Devant l’afflux des réfugiés soudanais, le Tchad décrète l’Etat d’urgence alimentaire

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Nabil EL BOUSAADI

La guerre qui oppose, depuis le 15 Avril 2023, les troupes du général Abdel Fattah al-Burhan, au pouvoir au Soudan, aux paramilitaires conduits par son rival, le général Mohamed Hamdan Dagalo, dit « Hemetti », n’a contribué qu’à gonfler les rangs des soudanais partis se réfugier au Tchad voisin car 400.000 y étaient déjà venus après avoir fui la région du Darfour, à l’est du Soudan, à cause de la guerre civile qui y avait été déclenchée en 2003.

Mais si, à l’époque, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) fournissait, au Tchad, « une assistance alimentaire et nutritionnelle » qui satisfaisait les besoins du 1,4 million de réfugiés qui avaient fui les conflits du Soudan, de la Centrafrique, du Niger, du Nigeria, de la Libye et du Cameroun, le Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés a signalé qu’en l’espace de ces dix derniers mois, ce sont plus d’un demi-million de réfugiés qui, après avoir quitté le Soudan, ont afflué vers le Tchad et épuisé les maigres ressources de ce pays semi-désertique d’Afrique Centrale.

C’est donc en déplorant cette situation que le président de transition, Mahamat Idriss Déby Itno, a rendu public, ce jeudi, un décret instaurant un « Etat d’urgence alimentaire et nutritionnelle » sur l’entièreté du territoire national.

Or, bien qu’il ne détaille ni les actions qu’il prévoit de mettre en œuvre, ni le nombre des personnes concernées, ce décret se réfère, néanmoins, à l’alerte qui avait été lancée en Novembre dernier par le Programme Alimentaire Mondial (PAM) lorsqu’en mettant en avant un « besoin d’urgence de 185 millions de dollars (…) pour pouvoir assurer un soutien continu aux populations touchées par la crise au Tchad au cours des six prochains mois », ce dernier avait envisagé l’éventualité d’un « arrêt imminent » de l’aide dont le Tchad a besoin s’il ne parvient pas à réunir les fonds nécessaires.

Aussi, après avoir déclaré qu’en décembre, il sera « contraint de suspendre (son) assistance aux déplacés et aux réfugiés du Nigeria, de la Centrafrique et du Cameroun, en raison de l’insuffisance des fonds », le PAM avait tenu à préciser qu’« à partir de janvier 2024, cette suspension sera étendue […] notamment aux nouveaux réfugiés du Soudan, qui ne recevront pas de nourriture ».

Pour rappel, le Tchad qui abrite, désormais, plus de 1.570.000 « personnes en déplacement forcé » parmi lesquelles 1,1 million sont des réfugiés alors que le reste est constitué de « déplacés internes », donc de tchadiens qui s’étaient trouvés contraints de quitter leurs villages du fait de la rébellion de divers groupes armés contre la junte au pouvoir, a été classé, par l’ONU, comme étant le deuxième pays le moins développé au monde.

Mais là où le bât blesse réellement c’est que d’après un rapport du Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires, il y aurait, au Tchad, 1,8 million d’enfants âgés de moins de 5 ans qui, en l’absence d’un soutien conséquent du Programme Alimentaire Mondial, vont, incontestablement, tomber dans une situation de malnutrition tellement aigüe qu’un enfant sur cinq va courir le risque de mourir avant même d’atteindre sa cinquième année. 

Le Programme Alimentaire Mondial sera-t-il en mesure de réunir les fonds qui lui permettront de sauver de la faim et d’une mort certaine non seulement ces réfugiés soudanais venus au Tchad mais, également, ces millions de personnes qui, en divers endroits de la planète, ont été obligées de quitter leurs foyers et parfois même leurs pays à cause des guerres qui éclatent un peu partout et qui coûtent de plus en plus cher ?

Attendons pour voir…

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