Premier exercice difficile pour le conseil de la concurrence

Le président du Conseil de la concurrence s’est investi dans les nombreux dossiers laissés par son prédécesseur.  Driss Guerraoui, qui s’exprimait à l’occasion lors d’une conférence de presse organisée vendredi dernier, indique avoir hérité pas moins de 106 dossiers touchant à tous les domaines.

Sur les 106, le Conseil en a examiné une quarantaine. L’ambition est d’assainir les saisines d’ici deux mois au plus tard. La commission permanente se réunit tous les lundis pour statuer sur ces dossiers. Avant cela, le Conseil contacte chacun des requérants pour savoir s’ils maintiennent ou renoncent à leurs requêtes.

Globalement, la majorité des saisines concernent la commande publique, précise Guerraoui. Elles sont cependant très hétérogènes, tant dans leur nature (concentration, pratique anti-concurrentielles), que dans leurs sources (entreprises, commissions parlementaires, centrales syndicales…). Ce qui fait dire au président du Conseil que la concurrence est au carrefour de la vie quotidienne des citoyens.

L’assainissement de ces arriérés ne sera pas chose facile. Le régulateur ne dispose que de 10 enquêteurs assermentés, soit à peu près 490 de moins que le Conseil de concurrence espagnol. Pour autant, Driss Guerraoui affiche de grandes ambitions. Il évoque des chantiers importants dont trois ayant trait à la mise en place d’un baromètre de la concurrence, à la réalisation de sondages d’opinion annuels sur la perception de la concurrence et à la diffusion de capsules de sensibilisation.

Les attentes sont grandes. Surtout que le Conseil dispose, depuis 2014, d’un pouvoir décisionnel. L’article 2 de la loi n 20-13 lui confère les pleins pouvoirs en matière de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et de contrôle des opérations de concentration économique». Ce texte donne également le pouvoir de «se saisir d’office de toutes les pratiques susceptibles d’affecter le libre jeu de la concurrence…» et «se saisir d’office des manquements aux engagements pris par les parties à une opération de concentration économique lorsque l’administration a évoqué la décision relative à ladite opération».

Mais pour son premier exercice, le Conseil a plutôt suscité l’inquiétude chez le consommateur. Le niet opposé au plafonnement des marges et des prix des carburants n’était pas attendu. Même Lahcen Daoudi, en est surpris. Dans des déclarations accordées à plusieurs médias, le ministre des Affaires générales et de la gouvernance attaque acerbement l’avis du Conseil, reprochant à cette instance d’outrepasser ses prérogatives en procédant à une évaluation de la politique de la libération des prix des carburants.

Daoudi, à l’origine de cette saisine, considère que le Conseil a manqué d’indépendante, alors que la loi le décrit que comme une institution indépendante  chargée, dans le cadre de l’organisation d’une concurrence libre et loyale, d’assurer la transparence et l’équité dans les relations économiques, notamment à travers l’analyse et la régulation de la concurrence sur les marchés, le contrôle des pratiques anticoncurrentielles, des pratiques commerciales déloyales et des opérations de concentration économique et de monopole.

Le gouvernement se retrouve en tout cas entre deux feux : le conseil de la concurrence d’un côté et le parlement de l’autre. L’avis du Conseil est certes consultatif, mais il reste indispensable pour une économie de marché. En face, le rapport de la commission d’enquête parlementaire recommande le plafonnement des prix.

Hajar Benezha

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