Pépins

Le pilotage de la filière pourra-t-il ajuster, corriger et améliorer pour que le choc subi ne soit pas le début d’un repli définitif de la filière des agrumes, historiquement  en proue ou, la gouvernance basée sur le «laisser aller, laisser faire» sonnera-t-elle le glas de l’effort de modernisation entrepris? Beaucoup plus que l’aléa climatique dont le poids reste non négligeable, ce sont les choix opérés dans «le renouvellement des vieilles plantations et l’extension des superficies» qui se sont avérés désastreux. La compétitivité de la production nationale s’est ainsi trouvée malmenée et le «bonbon du Maroc» acheté sur le marché canadien est devenu, cette année, répulsif, sans couleur ni valeur gustative. Les mesures incitatives, en clair l’argent public fourni en tant que subventions, ont suscité un tel engouement que «le renouvellement des vieilles plantations et l’extension des superficies» ont dépassé les prévisions des stratèges du Plan Maroc Vert. C’était là une motivation encourageante pour la suite sauf que «l’adaptation du profil variétal et des porte-greffes» ne répondit guère aux besoins de la commercialisation, à la promotion des exportations et à l’organisation du marché intérieur. La catastrophe est telle qu’il a fallu semble-t-il importer de l’orange sud-africaine pour la consommation propre des Marocaines et des Marocains. Alors que les spéculations sur la rentabilité des «investissements» entrepris se trouvent défaillantes, ce qui posera divers problèmes au niveau du remboursement des échéances de crédit et de la suite qu’il conviendra donner pour revenir à un positionnement compétitif, la recherche du cash par  la vente directe de la production des vergers se trouve elle-même impossible. Les gens du Sous en savent quelque chose! Cette «peau de banane» sur laquelle a glissée la filière agrumes montre la faiblesse des relations entre le monde agricole et la recherche développement.
L’éléphantissime porte-greffes (comme la prononciation de son nom d’espèce -macrophylla- le laisse entendre selon les préceptes projetés par les nouveaux tenants de la darija!)  a été choisi, semble t-il, pour éviter la tristeza  et pour sa mise à fruit rapide. Il est devenu responsable d’une triste catastrophe agrumicole qui risque de mettre la filière dans une régression telle que le Maroc serait obligé de consommer de l’orange importée.
L’encadrement scientifique est marginalisé au profit des pépiniéristes et de la recherche du profit. De même que l’accompagnement de l’Etat par des subventions (trois milliards de dirhams, soit le tiers de l’investissement nécessaire) ne peut s’expliquer ni par son opportunité ni par sa généralisation. N’aurait-il pas été mieux pour l’Etat d’assurer, par cet argent donné à fonds perdus, le transfert, du Nord vers le Sud, de l’eau nécessaire et de la rendre disponible à une agriculture moderne rentable et durable, là où des potentialités agropédologiques ne demandent qu’à se faire exploiter ? Des quantités très importantes d’eau continentale s’évacuent encore vers la mer et sont ainsi perdues pour les besoins de l’agriculture nationale alors que des superficies aussi importantes de sols restent non arables en raison du déficit hydrique qui les caractérise. Selon la Stratégie nationale de l’eau, «Les régions impactées directement concernent les  bassins du Sebou, Bouregreg, Oum Er Rbia et Tensift. Ces trois  derniers bassins, respectivement cœurs industriels, agricoles et  touristiques du pays, sont tous trois déficitaires. En particulier, le  transfert d’eau brute interbassins sera un levier fondamental du  développement socio-économique du Royaume, en permettant  de soutenir l’essor urbain de la région de Marrakech et en  accroissant significativement la valeur ajoutée agricole dans le périmètre des Doukkala et dans la Chaouïa.» Pourquoi attendre pour le faire et chercher des pépins?
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