De São Paulo à la cité ocre
Mohamed Nait Youssef
La cité ocre abrite un rendez-vous artistique incontournable : la première Invocation de la 36e Biennale de São Paulo dont le titre «Not All Travellers Walk Roads – Of Humanity as Practice» est composé de vers de la femme de lettres, militante des causes sociales et féministes et poète brésilienne, Conceição Evaristo. L’événement, présenté par la Fundação Bienal de São Paulo, débarque à Marrakech en proposant aux mordus de l’art, une programmation étouffée partagée entre musique, poésie, performances et débats… Un avant-goût à l’approche de la prochaine édition de la Biennale!
Ainsi, «Souffles : sur l’écoute profonde et la réception active», tel est le thème choisi pour cette Invocation, imaginé par l’équipe conceptuelle de la 36e Biennale en collaboration LE 18 et la Fondation Dar Bellarj dans le cadre de démarches curatoriales d’exploration du son et de la musique comme voies de connaissance, mettant la lumière sur des thématiques importantes, entre autres, la création de lieux et d’espaces, la circularité, la précarité du souffle, la musique Gnawa comme manière d’être, les cultures soufies et l’écoute comme pratique de coexistence. Pour ce faire, une belle brochette d’artistes, d’intellectuels et d’acteurs culturels à savoir Maalem gnawa Abdellah El Gourd , Fatima-Zahra Lakrissa (commissaire d’exposition et chercheuse indépendante), Ghassan El Hakim(acteur et réalisateur) , Kenza Sefrioui (critique littéraire et éditrice), Laila Hida ( artiste, fondatrice LE 18), Leila Bencharnia (artiste sonore, interprète acousmatique, Maha Elmadi (directrice de la Fondation Dar Bellarj), Mourad Belouadi (multi-instrumentiste et photographe), Simnikiwe Buhlungu (artiste ) et Taoufiq Izzediou (chorégraphe), se mobilisera pour réussir cette grande manifestation artistique et culturelle d’envergure.
« Marrakech est un carrefour de cultures, de croyances et de langues, dont une grande partie de ses connaissances est transmise par le son et le geste. La première Invocation explore la manière dont ces traditions soniques (orales et auditives) sont mises en place, préservées et transmises. Les pratiques ancestrales d’écoute profonde – des rituels performatifs de la confrérie gnawa à la tradition orale de la Halqa dans les formes théâtrales nord-africaines – servent de point de départ à cette édition.», précisent les organisateurs de l’événement.
De l’écoute avant toute chose…
L’écoute sera un fil conducteur de la programmation de cette première Invocation. Par ailleurs, les intervenants croiseront les regards, par le biais de l’art et de la réflexion, sur les questions de l’altérité, du vivre-ensemble et de la coexistence, en se penchant bien entendu sur l’écoute profonde et la réception active. « Le titre est emprunté à Souffles, un poème de Birago Diop, sur le potentiel d’écoute d’une pléthore d’êtres – animé et inanimé –, mais aussi un magazine pionnier qui a osé imaginer la libération et l’émancipation des imaginaires politiques à travers la poésie et l’expérimentation du langage. Fondé au Maroc en 1966 et inspiré par des penseurs tels que Frantz Fanon, Mário de Andrade et René Depestre, il a été le premier magazine du genre à documenter les traditions orales susmentionnées jusqu’à sa dernière édition en 1971.», ont-ils révélé. Et d’ajouter : «Pour Souffles : sur l’écoute profonde et la réception active, un groupe d’agents culturels issus de différentes disciplines, tels que des écrivains, des musiciens, des artistes, des poètes, des performers, ainsi que des scientifiques, ont été invités à apporter leurs connaissances au programme discursif et performatif. » Et ce n’est pas tout. L’Invocation sera en outre une occasion idoine pour réfléchir sur’’ comment ces traditions ont été pratiquées et préservées dans différents milieux au fil des ans, y compris dans des publications.’’
De São Paulo à la cité ocre…
Entrée gratuite. Deux jours de voyage artistique, de réflexion, d’écoute attentive, d’échange interculturel, le public a eu droit à un programme qui s’articulera le premier jour (14 novembre) sur la pratique spirituelle de l’écoute du rythme et de sa résonance dans le corps, le deuxième jour 15 novembre sur la respiration pour revendiquer l’espace et l’existence, et sur l’héritage du magazine Souffles.
De São Paulo à la cité ocre, la programmation qui se veut par les initiateurs pédagogique, inclusive et communautaire animera plusieurs espaces culturels de Marrakech à savoir ; l’espace culturel multidisciplinaire et résidence artistique LE 18, créé en 2013 au cœur de la Médina de Marrakech, et à la Fondation Dar Bellarj, centre culturel dédié à la mise en valeur du patrimoine architectural. Il est à rappeler que le commissariat général de l’exposition a été confié à Bonaventure Soh Bejeng Ndikung.