Brahim El Mazned, membre de la banque d’expertise UE/UNESCO
Propos recueillis par Mohamed Nait Youssef
Pour Brahim El Mazned, membre de la banque d’expertise UE/UNESCO et directeur fondateur de Visa For Music, cette année est une année noire pour les artistes et pour le secteur de la musique. «Le secteur de la culture a été le premier à être impacté et certainement le dernier à reprendre», a-t-il ajouté. En revanche, pour sortir de cette situation délicate, le directeur régional Afrique du Nord et membre du Comité international d’AFRIMA a insisté sur l’urgence de sauver les entreprises culturelles, préparer la relance du secteur et revoir ensemble le mode managérial futur. «Sur le plan digital, il faudra lancer un chantier majeur pour faire du secteur de la musique», a souligné El Mazned.
Al Bayane : Comment se porte le secteur de la musique au Maroc qui a été touché de plein fouet par la crise sanitaire?
Brahim El Mazned : Le secteur de la culture et notamment celui de la musique est de nature précaire, mais cette crise met en évidence sa fragilité et sa précarité.
Les artistes marocains, sont très créatifs, dynamiques et résilients. La preuve en est la qualité des débats des artistes ainsi que la qualité des productions diffusées sur le net pendant le confinement.
Malheureusement, cette année est une année noire pour les artistes et pour le secteur de la musique. Le secteur de la culture a été le premier à être impacté et certainement le dernier à reprendre.
Pensez-vous que les entreprises de la musique qui font face aujourd’hui à un contexte nouveau et une nouvelle réalité doivent revoir d’avantage leur management et stratégies de travail ?
Le problème ne concerne pas uniquement le Maroc, d’ailleurs un rapport[1] réalisé par Music in Africa, à l’échèle du continent, auquel nous avons participé, révèle les conséquences financières de la crise de la Covid-19. Parmi les personnes interrogées, il apparaît que 65 % des professionnels individuels et 70 % des entreprises culturelle n’ont pas d’autres sources de revenus que leur activité principale qui a été interrompue. Les pertes financières vont de quelques milliers à plus d’un million de dollars pour un petit pourcentage des répondants.
Il faudra aujourd’hui, d’abord sauver nos entreprises culturelles, préparer la relance du secteur et revoir ensemble le mode managérial futur.
Où en sommes-nous du grand chantier de la structuration et restructuration du secteur de l’industrie musicale?
Les prémisses de ce chantier ont été lancées il y a quelques années mais aujourd’hui, vu cette crise de la covid-19 et le développement de ce secteur et notamment sur le plan digital, il faudra lancer un chantier majeur pour faire du secteur de la musique, live et digital, un vrai chantier dans notre pays.
Nous ne pouvons pas panser la culture, ou imaginer l’avenir de la culture, sans penser à de nouvelles façons d’investir la chose culturelle et l’espace public.
A votre avis, la conjointure actuelle pourrait-elle être également une occasion idoine pour les acteurs et professionnels du secteur afin de chercher un nouveau modèle économique de l’industrie de la musique?
Nous avons senti pendant ce confinement une soif extraordinaire de la part de tous, la culture et les arts ont accompagné ces moments. Quel que soit son mode d’expression, la culture a permis de maintenir des liens sociaux malgré les mesures prises pour contenir la pandémie.
Des moyens importants sont mis sur les industries lourdes mais le secteur de la culture ne doit pas passer inaperçu, il doit également pouvoir bénéficier de moyens qui permettent aux artistes de rebondir et exprimer toute leur créativité et aux opérateurs culturels de continuer d’offrir des programmes et des projets de qualités à travers le Maroc.
On doit réellement réfléchir à un réel New Deal pour la culture dans notre pays dès la fin de cette crise et l’inscrire dans le nouveau modèle du développement.
Que reste-t-il encore à faire en ce qui concerne l’encadrement politique et législatif afin de faire face aux lacunes législatives?
Et nous ne pourrons pas faire avancer les choses dans le secteur de la culture sans un vrai dialogue entre les pouvoirs publics et les concernés artistes et opérateurs culturels.
Que proposez-vous comme plan de relance post-Covid-19?
Le
secteur culturel est un secteur attractif dans lequel les jeunes et les femmes
s’investissent avec beaucoup d’épanouissement. Les pouvoirs publics doivent à
mon avis s’investir dans la culture et la mettre
au cœur de notre modèle du développement.