Le cinéma, facteur de développement humain

Depuis quelque temps, des voix d’indignation s’élèvent contre l’état piteux dans lequel se déploie l’une des icones phares de l’histoire d’Agadir. En fait, il est question du cinéma Salam qui, ayant survécu au séisme de 1960, moisit, aujourd’hui, dans l’abandon, tel un hameau hirsute de la métropole. Certes, le même sort frappe d’autres salles de la ville, en particulier le Rialto qui, pareillement, succombe à la moisissure mortuaire.

Cependant, Salam revêtait une distinction toute particulière, au niveau de son architecture originale, son aspect patrimonial et surtout sa survivance mythique au sinistre cataclysme. La capitale du Souss qui, dans le temps, s’enorgueillissait de son riche répertoire de la cinéphilie, aussi bien à travers ses espaces de projection que ses ciné-clubs actifs durant des décennies, est, actuellement, orpheline, après le décès de ses beaux enfants de naguère.

En effet, dans maintes régions du royaume, nombre de salles de cinéma ne sont plus que de vagues réminiscences. A Casablanca, plus de la moitié n’y est plus, comme Chaouia, Appolo, Beaulieu, Monte Carlo, Mondial, Familia… Pourquoi donc cette chute vertigineuse qui ne fait qu’empirer, sous les yeux impuissants des cinéphiles ? Cette décadence est-elle due à la désaffection des adeptes du septième art ou au recul de l’industrie du cinéma, dans notre pays ?

Il est bien constaté que l’émergence des films marocains n’est plus un secret pour personne, depuis que les cinéastes produisent, chaque année, beaucoup plus qu’ils n’en produisaient, il y a quelques décades. D’autre part, il ne fait pas de doute que les productions étrangères qui déferlent à plein régime ne sauraient laisser insensibles les actuelles générations de tous bords. D’autant plus que les moyens de propagande facilitent, à un rythme soutenu, l’accès à l’information dans les patelins les plus reculés du pays.

Il convient alors de noter que, plus le cinéma avance plus la salle recule. Un dilemme qui demeure bien spécifique chez nous. Deux raisons paraissent indissociables dans ce quiproquo. Tout d’abord, l’Etat assume toute une part de responsabilité dans cette décrépitude, en tant que levier précurseur de la promotion de l’art de la cinématographie, toutes tendances confondues, en projetant l’encouragement des investissements pour de telles infrastructures et en assurant les conditions de flux, à travers des programmes conçus pour l’initiation et l’intéressement à l’adresse des masses populaires. D’autre part, il revient aussi aux entreprises citoyennes de se lancer dans de tels projets, sous les garanties des institutions publiques, afin du cinéma, en tant qu’art socio-pédagogique universel, un réel leitmotiv de développement multiforme.

Saoudi El Amalki

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