Depuis quelques mois, le Maroc a décidé de réformer l’enseignement préscolaire en le généralisant. Ce volet de l’éducation longtemps négligé a été pris en compte dans la stratégie 2015-2030 de réforme de l’éducation. Si cette décision est appréciée, puisqu’elle vise à améliorer l’enseignement de la petite enfance, elle pose certaines questions, notamment comment procéder à une réforme efficace de l’enseignement préscolaire au Maroc, au-delà d’une simple généralisation?
De l’avis d’Elodie Pénillon, coordinatrice au Centre de Formation pédagogique international (CFPI), « l’école maternelle aide à construire les bases essentielles des apprentissages pour toute la suite de la scolarité».
Il s’agit de développer les apprentissages affectifs, psychomoteurs, sociaux, cognitifs chez l’enfant. Ce qui nécessite de la part des enseignants de proposer des activités qui ont du sens aux élèves et qui ont un lien avec leur vécu quotidien.
De ce fait, ils doivent, notamment bénéficier d’une bonne formation initiale et continue pour accompagner les enfants en bas âge, à travers des réflexions, des travaux de préparation, des planifications, pour la gestion du temps, de l’espace et du matériel… Toutefois, force est de constater que malgré la complexité du métier d’enseignant du préscolaire, ceux-ci sont souvent négligés. «En Belgique comme ici au Maroc, ce sont les enseignants les moins bien reconnus et valorisés. Ce sont les formations les plus courtes ou inexistantes… L’enjeu des choix du Maroc de développer un enseignement maternel de qualité est primordial et devra se concrétiser par la mise en place d’une formation initiale et continue de haut niveau», confie-t’elle.
Selon l’experte, l’école maternelle a quatre objectifs, notamment développer la prise de conscience par l’élève de ses propres potentialités, favoriser l’expression de soi, développer la socialisation, développer les apprentissages cognitifs, affectifs, psychomoteurs, sociaux et déceler les éventuelles difficultés et y remédier. Dans son travail, l’enseignant doit chercher à atteindre ces objectifs, en faisant recours entre autres à une pédagogie différenciée. Il s’agit, notamment de diversifier la méthodologie d’enseignement pour répondre à la diversité des profils des élèves. De l’avis de l’experte, «il faut déceler les éventuelles difficultés des enfants et pouvoir leur apporter une certaine remédiation».
En effet, l’enseignant est amené à observer l’élève en prenant en compte ses caractéristiques et ses spécificités mais aussi les théories de développement. Suite à son observation, celui-ci devra mettre en place la pédagogie différenciée, ce qui consiste à proposer différents cheminements et approches pour arriver à un objectif commun. Cette observation évaluation sera faite pour les apprentissages cognitifs, mais aussi affectifs, sociaux et psychomoteurs… Une pratique qui semble avoir fait ses preuves dans le système éducatif belge.
Ainsi, dans le système belge, nous confie Laetitia Wouters, directrice adjointe de l’école belge, les enfants ont accès à la classe d’accueil à l’âge de 2,5 ans accompli. Il est donc courant de voir des enfants arriver en cours d’année. «Ce sont les tout premiers pas de l’enfant à l’école. L’objectif poursuivi c’est la socialisation, l’apprentissage du vivre-ensemble. Dès le début de l’année, on fixe avec l’enseignant les objectifs de sa classe. Donc les enfants vont s’intégrer progressivement dans l’organisation mis en place dans la classe », souligne-t-elle. L’objectif étant de permettre aux enfants de progresser à leur rythme. «Les attendus, les seuils sont communs aux enfants, mais le chemin pour atteindre ces objectifs peuvent varier en fonction des enfants, des individus, de leurs profils», déclare pour sa part Vincent Locrel, directeur de section fondamentale de l’école belge.
«Quand on se rend compte de ces objectifs qui sont très ambitieux, on prend conscience de la complexité et de l’importance du métier d’enseignant qu’on peut effectivement comparer à un héro», conclut Elodie Pénillon.
Danielle Engolo