Gestes barrières et confinement
Ce que l’on craignait a fini par arriver. Ou presque. Depuis une semaine, les chiffres de la contagion montent. Substantiellement ! C’est un motif de grande inquiétude. Après le premier cas de contagion locale, les experts marocains avaient tiré la sonnette d’alarme sur l’indispensable respect absolu des règles d’hygiène et de distanciation.
Deux jours après, les pouvoirs publics ont encore anticipé et décrété le confinement, communément appelé l’état d’urgence sanitaire, avec de nombreux appels à l’observation des règles incontournables.
Et si, globalement, l’on peut dire qu’une majorité écrasante de citoyennes et de citoyens respecte à la lettre les consignes données par les autorités sanitaires et publiques, des exceptions, qui ne doivent pas confirmer la règle, sont, hélas, observées dans des lieux publics, notamment dans les grandes surfaces et les marchés de quartiers.
Les reportages photographiques, réalisés par les médias, notamment ceux de notre reporter-photographe, Akil Macao sur Al Bayane, démontrent que le relâchement et l’insouciance sont présents aussi bien dans les quartiers populaires que dans les grandes surfaces alimentaires.
Et si, depuis la semaine qui vient de s’écouler, le nombre des nouveaux cas d’infection ne cesse d’augmenter dans une proportion alarmante, c’est justement que ni les gestes barrières ni le confinement ne sont pas scrupuleusement respectés.
Ces dysfonctionnements sont visibles, hélas dans des lieux où les «classes» moyennes se ravitaillent en ces temps de pandémie. Et pas seulement dans les quartiers périphériques et populaires de Casablanca !
Mais ni les uns ni les autres n’ont d’excuses pour continuer à jouer avec des vies. Les leurs, en tant que contrevenants aux règles, et celles des autres.
C’est une responsabilité individuelle et collective.
Mais face à l’ignorance voire l’insouciance, les autorités publiques ont le devoir de serrer la vis. Et ce à deux niveaux.
Premièrement, en ce qui concerne les entreprises et centres commerciaux autorisés à continuer à avoir une activité, il faudra une sensibilisation et un contrôle rigoureux face au laisser-aller qui court en ce moment précis.
Pour les marchés dans les quartiers populaires, il faudra faire preuve d’une grande sensibilisation, puis, de répression des récidivistes et autres irresponsables.
En d’autres termes, la poursuite de l’ouverture de ces entités commerciales et industrielles doit obéir à l’impératif de l’établissement d’un cahier de charges précis, dont l’ossature est le respect rigoureux des gestes barrières et des règles d’hygiène et de distanciation, outre le port, obligatoire, du masque.
Car il est aberrant de constater, sans aucune réaction des tenants des locaux, des personnes sans masque de protection!
Avec la présence, à l’entrée, en plus des vigiles, de substances et produits de désinfection des mains (et des gans), en tant que grand moyen de transmission du virus, à force de toucher les produits surtout emballés…
Ils doivent également veiller à éviter une grande présence clientèle, en fixant un nombre à ne pas dépasser dès le départ, ajusté à chaque sortie de client. Voire la répartition, à l’intérieur, des clients à travers les différents rayons et étalages, de sorte à ne pas se trouver, en grand nombre, au même endroit. Cette précaution devra, en principe, être observée par tout un chacun pour respecter la distanciation.
Explicitons les dangers. L’augmentation des cas d’infection au covid-19 est due, certes, à la disposition des tests en nombres suffisants dans les grandes régions, avec l’association des CHU du pays à la réalisation des analyses, alors qu’il y a dix jours seulement, trois institutions (deux à Rabat et une à Casablanca) étaient chargées du dépistage.
A titre d’exemple, les CHU des grandes villes ont permis, d’une part, le soulagement des trois laboratoires agréés, et le gain de temps de transport des prélèvements effectués dans les régions lointaines (Oujda, Agadir, etc.). Heureusement que nos provinces sahariennes ne comptent que quelques cas et la guérison est au rendez-vous.
Mais tous ces efforts, à côté d’une présence assidue, dévouée et efficace des corps soignants, risquent de s’évaporer si le reste de la machine de guerre ne suit pas.
Autrement dit, il suffit de quelques maladresses et irresponsabilités pour casser cet effort et «uriner dans le sable» comme dit le dicton marocain.
Ceci est valable aussi bien pour des entreprises stratégiques, que pour toutes les marques commerciales, sans exception, ainsi que pour ce genre de cliniques en mal de publicité qui provoque une ruée locale non maitrisée pour saluer des personnes guéries…!
Le directeur de l’épidémiologie, en scientifique, avait anticipé avant la découverte du «pot-aux-roses» (les personnes contaminées dans les grandes surfaces, celle de l’usine de Ain Sbaâ et qui sait encore où ?), en parlant de foyers «familiaux, commerciaux et industriels».
Il fallait y penser, avant de donner l’autorisation, par exemple à la société devenue un cluster, avec plusieurs dizaines d’ouvrières contaminées sans parler de centaines voire des milliers de leurs contacts et, éventuellement, d’autres contacts au second degré…
Cela est parti d’une personne à l’usine pour contaminer des dizaines de collègues qui, chacun à son tour, a contaminé sa famille, voire certaines connaissances ou contacts externes à l’usine et à la famille.
C’est ainsi que la contagion se propage pour atteindre des familles, des voisins, des rues et des quartiers pour englober une ville.
Et l’on ne peut, au lieu de nous occuper des cas déjà existants à en trouver d’autres causés par une irresponsabilité imbécile.
Les politiques doivent réagir et vite.
C’est pourquoi, la vigilance et la sévérité doivent être de mise pour que plus personne ne déroge à la loi et que tous, sans exception, respectent les règles de l’hygiène et du confinement.
Les autorités publiques auraient dû réagir immédiatement pour parer à tout dérapage. Et il n’y a plus à attendre.
C’est la seule manière de stopper les effets ravageurs de la pandémie, pour la vaincre ensuite.
Mohamed Khalil