabilisation de l’emploi, la protection contre les licenciements non justifiés et la limitation du pouvoir disciplinaire.

 La convention internationale du travail n° 158 sur le licenciement de 1958 encadre le licenciement individuel et collectif en prévoyant la procédure du licenciement et en énumérant les motifs non valables du licenciement.

Ces motifs prévus par cette convention et qui sont reproduits dans l’article du code du travail sont :

L’affiliation syndicale ou la participation à des activités syndicales en dehors des heures de travail ou, avec le consentement de l’employeur, durant les heures de travail ;

Le fait de solliciter, d’exercer ou d’avoir exercé un mandat de représentation des travailleurs ;

Le fait d’avoir déposé une plainte ou participé à des procédures engagées contre un employeur en raison de violations alléguées de la législation, ou présenté un recours devant les autorités administratives compétentes ;

La race, la couleur, le sexe, l’état matrimonial, les responsabilités familiales, la grossesse, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale ; l’absence du travail pendant le congé de maternité.

 L’absence temporaire du travail en raison d’une maladie ou d’un accident ne devra pas constituer une raison valable de licenciement. L’article 36 du code du travail reproduit la disposition de la convention n° 158 et interdit le licenciement pour toutes les raisons précitées raisons

L’article 9 du code du travail qui énumère le périmètre des discriminations dans les relations du travail est lacunaire .Il ne prévoit pas les stages, l’affectation, la mutation et le renouvellement du contrat comme champ potentiel des discriminations.

E) Les sanctions des discriminations dans l’emploi et la profession dans le code du travail

Les infractions à l’article 9 du code du travail qui incrimine les discriminations susceptibles de violer ou d’altérer le principe d’égalité des chances ou de traitement sur un pied d’égalité en matière d’emploi et de travail dans l’entreprise sont passibles en application de l’article 12 d’une amende de 15.000 à 30.000 dirhams. Les infractions relatives à l’entrave à l’exercice qui peut constituer une violation du principe de l’égalité fondée sur le critère syndical sont punies par l’article 428 de la même amende.

Les violations des interdictions faites par l’article 478 aux agences de recrutements privées et auxentreprises d’emploi temporaire et qui consistent en toute «discrimination basée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, de nature à porter atteinte au principe de l’égalité des chances et de traitement en matière d’emploi» sont sanctionnées elles aussi de la même amende (25.000 à 30.000 dirhams) par l’article 494.

Dans tous les cas, en cas de récidive l’amende est portée au double, c’est-à- dire sera entre 50.000 à 60.000 dirhams.

Ahmed Bouharrou Ouharrou

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