«Populisme et politiques post-vérité : le ressentiment contre la globalisation» a été le thème central d’un débat organisé, jeudi à Marrakech, dans le cadre des travaux de la 7ème édition de la Conférence internationale «Atlantic Dialogues», organisée du 13 au 15 décembre dans la cité ocre, par le think tank «Policy Center for the New South» (PCNS), sous le thème «Dynamiques atlantiques : surmonter les points de rupture».
Mise en cause par la montée du populisme, la mondialisation a été au centre de ce débat modéré par Mme Bronwyn Nielsen, rédactrice en chef et directrice de CNBC Africa (Afrique du Sud), et rehaussé par les interventions de deux prestigieux invités : Madeleine Albright, ancienne secrétaire d’Etat américaine et Pedro Pires, ancien Président du Cap Vert.
Pour Mme Albright, également présidente du «Albright Stonebridge Group», la mondialisation est «une arme à double tranchant» qu’on ne peut «ni identifier clairement ni arriver à cerner ses facettes», faisant remarquer que ce débat doit être élargi aux entreprises publiques et privées et aussi aux ONG.
«Ces acteurs, surtout les entreprises, sont les principaux drivers de la mondialisation, une force irréversible qui, malheureusement, divise les nations et risque parfois de dégénérer en des tensions», a-t-elle expliqué, devant un aréopage de personnalités de haut rang.
L’ancienne cheffe de la diplomatie américaine a également partagé son sentiment d’inquiétude par rapport à la politique étrangère du nouveau Locataire de la Maison Blanche, Donald Trump et du retrait des Etats-Unis des débats qui agitent le monde.
«Comment un pays tel que les Etats-Unis peut se replier et libérer cet espace à l’échelle internationale qui va être certainement comblé par d’autres nations ?», s’est-elle interrogée. Et de souligner que Washington est «amenée à jouer un rôle dans ce sens et ne doit pas se positionner en simple gendarme du monde».
Une analyse et un avis partagés par l’ancien Président du Cap Vert, Pedro Pires, qui a tenu à rappeler que si beaucoup de pays ont tiré profit de la mondialisation, l’Afrique en a été la grande perdante.
«La mondialisation est un phénomène irréversible qu’il faut gérer plutôt que d’éviter», a soutenu M. Pires, également fondateur de l’Institut Pedro Pires.
«On ne peut pas être contre la mondialisation. Qu’on le veuille ou non, nous sommes tous mondialisés, mais nous devons combattre les effets pervers de la mondialisation, c’est-à-dire les différences et les inégalités énormes entre les Etats, et au sein des Etats eux-mêmes», a-t-il martelé.
Placée sous le Haut Patronage de SM le Roi Mohammed VI, la Conférence «Atlantic Dialogues» connaît la participation de 350 conférenciers en provenance de 90 pays.
Parmi les invités de cette conférence, 25% sont issus du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, outre ceux en provenance de l’Afrique subsaharienne (22%), d’Europe (21%), d’Amérique du Nord (16%) et d’Amérique du Sud (11%). Ils sont issus des sphères de décision politique, du monde des affaires (15%), de la recherche (13%) et des think tanks (15%), du secteur public (13%), des organisations internationales (11%), de la société civile (10%) et des médias (9%).
Cette Conférence de trois jours offre l’occasion aux participants de jeter la lumière sur les grands enjeux géopolitiques et économiques du Bassin Atlantique, expliquent les organisateurs, faisant observer que le thème arrêté pour cette nouvelle édition «reflète des tendances aussi importantes que la montée des populismes, la dernière élection présidentielle au Brésil et la politique étrangère des Etats-Unis, dans la mesure où celle-ci remet en question l’avenir de l’Organisation du Traité Atlantique Nord (OTAN) et de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC)».
De grandes questions transversales restent, par ailleurs, posées telles que la démographie contrastée du Nord et du Sud, la dimension humaine de la crise migratoire, la mobilisation des ressources face au changement climatique, ou encore la perspective d’une nouvelle crise financière internationale.
Anciennement connu sous le nom de «OCP Policy Center», le Policy Center for the New South est un think tank marocain lancé en 2014 à Rabat, avec 39 chercheurs associés du Sud comme du Nord.
A travers une perspective du Sud sur les enjeux des pays en développement, il vise à faciliter les décisions stratégiques relevant de ses quatre principaux programmes : agriculture, environnement et sécurité alimentaire; économie et développement social; matières premières et finance; géopolitique et relations internationales.