Combat de coq entre Saham et Sunu

La compagnie d’assurance Saham de Moulay Hafid Elalamy s’est retrouvée ces dernières semaines dans un bras de fer coriace face au géant de l’assurance africaine Sunu, dirigé par le franco-sénégalais Pathé Dione, actionnaire à 50% dans le capital de cette dernière.

C’est par articles et communiqués de presse intérposés que les tops management ont réglé leur compte. Accusé d’être entré par effraction dans le capital de Sunu, Saham et son emblématique fondateur Moulay Hafid Elalamy ont fait l’objet d’attaque on ne peut plus virulentes.

L’histoire commence quand Alioune Ndour Diouf, l’un des coactionnaires-fondateurs de Sunu et compagnon de route de Dione, cède ses 14% dans le capital de Sunu Finances à Saham Finances. Cette part vient s’ajouter aux 6,9% rachetés début 2017 auprès de Ousmane Bocoum et Mamadou Talata Doula, deux autres actionnaires minoritaires de Sunu.

Saham se retrouve minoritaire à hauteur de 21% de son concurrent en Afrique de l’Ouest, mais aussi deuxième actionnaire dans « un groupe à l’actionnariat éclaté », selon un analyste financier.

Pris de court, Dione proteste contre la manœuvre de Moulay Hafid Elalamy, mais ne nie pas la légalité des transactions passées avec son équipe.  “L’opération réalisée par Saham à travers la société-écran First Engineering Management Consultant (FEMC) est tout à fait légale”, reconnaît Pathé Dione dans les colonnes de l’hebdomadiare Tel Quel. “Par contre, ce que les actionnaires majoritaires de Sunu Finances dénoncent depuis le début, c’est la manière avec laquelle ont procédé M. Moulay Hafid Elalamy et ses collaborateurs. Nous considérons qu’ils sont entrés par effraction, et de ce fait ils ne sont pas les bienvenus, et ne le seront jamais”, poursuit-il.

Du côté de Saham, Raymond Farhat, ancien patron de Saham Finances devenu, depuis 2017, conseiller du président en charge de la stratégie et du développement, déclare que“c’est une simple transaction entre un acheteur et un vendeur”. “Nous avons été approchés par des actionnaires de Sunu qui ont investi depuis vingt ans et qui nous ont proposé à la vente leurs actions. Ils nous ont intéressés parce que le prix nous semblait correct. Les transactions ont été effectuées en conformité totale avec les lois et les statuts de Sunu”, poursuit Farhat.

Suite à cela, Dione décide d’empêcher Moulay Hafid Elalamy d’avoir un siège dans le conseil d’administration et stopper le raid financier du groupe marocco-sud-africain. Il supprime ainsi la disposition statutaire qui donnait à tout actionnaire détenant plus de 20% un siège d’administrateur et fait signer à ses coactionnaires un pacte imposant à quiconque souhaitant céder ses actions dans le groupe à soumettre la transaction à l’approbation du conseil d’administration.

Les dividendes versés par Sunu Finances les trois dernières années ne dépassent pas les 1,1 million d’euros en 2015 et 1 million en 2016 ( 213 430 euros au titre des dividendes de l’exercice 2016 pour les trois actionnaires qui ont cédé leurs parts à Saham réunis). Saham se retrouve alors coincé dans le capital de Sunu Finances. “M. Dione nous interdit de monter dans le capital. Qu’à cela ne tienne, nous resterons à 21%. Nous sommes contents de notre investissement, nous attendons les dividendes. Pour nous, cela s’arrête à ce niveau », confie Farhat. Malgré cela les deux groupes concurrents dans 14 pays, sont complémentaires. Saham étant leader sur le segment Non-Vie et Sunu le maître incontesté du segment Vie en Afrique de l’Ouest et Centrale.

Pour exprimer son mécontentement, Dione ajoute : «J’ai déjà écrit et déclaré que j’adhérais à la vision de Sa Majesté le Roi Mohammed VI du Maroc qui consiste à nouer des relations avec l’Afrique au sud du Sahara. Mais une fois cela dit, cela ne signifie pas que les acteurs marocains doivent venir faire ce qu’ils veulent. Il paraît que Moulay Hafid Elalamy est puissant dans son pays. Il s’autorise tout. Moi, je ne peux pas accepter son arrogance…».

La seule échappatoire de Saham aujourd’hui est que Pathé Dione accepte d’ouvrir les négociations. Ce qui ne semble pas être son intention. Affaire à suivre…

S. Douieb

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