Béla Tarr président du jury 2016
C’est une référence incontournable du cinéma contemporain, une figure absolue de la cinéphile et du cinéma d’auteur qui a été choisie pour présider le jury du festival de Marrakech pour la 16ème édition qui se tient cette année du 2 au 10 décembre 2016. «C’est un excellent choix» a commenté le grand ami de Marrakech, Martin Scorsese qui voit dans Béla Tarr «un des derniers aventuriers du cinéma».
Béla Tarr, réalisateur, scénariste, producteur est né le 21 juillet 1955 à Pecs (Hongrie). Il tourne son premier film à l’âge de 22 ans avant de rejoindre une école de cinéma ; il est en effet lauréat de l’école du cinéma et du théâtre de Budapest avec un film de fin d’étude L’outsider (1980). Un titre prémonitoire en quelque sorte, un titre générique de ce qui sera une carrière cinématographique exceptionnelle où tous les qualificatifs sont convoqués pour décrire une des démarches esthétiques les plus édifiantes du cinéma contemporain. Béla Tarr est un auteur complet ; mais ce n’est pas une simple étiquette, le concept d’auteur ici est significatif d’une exigence qui s’exprime dans une vision cinématographique cohérente portée par une radicalité créatrice, incarnée dans une expérience singulière du temps. Tous les cinéphiles se réfèrent au plan séquence mémorable de son dernier film Le cheval de Turin, Ours d’or à Berlin en 2011. Un film véritable manifeste esthétique d’une démarche que le philosophe Jacques Rancière a théorisée dans une célèbre conférence consacrée à un cinéma de l’inertie répétitive, où le changement est un leurre, la forme méditative et où les humains sont confrontés aux limites de leurs conditions.
Un cinéma nourri de références littéraires, musicales, théâtrales et picturales qui puisent dans la grande tradition du grand cinéma européen de Carl Dreyer, Andreï Tarkovski, Milos Jancso (son mentor hongrois)… et qui trouve une filiation légitime dans tout un courant du cinéma contemporain celui de Jim Jarmusch, Gus Van Sant ou encore Martin Scorsese.
A ceux qui lui reprochent la longueur/ la lenteur de ses films, Béla Tarr rétorque «Qui a décidé de la longueur standard d’un film ? Les gens du show-business. Mais le cinéma, ce n’est pas du show-business, c’est le septième art. Certains films sont comme des haïkus, d’autres demandent plus d’ampleur».
Lucide et conscient des limites de sa propre démarche, ne voulant pas se répéter, il a décidé d’arrêter le cinéma et a choisi d’ouvrir une école de cinéma à Sarajevo. Une ville symbole.
M. Bakrim