Impressions à chaud sur le scrutin législatif du 8 septembre 2021
Mohamed Khalil
Les Législatives du 8 septembre 2021 ont accouché d’une « nouvelle » carte politique et électorale. Le Parti de la justice et du développement, après deux mandats successifs, a été littéralement sanctionné, aussi bien officiellement que par les électeurs, perdant 112 sièges sur les 125 dont il disposait lors de la précédente législature, et, surtout, son groupe parlementaire… Un véritable séisme politique et une catastrophe électorale.
Et si, le Rassemblement national des Indépendants – RNI- est le grand gagnant du round législatif, avec 102 sièges, ce sont le PAM, avec 15 élus en moins qu’en 2016, et le Parti de l’Istiqlal qui arrivent deuxième et troisième avec, successivement, 87 et 81 sièges.
Le Parti du progrès et du socialisme, lui, enregistre un net progrès par rapport aux « résultats » de la « sanction » décidée contre lui, en 2016. Ainsi, en 2021, le Parti assure un groupe parlementaire, avec déjà 22 députés en attendant les listes régionales, et monte dans le classement des grands partis, en passant du rang 8 au 6ème, dépassant ainsi l’Union Constitutionnelle et le PJD…
Pour les autres partis, il faudra souligner le maintien du Mouvement Populaire MP et un progrès assez sensible de l’Union Socialiste des Forces Populaires – USFP.
Le taux de participation de 50,18% permet de garder l’espoir d’un réel retour des citoyennes et citoyens aux urnes, après plusieurs scrutins désertés. Apparemment c’est le fruit du travail accompli par quelques partis sérieux et associations de la société civile. Il faudra dire que le déblocage politique reste, à ce niveau, timide surtout à cause du manque d’actions officielles.
Ce taux a été également atténué par la nature de la campagne électorale qui a été marquée par des irrégularités, à quantifier lors des recours en justice contre les mal-élus qui continuent d’user fortement de la force de l’argent et des achats des consciences.
Des irrégularités criantes…
L’appréciation de ce phénomène sera complète et définitive, après l’accumulation des informations, notamment par les partis lésés par l’argent qui a coulé à flots dans de nombreuses régions, voire par l’intervention d’agents d’autorité en faveur de certains partis ou candidats spécifiques, parmi ceux arrivés en tête du scrutin législatif ou d’autres formations.
Dans ce chapitre, il faudra signaler différentes réactions officielles de formations politiques, durant la campagne électorale, comme le jour du scrutin, stigmatisant les agissements contraires à la loi – achats des voix et favoritisme de certains candidats d’un parti politique et de certains autres connus pour leur longévité électorale – les dinosaures des élections- ainsi que les « notables » qui avaient bien fait parler d’eux et de leurs méthodes répulsives…
En tout cas, les résultats du scrutin sont là, et face aux assurances des pouvoirs publics sur le bon déroulement du scrutin, dans l’écrasante majorité des circonscriptions électorales, il faudra signaler quelques sons de cloche qui affirment que les dés étaient pipés, dès le départ, et que le jeu électoral était biaisé…en laissant faire les mêmes pour recommencer et continuer avec eux…
Des alliances ouvertes…
Ainsi, le RNI, arrivé en tête des élections législatives, sera amené, selon la Constitution, à former le prochain gouvernement.
En attendant la communication par le ministère de l’Intérieur des résultats définitifs, le RNI, avec 102 députés, aura besoin de 96 voix pour disposer de la majorité parlementaire des 198 élus.
En principe, il devra les chercher chez ses anciens alliés au sein du gouvernement El Otmani : USFP, MP, UC, qui ne totalisent que 79 voix. Soit avec les députés du RNI cela fera 181 voix sur les 198 nécessaires pour former le gouvernement. Donc, il faudra que le RNI aille aller chercher d’autres alliances avec certaines formations politiques de l’opposition sortante. Et là il n’aura d’autres choix que de courtiser les 3 partis – PAM, PI et PPS- qui, eux, totalisent 180 députés déjà connus.
Le RNI pourra également choisir l’alliance – difficilement négociable – car le PAM et le PI n’accepteront pas de jouer les seconds rôles dans le gouvernement- avec les deux autres partis arrivés en tête, avec au total une très large et confortable majorité de 270 élus … cette éventualité a l’avantage, numériquement, d’une bonne cohésion gouvernementale, sachant que, politiquement, les trois formations n’ont qu’un seul dénominateur commun, celui de la cause nationale.
Mais il y a une autre configuration qui serait intéressante. Elle interviendrait en cas d’échec du RNI à former un Exécutif et du recours au PAM pour le former… comme d’aucuns l’avaient préconisé lors des tractations sur la formation du gouvernement El Otmani. Ce qui est vraiment peu probable voire improbable. C’est celle de voir les trois partis de l’opposition sortante renforcée par l’apport de l’USFP et qui leur conférerait déjà 224 voix à la future Chambre des représentants et une majorité confortable… Une belle tentation qui fera de l’ex Koutla Démocratique une alliée du PAM !
Cette « éventualité » permettrait au RNI d’organiser l’opposition au sein du Parlement. Comme d’ailleurs l’éventualité de garder ou le PAM ou l’Istiqlal dans l’opposition… comme celle de voir le Parti de l’Istiqlal rester en marge du futur Exécutif.
En conclusion, il faudra attendre les résultats définitifs, qui, en principe, devraient être connus hier en début de soirée, et les déclarations – et tractations qui devront déjà commencer- pour mieux appréhender les alliances.