Mohamed Melehi : l’étoile filante de la modernité artistique

Mohamed Nait Youssef

Le milieu artistique marocain s’est réveillé, le 28 octobre 2020, sur la triste nouvelle du départ définitif de la figure emblématique de la modernité picturale, Mohamed Melehi. Le maudit virus de la Covid-19 l’a emporté alors qu’il s’est déplacé en France pour des contrôles médicaux. Il a rendu l’âme au CHU Ambroise Paré, à l’âge de 84 ans. Né en 1936 à la magnifique ville d’Assilah, Melehi est sans aucun doute un artiste doué, engagé mais aussi inclassable, inlassable, accompli, dont l’œuvre artistique a enrichi le paysage artistique national et international. Son apport est considérable, son engagement aussi. En effet, ses expérimentations géométriques, ses recherches esthétiques, ses quêtes permanentes de nouveaux styles artistiques, ses combats culturels, sans oublier bien entendu son travail de designer, d’éditeur, de photographe, le défunt a dédié sa vie, son art à la modernisation de la culture dans notre pays. Artiste novateur aux multiples facettes, Melehi était un visage lumineux et une valeur sûre de notre scène artistique en pleine émergence. Ses qualités sont multiples un peu comme sa palette riche et  unique. Il fut un créateur de génies, un passeur de lumière et de culture a été connu pour son talent artistique ayant apporté tant de beauté, de modernité à la scène artistique d’ici et d’ailleurs. En contemplant ses toiles, on se souvient toujours de ses vagues, des symboliques géométriques de ses formes offrant des sens uniques et voluptueux.

Le voyage : une grande école

Melehi a été connu par ses déplacements, ses expériences multiples et ses rencontres ayant  influencé ses recherches et sa démarche artistique et plastique. Très jeune, l’artiste qui fut d’ailleurs l’un des fondateurs d’une nouvelle expression picturale a commencé sa carrière artistique en Europe. C’est en 1955 que cet enfant prodige de d’Asilah avait fait ses premiers pas en intégrant l’école des beaux-arts de Séville. Une expérience artistique enrichissante, et ce en découvrant les différentes écoles et courants picturaux. Entre temps, l’artiste entamait des recherches en matière des arts plastiques où il découvre des nouvelles formes plastiques et un nouveau style plastique qui  l’ont poussé à conquérir de nouveaux champs de création au-delà de la figuration. Par ailleurs, les voyages de Melehi entre Rome Paris, New York ont enrichi son œuvre picturale. En 1964, il retourna au bercail afin de contribuer à l’enrichissement de la scène culturelle et artistique nationale.

Une œuvre d’une grande qualité artistique et esthétique

Un parcours artistique long, inédit, le regretté a suivi sa passion jusqu’au bout, jusqu’au  dernier souffle de sa vie. En effet, pour la petite histoire, c’est en 1958 que cet artiste hors pair avait organisé à la ville de détroit, Tanger, sa première exposition à la bibliothèque américaine. En 1969, en compagnie d’autres artistes plasticiens, entre autres, Farid Belkahia, Mohamed Chabâa, Romain Ataallah, Mustapha Hafid ou encre Mohamed Hamidi, Melehi  exposa ses œuvres une semaine durant sur la place mythique de  Jamaa el-Fna à la ville ocre,  Marrakech. Cette exposition-événement est constituée par les critiques et historiens de l’art comme un véritable manifeste pour un art contemporain populaire au Maroc. L’œuvre de Melehi, peintre et artiste universaliste, a dépassé les frontières. On y voit à travers ses œuvres tout ce génie pictural des deux rives de la Méditerranée et ouvert sur le monde. Ses toiles sont certes le reflet de son monde, mais aussi des préoccupations toujours d’actualité.

Un artiste universel…

Il va sans dire que le séjour de Melehi à Rome, en Italie, a laissé une empreinte profonde  dans les œuvres de l’artiste. Sur le plan artistique, cette ville avait connu dans les années cinquante et soixante une dynamique en matière d’art plastique incroyable en s’ouvrant sur l’expérimentation internationale. À cette époque là, il découvrait les travaux de grands artistes tels que Alberto Burri, Capogrossi, Kounellis, Perelli ou encore les œuvres des artistes peintres. Notamment, expressionnistes abstraits américains dont Willem De Kooning, Robert Rauschenberg et bien d’autres. Or, Mohamed Melehi n’a pas rompu les liens avec la scène artistique nationale et ses artistes. Ainsi, il avait  toujours gardé des liens avec Jilali Gharbaoui, Mohamed Chabâa, Mohamed Ataallah…

Melehi, l’engagé…

Par ailleurs, Melehi  a joué le rôle de l’artiste fédérateur, en bâtissant des passerelles entre les intellectuels, critiques et historiens de l’art au Maroc, dans le continent africain et dans le monde arabe. Égal à soi-même, l’artiste modeste, humble et ami de tout le monde a toujours soutenu les jeunes artistes talentueux, et a œuvré pour le rayonnement de la culture de la modernité artistique.

Melehi a lutté dans la revue Souffles (Anfās), créée en 1966, aux côtés des poètes Moustapha Nessabouri, Abdellatif Laâbi ainsi que d’autres noms tels que  Mohammed Khaïr-Eddine pour une culture marocaine progressiste, épanouie, éclairée, moderne et universelle.    

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