Les droits des femmes, un sujet politique incontournable…

«Penser équitablement, bâtir intelligemment, innover pour le changement » est le thème retenue par l’ONU-Femmes pour la célébration, ce 8 Mars 2019, de la «Journée internationale de lutte pour les droits des femmes» montrant, par-là, le souci de l’organisation internationale de placer l’innovation par les femmes et pour les femmes au cœur des efforts menant à cette égalité entre les sexes qui ne pourrait être obtenue que si les innovations sociales mises en place profitent aux deux.

Mais si, pour cette année 2019, le thème général que l’Organisation des Nations-Unies a choisi pour cette journée se présente ainsi, il va de soi, bien entendu, que, dans chaque pays, les femmes vont célébrer cet évènement conformément à leurs propres besoins et à leurs propres aspirations.

Au Maroc, à la veille de ce 8 Mars 2019, l’Association Démocratique des Femmes du Maroc (ADFM) a lancé une vaste campagne de sensibilisation pour une refonte globale du Code de la Famille car celui-ci comporte encore des vides juridiques qui ne font qu’accentuer les injustices et les discriminations subies  par les femmes notamment au niveau du partage entre les époux des biens acquis durant leur union, de la pension alimentaire en cas de divorce, de la tutelle des enfants ou encore du mariage des mineures.

Chez notre voisin de l’est, la situation des femmes qui n’est pas plus «réjouissante», s’inscrit cette année dans ce vaste mouvement de révolte contre le 5ème mandat de Bouteflika. Aussi, entendent-elles profiter de cette «Journée internationale de lutte pour les droits des femmes» pour se mobiliser contre un gouvernement contesté par l’ensemble de la population et faire valoir leurs revendications. C’est, dans ce cadre d’ailleurs, que le « Collectif des Femmes libres et indépendantes de Bejaïa » a déclaré, dans un communiqué, que «l’heure est venue, pour nous les femmes opprimées, de nous organiser et de rejoindre les rangs de la mobilisation populaire pour répandre notre cri de colère face à l’infamie que nous vivons et qui ne cesse de croître. Restons sur les traces des braves  femmes qui ont marqué le mouvement féministe, pour faire de cette journée du 8 Mars, une journée de lutte et non pas une journée folklorique comme à l’accoutumée».

Au Brésil, cette « Journée internationale de lutte pour les droits des femmes » tombe en plein Carnaval de Rio alors que, cette année, celui-ci a un goût particulier d’abord parce qu’il a lieu un an après l’assassinat de Marielle Franco, cette conseillère municipale noire de Rio qui était une fervente protectrice des minorités et parce que parmi les revendications des «carnavaliers» figure la défense des droits des femmes au même titre que ceux des noirs, des indiens, des minorités sexuelles ou encore la préservation de l’environnement alors que le nouveau président est un ancien capitaine de l’armée résolument «anti-establishment», ardent défenseur de l’autoritarisme militaire, raciste, misogyne et homophobe.

Ce 8 mars 2019 sera donc marqué, au Brésil, par une ferme opposition à cette politique ultra-libérale du président Bolsonaro qui affecte particulièrement les femmes et au projet de ce dernier d’effacer des manuels scolaires les références aux  violences sexistes et à l’homosexualité.

Si en Espagne, la mobilisation du 8 Mars 2018 avait réuni près de 5 millions de femmes, celle de ce vendredi va se trouver confrontée au retour en force de l’extrême-droite sur la scène politique alors même qu’en prévision des prochaines élections législatives, la perspective de la constitution d’un bloc droite/extrême-droite risque d’amplifier les attaques contre les droits des femmes car le parti d’extrême-droite «Vox» dénonce l’un des rares consensus en matière sociétale ; à savoir, la discrimination positive en faveur des femmes dans les entreprises et les administrations. D’ailleurs, son leader, Santiago Abascal ne s’était pas empêché de déclarer qu’il y a un très grand nombre d’hommes qui sont battus par leurs épouses et que plusieurs plaintes déposées par les femmes pour mauvais traitement de la part de leurs époux, sont fausses et sans fondement. Lui emboitant le pas,  son compère, Francisco Serrano, le leader de «Vox» en Andalousie, avait déclaré, pour sa part, vouloir «en finir avec cette obsession du genre car dans une famille, tous peuvent être victimes d’agressions et de violence, enfants, vieillards et hommes aussi».

Au Mexique la célébration de cette «Journée Internationale de lutte pour les droits des femmes» pour l’année 2019, survient quelques semaines après que se soient mises en grève plus de 70.000 travailleuses mexicaines appelées «maquiladoras» employées au sein de 120 usines situées à la frontière avec les Etats-Unis. Cette journée du 8 Mars sera également marquée par la dénonciation des assassinats dont sont victimes les femmes dès lors que le phénomène du «féminicide» a pris des proportions gigantesques notamment dans le Nord du pays.

En Argentine, cette journée du 8 Mars 2019, permettra aux femmes de bien connaître l’état de leur mouvement après que, l’année dernière, un texte légalisant l’avortement adopté par les députés avait fini par être rejeté par les sénateurs et leur donnera, également, l’occasion de déposer un nouveau projet de loi libéralisant l’interruption volontaire de grossesse. La question de l’avortement divisant les argentins, les foulards verts sont devenus le symbole des pro-avortement alors que les anti-avortement, fortement influencés par l’Eglise catholique, ont adopté des foulards bleu-ciel.

Enfin, si 70% des 3,5 milliards de personnes qui, de par le monde, vivent avec moins de 2 euros par jour sont des femmes – donc que la précarité a le visage d’une femme – et que, pour défendre leurs droits face aux politiques ultra-libérales dont elles sont les premières victimes, celles-ci se placent, désormais, à l’avant-garde des luttes progressistes, ce vendredi 8 Mars  2019 va donc leur permettre de rappeler aux décideurs du monde entier que la question des droits des femmes est, désormais, un sujet politique incontournable. Réussiront-elles ? Souhaitons-le et attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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