Une journée d’étude sur le projet de loi de finances 2017, organisée mardi, par les deux groupements parlementaires du Parti du progrès et du socialisme, sous la coordination de la présidente du Groupement parlementaire du progrès et du socialisme à la Chambre des Représentants Aïcha Lablak, a offert l’occasion de revenir en détail sur les particularités du PLF 2017 mais également sur les insuffisances du modèle de développement du pays qui a commencé à s’essouffler.
Benabdellah : le PLF 2017, un projet transitoire
Dans son intervention, le secrétaire général du PPS, Mohamed Nabil Benabdallah, également ministre de l’Habitat, de l’urbanisme et de la Politique de la ville a indiqué que le PLF 2017 doit être considéré comme un projet transitoire qu’il convient d’enrichir et d’adopter après une période de gel de six mois dont les conséquences sont ressenties à différents niveaux et secteurs socioéconomiques. Il est donc très difficile de s’attarder sur la révision détaillée d’un tel projet car une telle action risquerait d’aggraver encore plus la situation, a-t-il expliqué. Ce qui ne signifie en aucun cas qu’il est hors de question de l’amender en coordination avec les autres groupes et groupements des partis politiques, a-t-il ajouté, insistant sur l’ouverture du parti sur toutes les forces du pays dans l’opposition comme dans la majorité.
Au niveau de la majorité gouvernementale, l’on est convenu de travailler pour la réussite de la nouvelle expérience gouvernementale mais également pour faire en sorte que l’élaboration des projets de loi de finances pour les années à venir (2018, 2019, 2020) devienne un exercice politique pour les forces et partis politiques du pays. Il a toutefois estimé que l’on ne peut procéder à la mise en place d’un nouveau modèle de développement économique et social et poursuivre le renforcement du projet démocratique du pays sans forces et partis politiques indépendants porteurs de tels projets.
Il a en outre fait savoir que le modèle de développement économique du pays, en vigueur depuis plus de 15 ans, est actuellement dans l’impasse et qu’il n’est plus raisonnable de continuer de le défendre. Au départ, ce modèle avait permis de réaliser des taux de croissance de 5 pc, qui ont drastiquement diminué durant les dernières années.
Avant de s’essouffler, il avait également permis de développer les infrastructures et de créer des richesses, a-t-il dit, soulignant que le pays est confronté pour le moment à de nombreuses insuffisances (aggravation du taux de chômage outre les problèmes que connaissent d’autres secteurs vitaux comme la santé, l’enseignement etc.
Il est nécessaire de trouver le moyen de développer davantage le pays et créer des richesses en quantité suffisante, a-t-il dit, insistant sur la nécessité d’améliorer les systèmes de gouvernance et de répartition de ces richesses. Il est vrai que le pays a besoin de plus d’industrialisation et de développement de son agriculture, mais l’on a besoin également d’un réseau plus fort et plus diversifié de PME et d’entreprises opérant dans le domaine de l’économie sociale et solidaire, de l’artisanat et d’autres créneaux créateurs de richesses et d’emplois, a ajouté Benabdallah, qui a réaffirmé la disposition du PPS à œuvrer dans ce sens en partenariat avec les forces du pays dans la majorité et l’opposition pour un Maroc des Institutions plus prospère et plus développé.
Me Abdellatif Ouammou: le modèle néolibéral s’est essoufflé
Intervenant au nom des deux groupements du PPS, Me Ouammou, membre du BP et coordonnateur du Groupement de l’action progressiste à la Chambre des Conseillers, a insisté pour sa part sur le caractère transitoire du PLF 2017, rappelant que quelques dispositions ont été toutefois prises pour l’actualiser et tenir compte de la nouvelle conjoncture favorable, consécutive aux résultats encourageants de la nouvelle campagne agricole.
Selon lui, la question qui se pose désormais ne porte pas uniquement sur les projets de loi de finances, dont l’importance n’échappe à personne, mais beaucoup plus sur le modèle de développement du pays, qui n’est plus en mesure de répondre aux besoins de la société en termes de croissance, de répartition sociale et spatiale des richesses, de gouvernance, etc…. Il est vrai que le gouvernement a pris l’engagement de trouver des solutions aux problématiques qui se posent, mais il est vrai aussi qu’il lui est difficile de concilier entre les objectifs, a-t-il dit, soulignant que le PPS a fait le choix de l’ouverture et du dialogue pour innover dans ce domaine et chercher le moyen de doter le pays d’un modèle de développement plus performant et plus efficace, seule voie à suivre pour faire face à la mondialisation galopante et à la globalisation.
Le modèle néolibéral a montré ses limites et il est temps de le réformer dans le sens de l’humaniser, a-t-il proposé, rappelant que la menace qui pèse désormais sur l’environnement a ouvert à tout le moyen les yeux sur la nécessité de rechercher des solutions aux problèmes posés à travers le développement des énergies renouvelables, de développer l’économie sociale et solidaire, les PME, l’artisanat et de promouvoir davantage la compétitivité des entreprises.
Seddiki : un modèle de développement à réformer
De son coté, Abdeslam Seddiki, membre du BP du PPS et ancien ministre de l’emploi a évoqué le contexte national et international qui n’est guère reluisant, rappelant que certains pays partenaires du Maroc en particulier dans le Golfe sont touchés par la chute des prix du pétrole à l’instar d’ailleurs d’autres pays exportateurs d’hydrocarbures comme l’Algérie voisine, qui vient de sortir d’une véritable mascarade électorale.
Après une année difficile, au terme de laquelle le taux de croissance s’est situé autour de 1,2 pc, le Maroc a vécu au rythme de six mois d’attentisme sans loi de finances adoptée.
Parlant du modèle de développement du pays, il a souligné la nécessité de faire la distinction entre stabilité et inertie de peur d’être en déphasage avec les besoins des changements sociaux.
Il a soulevé dans ce sens nombre de questions sur la pertinence du modèle de développement en place, soulignant qu’il a permis au pays de rétablir les équilibres macroéconomiques à l’exception toutefois du problème de la dette.
Il a permis aussi de réaliser un taux de croissance de 5 pc, le premier dans la zone MENA et le second en Afrique. Depuis 1999, le Maroc n’a jamais enregistré un taux de croissance négatif.
Il a aidé aussi le Maroc à passer d’une économie naturelle à une économie de transformation et à disposer d’une importante réserve en devises de 7 mois de couverture des importations au lieu de 7 jours dans le passé.
Le modèle de développement du Maroc lui avait également permis de se doter de programmes sectoriels (Agriculture, industrie, économie numérique, pêches, tourisme etc… en lieu et place de la planification réclamée par le PPS.
Une nouvelle classe bourgeoise composée de jeunes sortis de grandes écoles a vu le jour constitue un atout pour le pays, a ajouté Seddiki, ajoutant que le Maroc dispose malgré tout d’une main d’oeuvre qualifiée, très appréciée par de nombreuses sociétés comme RENAULT.
Il a également indiqué que le Maroc dispose d’un autre atout que constitue l’Etat des institutions, notant toutefois que les accords de libre-échange conclus par le pays n’ont pas été bénéfique pour son économie, en raison de la faiblesse de ses capacités exportatrices.
Il a attiré aussi l’attention sur l’aggravation des inégalités sociales et la détérioration des couches pauvres, en dépit des efforts déployés dans le cadre de l’INDH (initiative nationale pour le développement humain), ajoutant que la régionalisation en cours n’a pas donné lieu aux résultats escomptés.
Pour sa part, Salah Grine, membre du CC du PPS et expert comptable a exposé en expert les nouveautés du PLF 2017 concernant la location des locaux meublés, la limitation du délai de déduction de la TVA, l’exonération de l’IS durant les cinq premières années des sociétés industrielles nouvellement crées, l’exonération de la TVA des nouveaux investissements des entreprises existantes, l’instauration de la possibilité de proroger de 24 mois du délai d’exonération et bien d’autres mesures fiscales surtout.
Un riche débat a sanctionné les travaux de cette rencontre, qui s’est déroulée en présence de parlementaires du parti et d’autres formations politiques ainsi de représentants de la société civile. Plusieurs recommandations ont été exposées au terme de ce débat par le rapporteur de cette rencontre Ahmed El Ghazoui.
M’barek Tafsi