A Casablanca les voyants sont au rouge

Flambée des nouveaux cas covid

Ouardirhi Abdelaziz

Ceux qui suivent au jour le jour la situation sanitaire de notre pays, qui est marquée ces dernières semaines par une véritable flambée des nouveaux cas de coronavirus, sont tous unanimes pour dire que la situation devient très inquiétante. Quel sens donner à cette nouvelle situation épidémique? Pourquoi le bilan s’alourdit-il ? Comment doit-on appréhender tous ces nouveaux chiffres? Faisons-nous face à une deuxième vague pire que la première? Autant de questions parmi tant d’autres qui suscitent notre attention.

Des difficultés redoutables

Depuis la notification du premier cas covid le 2 mars 2020, nombreux sont celles et ceux qui ont cru que la pandémie du SRAS COV 2 est une petite épidémie qui allait passer comme tant d’autres auparavant.

Le Maroc sous la conduite éclairée de sa majesté le Roi Mohamed VI, a eu une présence d’esprit formidable en anticipant et décrétant l’état d’urgence sanitaire. Avec le confinement général de la population et les  résultats enregistrés par le Maroc dans sa lutte contre le nouveau coronavirus, un sentiment de sécurité, d’invincibilité, s’est lentement installé au sein de la population.

Les rondes que les agents d’autorité effectuaient au niveau des quartiers ont cessé, les citoyens sont devenus irrespectueux des gestions barrières, pas de respect des consignes de confinement

L’Aid Al Adha  et les grands rassemblements au niveau de nombreux souk de bétail dans toutes les régions du pays ont été la cause de plusieurs contaminations. Au fur et a mesure, tout le monde a baissé la garde. Pas de respect des consignes de confinement, pas de port de masque, des bus bondés, idem pour les tramways, les taxis, aucune distanciation sociale.

Des erreurs impardonnables

Des erreurs impardonnables furent commises dans la gestion de l’épidémie, les résultats sont là, ils sont très parlant.

Le bilan de l’épidémie ne cesse de s’alourdir de jour en jour.

On est loin des chiffres du mois de mars 2020 où on avait dénombré 170 cas confirmés, pour 5 décès. Où les chiffres des mois d’avril, de mai ou juin. Où il y avait  quelques dizaines de cas, voire même plus des centaines.

Aujourd’hui, tout au long de ce mois d’octobre, ce sont des milliers de de nouveaux cas qui sont enregistrés quotidiennement. Ce qui est à craindre, ce qui pourrait être pire, c’est le fait que cette flambée de nouveaux  cas de coronavirus,  pourrait s’amplifier dans les prochains jours ou semaines à venir. Ce qui laisse présager loin de tout pessimisme une deuxième vague pire que la première, et ce malgré tous les efforts qui sont entrepris. Car nombreux sont nos concitoyens, particulièrement les jeunes, qui n’ont pas encore pris conscience des réels dangers de ce virus. Pour s’en rendre compte, il suffit de faire un tour au niveau des quartiers populaires, ou à Derb Ghalaf, Souk de Koréa, Bab Marrakech , Gare routière, pour constater de visu que les jeunes adoptent des attitudes de relâchement vis-à-vis du respect des gestes barrières. On relève une démission totale de ces derniers face au coronavirus. Pourtant, ils font  partie des populations les plus a risque de contamination par le virus. Il y a chez certains d’entre eux,  un je m’en fous flagrant, qui peut être très dangereux pour les personnes fragiles. Se sont de tels comportements qui ne permettent pas une gestion efficace de la lutte contre la covid-19.

Des erreurs impardonnables sont commises chaque jour, ce qui pèsent très lourd en termes de prise en charge des malades qui sont ainsi contaminés.

Chiffres records

Ces dernières semaines, le Maroc a connu une hausse des infections au nouveau coronavirus. La courbe est exponentielle , on note chaque jour des chiffres sans cesse en augmentation , un record de contaminations a été enregistré le jeudi 22 octobre 2020 avec 4.151 nouveaux malades, portant le nombre total de cas de Covid-19 enregistrés depuis le 2 mars dernier à 194.461 , et le nombre des décès dus à la pandémie à 3.255.

Une situation qui met à mal de nombreux hôpitaux publics comme ce fut le cas à Tanger, Marrakech ou Casablanca. Des structures sanitaires publiques qui se retrouvent avec une capacité d’accueil très limitée, que ce soit en matière de lits de réanimation ,  dans les unités de soins intensifs ou concernant aussi les respirateurs.

Au niveau de la capitale économique, les unités de soins intensifs et les différents services hospitaliers dédiés au covid sont très sollicités par des malades de plus en plus nombreux.

Casablanca : une véritable poudrière

La région Casablanca-Settat est au cœur d’une vague épidémique qui grossit chaque jour, et face à laquelle on n’arrive toujours pas à trouver des solutions.

Les chiffres sont très parlants et méritent d’être connus de tous afin que chacun sache l’ampleur du problème et puisse agir en citoyen avisé et responsable.

Si on regarde le bilan des cas enregistrés du lundi 19 octobre 2020 au samedi 24, on a la chair de poule, particulièrement en ce qui concerne la ville de Casablanca.

Lundi 19 octobre 2020, il y a eu 2.117 nouveaux cas et 48 décès.

La région Casablanca Settat enregistre 651 nouveaux cas.

Mardi 20 octobre à 18H, le bilan  du ministère de la santé fait état de 3.254 nouveaux cas de contamination.

La région Casablanca Settat a connu plus de 1.559 nouveaux cas.

Mercredi 21 octobre, le Maroc a enregistré 3.577 nouveaux cas confirmés au coronavirus. La région Casablanca Settat a connu près de 1.800 nouveaux cas. Jeudi 22 octobre à 18h, 4.151 nouveaux cas de contamination au coronavirus ont été enregistrés, un pic jamais égalé depuis le premier cas signalé le 2 mars 2020.

La région Casablanca Settat à elle seule compte plus de 2.000 nouveaux cas, il y a eu 53 décès vendredi 23 octobre à 18H.

3.685 nouvelles contaminations en 24h ont été enregistrées. La région Casablanca Settat a connu plus de 1.670 nouveaux cas. 73 nouveaux décès. Samedi 24 octobre à 18 H, le bilan fait état de 4045  nouvelles contaminations  par le coronavirus ces dernières 24 heures. La région de Casablanca-Settat enregistre 2128 nouveaux cas.

Ce sont des chiffres très alarmant qui montrent, si besoin en est, que le coronavirus se propage, plus vite que jamais, parmi la population. Le record des infections dans la région la plus peuplée du Royaume a été atteint, jeudi 22 octobre, avec  4151 cas en 24 heures.

Il ne faudrait pas s’étonner qu’on en soit arrivé à ce stade inédit de propagation du virus. Le relâchement se constate partout: dans les rues, dans les transports en commun, sur les marchés, dans les cafés…

En dépit de l’obligation du port du masque de protection, instaurée par les autorités, force est de constater que de nombreuses personnes se promènent dans les rues sans le masque, des jeunes ici et là sont rassemblés en groupes. C’est aussi le cas au niveau de certains cafés où on constate l’inexistence de distanciation sociale. Cette promiscuité amplifie considérablement le risque de transmission du virus.

De tels agissements, de tels comportements irresponsables de la part de certains citoyens insouciants face à la situation actuelle contribuent à rendre le virus plus virulent, plus nuisible et donc difficile à combattre et à  maitriser.

Agir avec sérieux et pragmatisme

On pourra dire tout ce que l’on voudra au sujet de la lutte contre le nouveau  coronavirus covid-19, mais personne ne pourra m’enlever de l’esprit que face à cette épidémie,  qui cause chaque jour des dizaines de décès et des milliers de malades parmi nos citoyens, les grands discours ne suffisent pas à juguler l’avancée inexorable du virus.

Certaines personnes à l’ego surdimensionné en font une spécialité dans l’art d’apparaitre, frisant le ridicule juste pour se mettre en avant et montrer leur supériorité. Elles rasassent le même discours au sujet du coronavirus et finissent par devenir lassant à la longue. La lutte contre le coronavirus est menée sur le terrain au jour le jour. C’est un combat harassant, pénible, qu’entreprennent des femmes et des hommes, des médecins et des infirmiers, qui sont chaque jour en première ligne.  Ils agissent et entreprennent des actions avec conviction et humilité pour sauver des vies, et tout cela, loin des caméras.

Aujourd’hui, l’heure n’est plus aux palabres, aux discours, mais plutôt aux actions concrètes, logiques et urgentes en matière de riposte contre cette flambée de covid-19 à Casablanca.

Le secteur privé qui a été jusque-là écarté,  doit être un partenaire à part entière. Dans ce sens, le ministre de la santé avait lui-même précisé que si cette situation persiste, «nous risquons d’être submergés». C’est ce qui se passe maintenant, d’où l’importance de l’implication des professionnels du secteur privé dans la lutte contre la pandémie.

On doit optimiser des capacités disponibles sur Casablanca, en l’occurrence la forte répartition des cabinets médicaux privés (5200) et des pharmacies. Il faut que les autorités donnent la main aux médecins privés afin de prescrire la chloroquine et la rendre disponible au niveau des pharmacies. Pour une meilleure gestion des médicaments dont la chloroquine, le malade doit présenter une ordonnance et le pharmacien notifier toute vente sur le carnet à souche à l’instar des prescriptions de psychotropes.

Cette autorisation de mise en vente de la chloroquine permettra d’éviter les retards de prise en charge, les complications, l’hospitalisation et la mortalité qui s’en suit, vu l’insuffisance en lits de réanimation, de réanimateurs et d’infirmiers.

En outre, pour mettre de l’ordre dans la délivrance des autres produits utilisés par les patients atteints de la covid-19 , il faut que le conseil de l’ordre des pharmaciens ordonne le fait d’interdire la vente de plus d’un paquet de médicaments par personne : vitamine C, zinc, vit D, doliprane…, et ce afin de limiter les abus d’achat sans les justifications, les ruptures de stock et mouvements de panique.

Il y a un manque de communication flagrant par rapport à ces données qui doivent être partagées avec le citoyen. Aussi, n’est il pas grave qu’on ne permette pas aux casablancais démunis de bénéficier de prélèvements de PCR  les samedi après-midi et dimanche en plein épidémie? Ne peut-on instaurer un système de garde avec des bénévoles pour soulager le personnel?

On pousse les pauvres gens vers le retard diagnostic (3jours  en moyenne) ou alors vers les laboratoires  privés, sachant qu’ils n’ont pas les moyens. Même durant la semaine, il y a le plafond de 100 prélèvements par  jour à ne pas dépasser et pourquoi 100 et non plus?

En conclusion, on peut légitimement se poser des questions pour savoir où se situe le problème.

Notre véritable problème concernant la gestion de cette épidémie, c’est l’éparpillement des efforts, c’est la centralisation des décisions, c’est le manque de confiance dans le secteur privé, qui a pourtant un très grand rôle à jouer dans la pose du diagnostic précoce, le démarrage du traitement, la prise en charge et le suivi des malades.

Et puis, il y a des décisions qui donnent mal à la tête, des céphalées intenses, car il y a une incohérence flagrante qui consiste à permettre à certains cafés, bars, restaurants d’ouvrir jusqu’à 20 H, et puis subitement de fermer le tout à 20 H. Ce qui revient a dire que le virus est nocturne, il circule la nuit et il dort pendant la journée.

Par ailleurs, c’est très bien d’encourager le tourisme, de permettre aux nombreux étrangers des différents pays d’Europe et d’ailleurs de venir au Maroc, ce qui permet une légère reprise au niveau des unités hôtelières. Mais on ne comprend pas pourquoi en même temps on interdit aux citoyens de voyager de villes en villes…

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