Après le retrait des Etats-Unis de l’accord en vertu duquel les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU et l’Allemagne avaient décidé de lever les sanctions initialement prises à l’encontre de l’Iran en contrepartie de l’engagement de ce dernier de ne pas se doter de l’arme nucléaire, le Président iranien Hassan Rohani avait déclaré que la République Islamique allait rester fidèle à l’accord de Vienne mais qu’elle se tiendrait prête à reprendre «en cas de besoin l’enrichissement de l’uranium sans aucune limitation».
En outre, en réponse au souhait des pays européens signataires de l’accord précité, à savoir la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne de voir l’Iran «rester» dans cet accord, le vice-ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi a conféré aux européens, lors d’une réunion de la Commission des Affaires étrangères du Parlement iranien, un délai allant de «45 à 60 jours pour donner les garanties nécessaires pour assurer les intérêts de l’Iran et compenser les dommages causés par la sortie des Etats-Unis». Et celui-ci d’ajouter que «si les européens ne donnent pas de garanties, il reviendra aux responsables du pays de prendre les décisions nécessaires», entendez par-là, une poursuite des opérations d’enrichissement de l’uranium.
Ayant entamé, à partir de ce dimanche, une tournée-marathon à Pékin, Moscou et Bruxelles où il compte rencontrer ses homologues français, allemand et britannique, Javad Zarif, le chef de la diplomatie iranienne, qui reste prudent quant aux possibilités de sauver l’accord de Vienne entend entamer le dialogue avec les pays «qui restent dans l’accord sur le nucléaire iranien» pour construire, avec ces derniers, «un cadre futur clair» et décrocher des «garanties» portant sur la préservation des intérêts de son pays notamment après que le guide suprême iranien l’Ayatollah Ali Khamenei et les conservateurs iraniens aient critiqué sa démarche en déclarant que l’Iran «ne peut pas faire confiance aux Européens».
Mais quelles seraient donc les «garanties» exigées pas Téhéran ?
La première garantie demandée par Téhéran consiste à faire condamner, par le Conseil de Sécurité des Nations-Unis, le retrait unilatéral de Washington de l’accord sur le nucléaire iranien signé à Vienne en Juillet 2015 par l’Iran, l’Allemagne et les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité alors que la seconde a trait au maintien du Plan Global d’Action Conjoint (PGAC) qui permet la poursuite des transactions bancaires entre l’Iran et l’Europe ainsi que le maintien de la vente du pétrole iranien et des investissements européens en Iran.
Dès son arrivée à Pékin, le chef de la diplomatie iranienne s’est déclaré « prêt à toutes les options » dès lors que l’Europe se porte garante de la préservation des intérêts de l’Iran s’il reste dans l’accord. En réponse, le chef de la diplomatie chinoise, Wang Yi, qui a vivement dénoncé la décision du Président Trump quant au retrait des Etats-Unis de l’accord de Vienne et au rétablissement des sanctions à l’encontre de Téhéran, a signalé l’entière disposition de son pays à entamer «des discussions stratégiques opportunes avec l’Iran» et fait part de sa profonde conviction que la tournée qu’effectue le ministre des affaires étrangères de la République islamique contribuera à améliorer «la compréhension qu’ont ces pays de la position iranienne».
Il convient de préciser que la Chine qui, en Septembre dernier avait accordé à cinq banques iranienne des lignes de crédit d’un montant global de 10 milliards de dollars pour le financement de projets d’infrastructure outre la construction pour 700 millions de dollars d’une ligne de chemin de fer reliant le port de Bouchehr (au sud du pays) au reste du réseau iranien ainsi que divers autres projets nécessitant une enveloppe globale de 33 milliards de dollars reste, de fait, le premier partenaire économique et commercial de l’Iran.
Et si, enfin, lors de sa venue à Bruxelles, le ministre iranien a reçu ce que l’Europe appelle «un paquet de propositions» au titre de la préservation des intérêts de l’Iran peut-on croire que l’accord sur le nucléaire iranien en sera «sauvé» pour autant et que les intérêts de Téhéran seront préservés au grand damne d’un président américain qui, au mépris des lois et du droit international, a fait du désengagement systématique des Etats-Unis de tous les accords internationaux son cheval de bataille ? Attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi