Après près de trois ans d’arrêt d’activité
Cela fait plus de 29 mois que les salariés de la SAMIR attendent d’être fixés sur leur sort, alors qu’aucune solution ne semble se dégager dans l’immédiat. Pis encore, des informations et des déclarations véhiculées récemment laissent pressentir qu’on se dirige vers le scénario de la fermeture pure et simple de la seule et unique raffinerie du pays et qui fut jadis l’un des joyaux de l’industrie marocaine.
Contacté par Al Bayane, El Mehdi Fakir, analyste économique, estime que l’affaire relève actuellement des attributions de la justice. Et d’ajouter qu’on ne peut parler de fermeture que dans le cas où il y aurait un échec de la procédure judiciaire. Pour notre interlocuteur, la SAMIR, en tant qu’entité industrielle, est indispensable pour l’économie nationale. D’ailleurs, souligne-t-il, les gens se trompent grandement en prétendant que les entreprises de distribution d’hydrocarbures pourraient se substituer à la SAMIR. «Si cette dernière se limite uniquement à la production, cela ne va que arranger les affaires des distributeurs qui seront plus sécurisés surtout dans l’hypothèse d’une flambée des prix à l’international», affirme-t-il. Qui plus est, « l’existence d’un raffineur national demeure stratégique pour l’Etat afin de ne pas être prisonnier des aléas du marché international », note-t-il en substance.
Par ailleurs, Houcine El Yamani, coordinateur du front syndical de la SAMIR, considère que la fermeture définitive de la société constituerait une catastrophe d’envergure et que personne ne pourrait prévoir les effets pervers d’une telle décision. «La SAMIR a encore sa place sur le marché et ce, pour plusieurs raisons», avance-t-il avant de préciser que «les sociétés de distribution ne peuvent se substituer à la SAMIR qui dispose d’une capacité de stockage s’élevant à 2 millions de tonnes. Une capacité qui n’est pas disponible chez aucun distributeur».
En plus de cela, le militant syndical déclare avec insistance que «seule une raffinerie nationale est capable de réguler les prix sur le marché afin de s’affranchir du diktat des intermédiaires».
Prix de ventre gonflé
Sur un autre registre, le coordinateur du front local met en garde les responsables gouvernementaux sur les risques de la fermeture qui pourrait impacter l’économie nationale et aggraver le déficit de la balance commerciale, surtout avec l’adoption de la mesure de dévaluation du DH. «Ce serait une décision aberrante si on envisageait de sacrifier cette entreprise, joyau de l’industriel national», note-t-il avec amertume. Abondant dans sa plaidoirie, Houcine El Yamani met en cause la thèse affirmant que le Maroc n’a pas besoin d’une raffinerie. «C’est une thèse dénuée de tout fondement. Je fais allusion à notre voisin la Mauritanie, qui a délaissé l’industrie du raffinage, il y a presque une décennie et où les prix à la pompe sont les plus chers du monde », explique-t-il. En plus de cela, le coordinateur du front syndical estime que la société est capable de commercialiser un produit à bon marché au cas du démarrage des unités.
En termes plus clairs, «la SAMIR est capable d’importer en une seule opération entre 120 et 140 tonnes, ce qui lui permet de réduire le coût de transport contrairement aux autres opérateurs ne disposant pas d’une logistique de stockage efficace».
A l’entendre, «le prix de vente des carburants est gonflé par rapport au prix réel de 1,2 DH par litre». Aussi, «depuis la libéralisation du secteur, le consommateur marocain aurait payé indûment, entre 2016 et 2017, 21,6 milliards de DH et ce, en faveur des opérateurs de distribution», clarifie-t-il.
Pour lui, «une intervention de l’Etat serait nécessaire étant donné que la résolution de ce dossier relève de l’intérêt de toute une nation et qu’il serait absurde d’abandonner une unité industrielle dotée d’une technologie de troisième génération et dont le coût d’investissement avoisine les 30 milliards de DH».
Khalid Darfaf