Le sourire inébranlable, Ahmed Lahlimi s’est livré à l’exercice d’analyse de la situation macroéconomique nationale en 2017 et les perspectives de son évolution en 2018. Lors de la conférence organisée par l’institution qu’il chapeaute le 10 janvier dernier, le Haut-commissaire au Plan est en confiance, répétant les chiffres déjà prédits par le HCP en juillet dernier.
La croissance économique s’est, en effet, établie à 4%, annonce-t-il devant les médias, non sans satisfaction puisque le haut-commissaire reproche depuis quelque temps aux divers organismes « concurrents » le caractère imprécis de leurs prévisions. Par contre, le premier chiffre annoncé pour la croissance en 2018 est bien plus bas : 2,8%. Ce raisonnement est basé sur un repli prévu dans la valeur ajoutée du secteur primaire, qui sera de 1,3% en 2018 contre une hausse de 13,6% en 2017.
En somme, l’année écoulée a connu des équilibres macroéconomiques légèrement améliorés, avec un déficit budgétaire limité à 3,5% du PIB en 2017, soutenu par le dynamisme de la collecte fiscale et un ralentissement des dépenses budgétaires de fonctionnement et d’investissement. Cependant, la vigilance est de mise en ce qui concerne l’endettement global, stabilisé à 81% du PIB, «en raison de son niveau qui le place en tête de tous les pays du benchmark, de l’augmentation croissante de la part dans cet endettement des établissements publics et de sa concentration limitée sur certains», alerte Lahlimi. Idem pour le déficit du compte courant extérieur, limité à 4,4% du PIB, lequel «doit être assorti d’une égale vigilance, en raison du déficit de la balance commerciale qui continue à s’inscrire dans une tendance à l’accentuation, se situant à 18% en 2017», commente le Haut responsable.
La croissance agricole, toujours sous le joug de la clémence du ciel
En se penchant sur le comportement des secteurs agricole et non agricole, Lahlimi a réitéré sa remarque de toujours : la croissance agricole, quoiqu’en amélioration tendancielle, est toujours soumise aux aléas de la météorologie. Bien heureusement, le bénéfice d’une pluviométrie bien répartie dans le temps et l’espace auraient permis au Royaume de réaliser une meilleure année agricole. Le secteur primaire aurait, dans ces conditions, amélioré sa valeur ajoutée de 15%, accompagnée d’une reprise relative de l’emploi après 3 années de baisses successives, d’une réduction du déficit chronique de la balance commerciale agricole, d’une reconstitution de la trésorerie des agriculteurs et d’une augmentation des crédits agricoles à l’équipement.
En 2018, il devrait s’inscrire dans le prolongement de la tendance enregistrée au cours des 10 dernières années, «conforté par la mise en œuvre des programmes publics d’appui à la production et à l’organisation des agriculteurs», mais « pénalisé par le retour, au cours des derniers mois de 2017, du déficit de la pluviométrie et l’accentuation de l’amplitude thermique», explique Lahlimi.
«La baisse prévue de la valeur ajoutée à -2,1%, contribue à cette alternance de mauvaises et bonnes campagnes agricoles à laquelle s’est habituée l’économie marocaine, en attendant que les réformes du secteur apportent leurs pleins effets dans la durée qu’ils requièrent».
Globalement, le taux de croissance moyen de l’agriculture s’est nettement amélioré au cours des 10 dernières années. Etant de 3% entre 2000 et 2007, il grimpe à 7,3% entre 2008 et 2017. Toutefois, relevant, que le volume d’investissement dont bénéficie le secteur primaire ne représente que 10% de la valeur ajoutée qu’il crée, Lahlimi attire l’attention sur la nécessité de relèvement du niveau de cet investissement, nécessaire à «la sécurité alimentaire du pays et au développement de son potentiel d’industrie agroalimentaire, pour diversifier le tissu productif national et accroitre sa compétitivité».
Quant au secteur non-agricole, il progresse à petits pas. Restant dominé par des activités classiques du Maroc, avec une montée en puissance, bien qu’encore marginale, de nouveaux métiers mondiaux, en particulier les secteurs de l’automobile et l’aéronautique, le secteur non agricole continue à tracer un timide chemin à sa croissance et reste, à 2,7% en 2017 et 3 % prévu en 2018, loin des 5% qu’il connaissait, en moyenne annuelle avant 2013.
Au volet des autres indicateurs, l’encours de la dette du Trésor s’est quasiment stabilisé aux alentours de 64% du PIB en 2015 et 2016. A fin Novembre 2017, l’encours de la dette du Trésor s’est élevé à près de 685,2 milliards de DH. La dette extérieure publique s’est, quant à elle, stabilisée à près de 30% du PIB en 2015-2016. «De manière globale, le niveau de la dette extérieure ne susciterait pas aujourd’hui une réelle préoccupation. La vigilance devrait cependant être de rigueur, d’autant plus qu’aujourd’hui, la dette extérieure des établissements publics aurait tendance à prendre le pas sur celle du Trésor, avec une forte concentration sur un nombre réduit d’entreprises et sachant que l’environnement international décline des risques sur les coûts de financement de notre économie», conclut Lahlimi.
Iliasse El mesnaoui