Semaine délicate pour le président Ramaphosa menacé de destitution

Afrique du Sud

Le président sud-africain ne démissionnera pas: les caciques du parti historique au pouvoir, l’ANC, sont réunis lundi pour discuter du sort de Cyril Ramaphosa qui risque encore un vote au Parlement en vue d’une possible destitution.
Le chef de l’Etat est arrivé dans la matinée au centre de conférences d’une banlieue de Johannesburg où se tient la réunion du tout-puissant Comité exécutif national (NEC) à la tête du Congrès national africain (ANC). Il ne s’est pas exprimé mais il a déjà clairement écarté au cours du weekend la possibilité de jeter l’éponge.
« Nous allons nous assurer que la réunion du NEC se conclue dans l’unité », a déclaré à la presse le porte-parole du parti, Pule Mabe.

Cyril Ramaphosa est gêné depuis des mois par un scandale au parfum de corruption. Une plainte déposée en juin l’accuse d’avoir tenté de taire un cambriolage chez lui en février 2020, en ne le déclarant ni à la police, ni au fisc. Les malfaiteurs avaient alors emporté 580.000 dollars en liquide… camouflés sous les coussins d’un canapé.
Le chef de l’Etat clame son innocence mais ses explications n’ont pas convaincu une commission parlementaire qui a estimé la semaine dernière dans un rapport que le président « a pu commettre » des actes contraires à la loi et la Constitution.
Une enquête pénale est également en cours, le président n’a pas été inculpé à ce stade.
Le Parlement se réunit mardi en session extraordinaire à la veille des grandes vacances de l’été austral et doit voter pour décider de lancer, ou non, une procédure de destitution sur la base du rapport.
Il faut pour déclencher la procédure une majorité de 50%. Si elle était lancée, il faudrait alors une majorité des deux tiers pour parvenir à destituer le président. En sachant que l’ANC, malgré de fortes divisions, détient une majorité confortable au Parlement.
L’ANC présidée par M. Ramaphosa et au pouvoir depuis la chute de l’apartheid, se réunit le 16 décembre pour désigner son prochain président en 2024, si toutefois le parti, de plus en plus contesté, était vainqueur des législatives.
Majoritaire au Parlement depuis 1994, l’ANC, plombé par la corruption et une guerre de factions, choisit le chef de l’Etat depuis l’avènement de la démocratie sud-africaine.
« Ramaphosa est notre président »: en vert, jaune et noir, les couleurs de l’ANC, une poignée de partisans ont apporté leur soutien lundi à Johannesburg. Tout comme des opposants réclamant une démission.
« Cyril », comme l’appellent familièrement les Sud-Africains, l’a envisagé au lendemain de la publication du rapport accablant, selon des sources politiques.
Avant de se raviser: son porte-parole a annoncé samedi qu’outre la bataille politique pour se maintenir à son poste et même briguer un second mandat « dans l’intérêt » de la démocratie, M. Ramaphosa va aussi se bagarrer dans les tribunaux et contester la validité du rapport parlementaire « bancal ».
Plusieurs experts en droit ont critiqué ces derniers jours le rapport parlementaire qui s’appuie largement sur du « ouï-dire », multipliant les suppositions et les questions rhétoriques.
Mais le texte soulève aussi de vraies questions sur la version des faits avancée par le président. Selon lui, l’argent liquide volé chez lui provenait de la vente à un homme d’affaires soudanais de vingt buffles.
« La pratique normale est de mettre l’argent en banque le jour ouvrable suivant », remarque le rapport.
Aussi, pourquoi ces buffles achetés par un certain Mustafa Mohamed Ibrahim Hazim, se trouvent-ils toujours dans sa propriété baptisée Phala Phala (nord-est) près de trois ans après leur vente?
« Il existe de sérieux doutes quant à savoir si les devises étrangères volées proviennent bien de leur vente », conclut le rapport.

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