Mohammed Chraibi

L’Émission Judaica du 9/12/18 sur Fr2 marque le lancement de la 25éme édition annuelle de la Sedaka: appel aux dons en faveur des nécessiteux de la communauté juive de France (12% de la population juive de France, taux identique à celui de la population générale selon les intervenants de l’émission)  Les bénéficiaires sont principalement des écoles juives Ort. Le parrain de l’édition de cette année est le comédien Gad el Maleh (compatriote dont je salue ici «activisme philanthropique») qui donnera un show au profit de la cause et mettra sa notoriété à son service  toute l’année. Cette initiative louable m’inspire deux commentaires et une question.

Commentaires

1/ Affirmer que le taux de pauvreté parmi la population juive de France est le même que le taux moyen français (toutes confessions confondues) peut prêter à discussion car le « juif moyen français » est très probablement moins pauvre que le français moyen non juif notamment le français d’origine musulmane et maghrébine sans cela relève du cliché antisémite. Mais simplement de la constatation que le niveau de vie en France comme ailleurs est fortement corrélé aux nombre d’années d’études. Or une étude récente (1) a montré que les juifs étaient, à travers le monde, de loin les mieux classés selon ce critère (14,3 années d’etudes, bac + 2,3) et les musulmans les derniers avec moins que le niveau de l’ancien certificat d’etudes primaires. En affirmant que le taux de pauvreté parmi les juifs de France est identique à celui de la population en général, les juifs de France cherchent peut être à souligner leur intégration totale dans la société française et ils ont raison même si pour ce faire ils recourent à une affirmation sociologiquement réfutable. Les juifs gardent en mémoire que l’origine des persécutions dont ils ont fait l’objet dans toutes les sociétés a été leur refus d’assimilation.

2/ Aider les écoles à dispenser un meilleur enseignement à leurs élèves plutôt que de distribuer l’aide aux familles nécessiteuses résonne avec le proverbe chinois (il vaut mieux apprendre aux nécessiteux à pêcher que leur distribuer du poisson)  et l’enseignement de M.L. King (venir en aide aux pauvres est bien mais lutter contre les causes de la pauvreté est encore mieux (2). C’est également la confirmation de l’importance de l’education pour les juifs révélée par l’étude signalée ci dessus. Ce qui incite  à émettre l’hypothèse suivante: la fameuse domination des juifs sur les sociétés occidentales dont il est souvent question ne serait elle pas due à leurs performances intellectuelles (réelles) plutôt qu’ à une obscure conspiration dont personne n’a jamais apporté la moindre preuve?

Question

Il existe en France une forte population de musulmans dont certains disent qu’ils sont les nouveaux juifs de la France (référence aux mauvais traitements dont les juifs ont été victimes par le passé). Ces deux communautés ont beaucoup en commun et notamment la Sadaka, appelée Zakat par les musulmans dont elle constitue un des cinq piliers de leur foi. Ce qui n’a rien d’étonnant quand on sait que Le judaïsme a inspiré l’Islam qui se présente comme la continuation et le renouvellement de la révélation faite à Moise.

La question est la suivante: les musulmans de France ne pourraient ils pas, à l’instar de leur prophète, trouver l’inspiration auprès des juifs de France pour dépasser la crise dans laquelle ils se débattent, notamment dans les problématiques  sus évoquées (intégration, importance de l’éducation dans la promotion de leur communauté et solidarité intracommunautaire)? Et pour commencer ne pourraient-ils pas entreprendre une Zakat 1.0 au profit de leurs jeunes désemparés, proies faciles des prêcheurs de haine?

(1) Jews are world’s best-educated religious group, study reveals (theghardian 13/12/2006)

(2) philanthropy is commendable but it shouldn’t make the philanthropist overlook the economic circumstances which make philanthropy necessary ».