L’occasion de faire le point sur la situation de l’handicap au Maroc

Journée nationale des personnes handicapées

Propos recueillis par Taimouri Zin El Abidine (MAP)

 Le 30 mars de chaque année, le Maroc célèbre la Journée nationale des personnes handicapées, l’occasion de faire le point sur la condition des personnes à besoins spécifiques.  « Bien que la situation des personnes en situation de handicap soit au cœur des préoccupations des décideurs et des acteurs institutionnels, cette frange de la société peine à se frayer une place adaptée à sa condition et à atteindre une inclusion socio-économique effective », déplore d’emblée l’enseignant et acteur associatif Idir Ouguindi, militant de longue date en faveur des droits des personnes en situation de handicap.

A cet égard, le professeur des sciences économiques et sociales à Casablanca a mis l’accent, dans une interview accordée à M24, la chaîne d’information en continu de la MAP, sur la nécessité pour les décideurs politiques d’inclure la question du handicap dans toutes les prises de décisions, tant sur le plan économique, social que politique, car au-delà de l’importance de la question, 7% des Marocains sont directement concernés par le handicap.

Citant une enquête nationale réalisée en 2014 par le ministère de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social, un ménage sur quatre est concerné par cette situation, ce qui signifie que 25% des Marocains sont directement ou indirectement concernés par la question du handicap, a poursuivi le co-fondateur du Collectif pour la promotion des droits des personnes en situation de handicap.

Sur le plan de la scolarité, M. Ouguindi regrette la faible proportion d’enfants en situation de handicap ayant accès à l‘école (40%), contre 98% pour la moyenne nationale, ajoutant que « ce chiffre aura un impact énorme sur tout le processus d’inclusion sociale et professionnelle des personnes en situation de handicap puisque le taux de chômage relatif à cette catégorie est 6 fois supérieur à la moyenne nationale ».

Face à ce constat, M. Ouguindi, qui milite également en faveur du développement inclusif, rappelle le devoir des décideurs à dynamiser le processus d’inclusion des personnes en situation de handicap tel que prévu dans l’article 34 de la Constitution qui appelle les pouvoirs publics à adopter des politiques inclusives destinées à cette tranche de la société et bannit toute forme de discrimination.

Certes, a-t-il poursuivi, le Maroc a consenti de nombreux efforts en la matière depuis ces vingt dernières années, lesquels se traduisent par la ratification en 2008 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, et la mise en place en 2016 d’un dispositif juridique (loi N°97-13) relatif à la protection et à la promotion des personnes en situation de handicap, mais ce dispositif peine à être mis en œuvre en l’absence d’un décret d’application.

S’agissant de l’emploi, ladite loi-cadre dispose que 7% des postes budgétaires de la fonction publique doivent être réservés aux personnes en situation de handicap, note M. Ouguindi, relevant que cette disposition tarde à produire ses effets du fait qu’en 2020, en dépit de plus de 20.000 postes budgétaires ouvert, seuls 200 ont été attribués aux personnes souffrant de handicap contre les 1.400 prévus.

Après avoir appelé à traiter la question du handicap dans le cadre d’une approche pragmatique autre que celle de la charité, l’enseignant dénonce les stéréotypes vis-à-vis des personnes en situation de handicap, qui devraient être considérées sur la base de leurs compétences, d’autant plus qu’une étude réalisée en 2011 a démontré que le Maroc enregistre un manque à gagner situé entre 1,8 et 2 % de son PIB en privant de l’emploi cette catégorie qui consomme autant que le reste de la société.

Dans le dessein de s’aligner sur les exigences internationales établies par l’Organisation des Nations-Unies à l’horizon 2022 et compte tenu de l’échéance législative qui approche, l’acteur associatif appelle les décideurs à œuvrer en faveur d’une participation politique effective des personnes en situation de handicap, expliquant qu’à travers la plateforme de plaidoyer, dont il est membre, le collectif a proposé aux partis politiques de présenter des personnes en situation de handicap sur leurs listes électorales et de leur faciliter l’accès à l’information.

En somme, M. Ouguindi, qui estime que la question du handicap nécessite une approche horizontale et convergente du fait qu’elle concerne tous les secteurs et départements ministériels, insiste sur l’importance de la pleine mise en œuvre et de l’effectivité des textes juridiques encadrant la situation du handicap au Maroc, afin que tout citoyen, quelle que soit sa déficience, jouisse pleinement de ses droits, notamment en matière d’éducation et d’emploi.

Dans ce sens, Idir Ouguindi a contribué, avec l’appui de la coopération belge et du Conseil provincial de Ouarazazate, sa ville natale, à la fondation en 1994, de l’association « Horizon des handicapés » qui œuvre pour l’autonomisation des personnes en situation de handicap et leur intégration sociale via l’accès aux services sociaux de base.

Ancien membre du Conseil d’administration de l’Amicale marocaine des handicapés (AMH), il co-fonde en 2020 une plateforme regroupant une trentaine de réseaux et collectifs à travers le Maroc, qui agit essentiellement en faveur de la promotion effective des personnes en situation de handicap.

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