Objets connectés
Le Parlement européen et les Etats membres de l’UE ont trouvé un accord sur une législation pour encadrer l’usage des milliards de données générées par les objets connectés et mieux exploiter leur potentiel économique.
Voitures, téléphones, assistants personnels… Les objets du quotidien génèrent un volume des données qui explose. Au niveau mondial, il devrait passer de 33 zettaoctets (milliers de milliards de milliards d’octets) en 2018 à 175 zettaoctets en 2025, selon la Commission européenne.
Les applications possibles sont nombreuses. Le propriétaire d’une voiture peut par exemple vouloir partager les données de ses trajets pour obtenir de meilleurs tarifs. Les données agrégées de millions d’utilisateurs peuvent contribuer à développer ou à améliorer des services d’information routière.
Pourtant on estime que 80% des données industrielles restent aujourd’hui inexploitées.
Les eurodéputés et les pays membres de l’UE ont trouvé un accord tard mardi soir sur le texte d’un nouveau règlement présenté par la Commission en février 2022 pour lever les freins à leur utilisation.
La législation, qui s’appliquera à partir de 2025 à tous les secteurs économiques, mais pourra être complétée par des règlements sectoriels spécifiques, établit qui peut créer de la valeur à partir des données, et dans quelles conditions.
Elle vise à assurer à la fois plus d’équité dans l’accès aux données par les entreprises, à créer de nouveaux services innovants et à permettre des prix plus compétitifs pour les services après-vente et la réparation des objets connectés.
L’objectif est de générer 270 milliards d’euros de produit intérieur brut (PIB) supplémentaire dans l’UE d’ici à 2028.
Le règlement octroie aux consommateurs un accès aux données qu’ils génèrent, alors qu’elles sont souvent récoltées exclusivement par les fabricants. Il autorisera leur partage avec des entreprises tierces pour la fourniture de services.
Il cherche aussi à maintenir l’incitation des fabricants à investir dans la production de données. Il prévoit une indemnisation pour les frais liés au transfert de leurs données et empêche leur exploitation pour développer un produit concurrent.
Il entend préserver l’accès des PME aux données en les protégeant notamment des clauses abusives imposées par de grands groupes.
Il autorise l’accès des organismes publics aux données des entreprises privées pour faire face à des situations d’urgence ou mener à bien certaines missions.
Les clients des services de « cloud » (hébergement de données à distance) pourront par ailleurs changer plus facilement de fournisseur.
Cette loi « garantira que les données industrielles sont partagées, stockées et traitées dans le plein respect des règles européennes. Elle créera une économie des données florissante, innovante et ouverte », s’est félicité le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, qui a porté le projet.
Les associations de consommateurs ont cependant dénoncé « une occasion manquée ». « Les institutions européennes ont accordé trop de flexibilité aux entreprises qui pourront empêcher les consommateurs de partager leurs données avec d’autres fournisseurs de services au motif d’un secret commercial », a critiqué Ursula Pachl, directrice générale adjointe du Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC).
Bien que favorable à l’instauration d’un cadre légal, les grandes entreprises du numérique craignent elles de perdre le contrôle sur une ressource précieuse.
« Malheureusement, l’accord conclu ne fait pas assez pour permettre un partage responsable des données par les entreprises et ne laisse pas non plus les utilisateurs libres de décider comment ils veulent utiliser leurs données exportées », a regretté Alexandre Roure, directeur des politiques publiques du CCIA, le lobby des géants de la tech.