Un combat quotidien et une affaire de tou(te)s

La lutte contre la culture de la haine

La culture de la haine ne cesse de se répandre, partout dans le monde, de manière très dangereuse mettant en péril, non seulement la paix et la stabilité dans le monde, mais aussi et sans exagération aucune, toute la civilisation humaine. Cela appelle une mobilisation, tout azimuts, de la communauté internationale pour être à l’affût des différentes expressions et manifestations de la culture de la haine et pour détecter les multiples véhicules qui la supportent, tant au niveau national qu’international ; ainsi que pour le renforcement des moyens à même de la combattre et pour la promotion des valeurs de la tolérance et de respect de l’autre.

Au niveau international, la culture de la haine portée par le discours de la xénophobie, de la stigmatisation, du mépris de l’autre et de sa diabolisation se répand comme un feu de paille à travers le monde dans une escalade infernale où les extrémismes de tous bords s’alimentent mutuellement prenant en otage la communauté humaine et portant de graves atteintes au corpus universel des droits humains. L’un des points d’entrée pour combattre cette culture de la haine est de promouvoir le respect mutuel entre les nations, les peuples, les communautés, les religions et les croyances. Mais ce respect mutuel est systématiquement remis en cause sous le prétexte de la liberté d’expression et d’opinion. La liberté d’opinion est, certes, l’un des droits humains fondamentaux et consacré par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme dans son article 17. Mais elle ne doit pas s’exercer dans l’absolu car elle est encadrée par le respect des autres libertés et droits consacrés par la même Déclaration, notamment le droit à la dignité (article 1) et le droit de croyance (article 18).

Au Maroc, au-delà de la stabilité institutionnelle et la quiétude sociale dont jouit globalement le pays, la culture de la haine se manifeste dans notre société à travers le développement de la violence dans ses différentes formes, symbolique, verbale et même physique et qui touche pratiquement toutes les sphères de la vie sociale y compris les espaces qui sont censés être des lieux de dialogue et de tolérance comme les médias, les instances élues, les associations, les partis politiques; voire même les universités et parfois le parlement. Le tout, dans une passivité collective aboutissant à une sorte de normalisation tacite et démissionnaire avec la violence comme si c’était quelque chose de naturelle et de normale dans notre société.

La violence prend des proportions de plus en plus alarmantes : dans la famille, dans la rue, dans les transports publics, dans les stades, dans les manifestations revendicatives et même dans les universités et lors de spectacles en plein air. D’aucuns sont toujours à l’affût du moindre prétexte pour susciter la violence et le trouble de l’ordre public.

Par ailleurs, la recrudescence, ces derniers temps, du discours de la haine, de la diabolisation et de la stigmatisation et d’atteinte à la dignité de personnalités publiques vivantes ou décédées ; ainsi que la prolifération des agressions verbales à l’encontre de divers groupes et individus et la multiplication de sentences d’excommunication doivent nous rappeler que la menace est réelle et toujours présente.

Ces discours haineux qui prolifèrent, au niveau des sites Internet, des réseaux sociaux, des titres de presse, des rencontres politiques et des joutes parlementaires frappent de plein fouet les valeurs de tolérance et de coexistence sociétale; sapant ainsi les fondements de la cohésion de la société et portant les germes de la déstabilisation et de la mise en péril de la paix civile dans le pays.

Face à cette situation, le combat contre ce véritable fléau doit être permanent et sans répit; sachant que c’est l’affaire de la société toute entière qui doit combattre la culture de la haine et ce, dans le cadre d’une stratégie globale et intégrée de lutte contre le fanatisme et donc de l’intégrisme, englobant aussi bien les aspects religieux, politiques, socio-économiques, médiatiques, culturels, pédagogiques et, bien sûr, les aspects sécuritaires et judiciaires.

On a souvent tendance à ramener le problème à l’un de ces aspects au détriment des autres, alors qu’ils sont tous autant importants les uns que les autres.

Il s’agit donc d’une lutte au quotidien, sur le plan idéologique, politique, et surtout au niveau de la pensée et des idées. Cette lutte permanente doit être menée, conjointement et de manière complémentaire, par les pouvoirs publics, les forces démocratiques, les intellectuels, les oulémas, les acteurs de la société civile, les enseignants, les artistes et vedettes, les éducateurs et les médias, notamment audiovisuels. Il devient urgent à ce titre de voir de très près les programmes d’enseignement destinés à nos jeunes aussi bien au niveau du cycle primaire que, surtout, secondaire.

Par ailleurs, les débats doivent être plus larges, plus fréquents au niveau des médias pour décortiquer ce phénomène afin d’en prémunir les citoyennes et les citoyens, notamment les jeunes parmi eux. Il va sans dire qu’il faut continuer à renforcer plus notre système sécuritaire et le doter de tous les moyens humains et matériels à même de combattre le fléau de l’intégrisme, et ce dans le respect de la loi et des droits humains.

La lutte pour la promotion des valeurs de la tolérance et contre la culture de la haine et donc contre le fanatisme est une affaire de tous les jours. Elle est de longue haleine. Elle se gagne sur tous les fronts dans la durée, et non avec des actions ponctuelles en réaction aux actions ou déclarations ou événements circonstancielles.

En d’autres termes, il faut que nous soyons, tous et à tous les niveaux, constamment vigilants et proactifs.

Par M’Hammed GRINE

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