L’Europe perd les élections italiennes…

Les Italiens se sont réveillés ce lundi matin sans aucune majorité parlementaire ; ce qui, en plongeant le pays dans une totale incertitude, va l’engouffrer dans d’inextricables tractations politiques. La seule vérité qui saute aux yeux, à première vue, dès qu’on se penche sur les résultats des uns et des autres, c’est que  c’est l’Europe qui a perdu cette élection puisque ce sont les partis dits antieuropéens qui ont fait le plein.

Et si la coalition droite-extrême droite a obtenu un total de 37% des voix  soit 14% des voix et 59 sièges pour Forza Italia du vieux Silvio Berlusconi et 17,4% des suffrages exprimés et 73 sièges pour  la Ligue de Matteo Salvini (extrême-droite, souverainiste et anti-immigration), le Mouvement 5 Etoiles (M5S) qui use d’un discours très critique à l’égard de l’Union Européenne et qui a, très souvent, appelé à une sortie de l’Euro peut s’enorgueillir de caracoler en tête puisqu’il est parvenu, à lui tout seul, à obtenir 32,7% des voix soit 133 sièges au Parlement bien loin devant le Parti Démocrate de centre-gauche de Matteo Renzi qui n’a récolté que 19% des voix. Son leader, Luigi de Maïo, 31 ans, estime qu’il a, désormais, «la  responsabilité de donner un gouvernement à l’Italie» car son parti est «une force politique qui représente le pays tout entier».

Or Matteo Salvini, le leader de la Ligue, ne l’entend pas de cette oreille puisqu’en ayant obtenu 37% des voix, la coalition droite-extrême droite à laquelle il appartient disposerait, désormais, du «droit et du devoir de gouverner» sans même faire appel au Mouvement 5 Etoiles.

Matteo Renzi, l’ancien premier ministre, a décidé, pour sa part, de quitter la direction du Parti Démocrate après sa cuisante déconfiture. Il a  annoncé le positionnement de sa formation politique dans l’opposition afin de ne point «servir de béquille à un gouvernement anti-système» en s’alliant au Mouvement 5 Etoiles et déclaré « Notre campagne a été trop technique (et) nous avons souffert du vent extrémiste, celui que nous avions bloqué en 2014». Le «vent extrémiste» dont il parle est ce vent qui, avec l’aide de l’importante vague migratoire, aurait donc poussé, vers le Mouvement 5 Etoiles et vers la Ligue, les voix qui normalement devaient tomber dans l’escarcelle du Parti Démocrate ; à savoir, les voix d’un italien sur deux.

Son prédécesseur à la tête du gouvernement italien,  le vieux Silvio Berlusconi qui, malgré ses 81 ans, croyait dur comme fer pouvoir faire un retour sur la scène politique et faire barrage au populisme, est l’autre grand perdant de cette élection puisqu’il arrivé en quatrième position.

Force est de constater, par ailleurs, que si le Mouvement 5 Etoiles avait toujours refusé de nouer des alliances et mené une campagne électorale «contre les combines politiques», ses élus ont ouvert la voie à des rapprochements dès lors qu’ils sont persuadés que les autres formations politiques se trouvent, désormais, contraintes de leur tendre la main et d’accepter leurs «méthodes de correction et de transparence».

Interrogé, le Président Macron a mis la victoire des formations politiques eurosceptiques sur le compte de «la très forte pression migratoire» que connaît l’Italie alors que la ministre française des affaires européennes, sans parler de «catastrophisme» comme d’autres, a tout de même déclaré que l’Italie se trouve, désormais, «dans une phase d’eurodéception». La Présidente du Front National,  Marine Le Pen, a adressé, quant à elle, ses «chaleureuses salutations» à Matteo Salvini, le leader de la Ligue, car sa «progression spectaculaire est une nouvelle étape du réveil des peuples».

Aucune majorité ne s’étant donc dessinée, il appartient alors au Président de la République, Sergio Mattarella, de désigner celui qui aura la charge de former le nouveau gouvernement. Mais pour cela, il lui faudra attendre l’ouverture de la nouvelle législature le 23 Mars prochain ainsi que la désignation, par les parlementaires, des présidents et vice-présidents des Chambres et des groupes.

Et si, à l’issue des tractations politiques qu’entreprendront les différents partis, aucune majorité n’est constituée, le chef de l’Etat sera alors contraint de garder le gouvernement actuel de Paolo Gentiloni (centre-gauche) et d’appeler à la tenue de nouvelles élections.

Les deux semaines qui nous séparent du 23 mars seront, sans aucun doute, pleines de rebondissements pour les leaders des différents partis politiques italiens et nul ne sait, à l’heure qu’il est, ce qu’ils sortiront de leur chapeau à la suite de leurs tractations. Alors, attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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