Tchétchénie: Le combat de Ramzan Kadyrov contre la pandémie…

Comme il n’y a aucun mode d’emploi pour gérer la pandémie du coronavirus qui s’est abattue sur la planète sans crier gare, chaque chef d’Etat ou de gouvernement lui oppose sa propre méthode et le style qui lui convient.

Ainsi, si certains la voient comme étant une simple «grippette» qui pourrait bien finir par s’en aller d’elle-même, d’autres y voient, au contraire, une sérieuse menace contre leur pays et leur peuple et prennent, à ce titre, des mesures strictes qui ne tolèrent aucun écart. C’est le cas, notamment, du président tchétchène Ramzan Kadyrov qui, pour venir à bout de la pandémie, a déployé une stratégie brutale usant, parfois, de violence physique et même de menaces contre les journalistes qui viendraient à le critiquer.

Ainsi, dès la fin du mois de mars et alors même que le Covid-19 n’avait, officiellement, infecté que trois personnes en Tchétchénie, les cafés et les restaurants avaient été fermés, un confinement obligatoire renforcé par un couvre-feu allant de 20 h à 8 h du matin appliqué sur l’ensemble du pays et l’accès au territoire tchétchène interdit à tous les non-résidents. Lorsque le Premier ministre russe Mikhaïl Michoustine avait tenu à rappeler à Ramzan Kadyrov que la décision d’interdire l’accès en Tchétchénie aux non-résidents ne relève pas de ses prérogatives, l’homme fort du pays s’est permis de lui répondre que «les frontières sont fermées et (qu’)elles le resteront»; une attitude qui avait tellement embarrassé le Kremlin que lorsque son porte-parole fut interrogé par les médias, il n’avait rien trouvé à leur répondre.

Réagissant à une vidéo où l’on voit des policiers tchétchènes rouant de coups un homme pour avoir violé le confinement, le président Tchétchène écrira, sur son compte Instagram, qu’il «préfère frapper une personne à coup de matraque plutôt qu’en enterrer 1000 (…) S’il le faut, je jette en prison dans une cave, mais je défendrai mon peuple».

Le message est donc bien clair… Ramzan Kazyrov, qui n’a pas pour habitude de faire preuve de laxisme mais plutôt de maintenir l’ordre, entend user de tous les moyens en sa possession pour endiguer l’épidémie même si, à ce jour, les statistiques officielles ne font état que de 175 contaminations sur l’ensemble du territoire; un chiffre qui, de l’avis d’un grand nombre d’observateurs de Tchétchénie et d’ailleurs, ne reflète nullement la réalité.

A la suite de la publication, le 12 Avril dernier, sur les colonnes du journal indépendant «Novaya Gazeta», d’un article critiquant la mise en quarantaine de plusieurs hôpitaux tchétchènes dont le personnel avait été infecté du fait de l’absence d’équipements de protection et mettant en doute le nombre officiel des contaminations à travers l’ensemble du pays au motif que la répression violente qui s’est abattu sur les personnes soupçonnées d’être infectées les a poussé à se cacher, donc à ne point être pris en compte dans les statistiques officielles, Ramzan Kadyrov est sorti de ses gonds.

Raison pour laquelle, dans une vidéo filmée depuis un téléphone portable, on le voit, emporté par une colère noire, demandant aux responsables du FSB – les services de renseignements russes – d’agir contre les provocations dont sont coupables «ces sous-hommes» [entendez par-là les journalistes]. «Vous voulez que nous devenions des criminels; c’est çà ?» s’écrira-t-il avant d’ajouter que «l’un d’entre eux endossera la responsabilité et ira en prison pour tout le monde!».

«Kadyrov est un soldat ; le combat c’est son élément. Il a besoin d’être toujours en lutte contre un ennemi» a écrit, sur les colonnes de «Libération», Ekaterina Sokirianskaïa, la directrice du think-tank «Conflict Analysis and Prevention Center» (CAPC).

Enfin, si le président tchétchène a promis de défendre son peuple par tous les moyens en sa possession et de ne point le laisser à la merci de la pandémie, c’est qu’il va encore plus serrer la vis ; alors attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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