Volontarisme et engagement citoyen

Réplique : «Zéro mica», la bataille de l’été !

C’est l’été de toutes les batailles. Il y a eu  la bataille de Fellouja, il y a celle de Alep qui se prolonge et il y a celle de Moussol qui se prépare. Et puis du côté du soleil couchant, il y a la bataille du 7 octobre qui pointe à l’horizon et pour laquelle les grandes manœuvres ont déjà commencé; mobilisant tous les moyens de «la guerre psychologique» avec moult intox et manipulations médiatiques. Mais loin de tous ses bruits, une bataille mérite tous les honneurs de l’été; elle a donné sens aux mornes journées estivales et a fait sortir les gens de leur torpeur et de leur passivité, sans tapage ni violence.

Celle  pour l’éradication des sacs en plastique ou ce qui est entré dans notre lexique vernaculaire  avec le syntagme «zéro mica». J’avoue que ce fut (c’est) l’une de mes passions de cet été parce que j’abhorre, j’exècre cette calamité qu’est le sac en plastique, car de visu j’ai constaté les ravages qu’il provoque dans la nature.

L’opération continue son bonhomme de chemin, sans malheureusement susciter l’intérêt qu’elle mérite du côté des  institutionnels politiques alors que c’est un événement, au-delà de sa dimension conjoncturelle (la rencontre de Marrakech ; l’intérêt écologique évident),  des plus révélateurs d’un point de vue citoyen, anthropologique et donc politique. A l’origine, il y a une loi  (la fameuse 77/15), qui sommeillait dans les archives du Journal officiel et que le ministère de l’industrie, du commerce, des investissements et de l’économie numérique a décidé tout simplement de mettre à exécution.

Pour ce faire, un thème a choisi dans la grande tradition rébarbative du jargon administratif « interdiction de la fabrication, de l’importation, de l’exportation de l’utilisation de sacs en matière plastique». L’entrée en vigueur de ce texte a suscité immédiatement l’adhésion de la société civile avec la campagne menée par la coalition marocaine pour la justice climatique et les choses prendront une allure plus populaire avec le slogan réussi de zéro mica. Une campagne de sensibilisation est menée dans ce sens. Le point d’orgue de cette campagne sur le plan médiatique a été le spot audiovisuel dont le succès est dû certes à son scénario très didactique mais aussi à son casting avec notamment la présence de Choumikha, une des figures les plus positives et les plus brillantes du PAM (comprendre le paysage audiovisuel marocain !!!!).

Sur le terrain, les réactions furent diverses, à l’image de la norme anthropologique caractéristique de la société marocaine face à toute innovation.

Celle-ci, ne l‘oublions pas est marquée par des pratiques et des influences rurales et paysannes. Des camarades agronomes m’ont ainsi appris que durant les périodes fastes de la réforme agraire, la société paysanne réagissait selon trois niveaux : les pionniers qui affichent immédiatement leur adhésion (témérité, calcul politique…) ; les récalcitrants (ceux qui refusent tout changement) et les hésitants (ceux qui attendent de voir de quel côté se penchera la balance pour trancher). Mon hypothèse est que face à Zéro mica, le même schéma été fonctionné. Avec cependant des leçons fondamentales à souligner.

Un projet de réforme ne peut se contenter de la justesse de son argumentaire ou de sa pertinence. Il faut une dose de volontarisme politique pour réussir la réforme. Sur ce point et à l’heure du bilan de son mandat, reconnaissons à ce gouvernement qu’il a souvent privilégié le souci de la réforme sur le calcul politicien immédiat.

Ce volontarisme politique, crucial et vital dans le cadre d’un pays qui n’a pas de richesse naturelle exceptionnelle doit être associé à une mobilisation citoyenne. C’est l’engagement libre et conscient des citoyens qui donne tout son sens à tout acte de changement.

Mohammed Bakrim

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