Le versent marocain du droit hébraïque

Rencontre académique à Essaouira

Par: M’barek Housni

La mémoire, c’est fort bien et il est de mise de continuer à la maintenir vivace. Mais c’est le futur qui doit nous interpeller tout autant. Ce futur sur lequel doit se concentrer nos énergies, était le point fort de l’intervention d’André Azoulay, lors de l’inauguration de la rencontre axée  sur «la place du droit hébraïque dans l’ordre juridique marocain» organisée à Bayt Dakira par le centre d’études et de recherches sur le droit hébraïque du Maroc et le Konrad Adenauer Stiftung et l’association Essaouira Mogador. Ce centre qui porte le nom d’Abraham Zagouri.

L’une des connextions importantes entre mémoire et futur réside dans la célébration de «la puissance des connaissances et le goût de la liberté» selon le mot inaugurateur de Abdellah Ouzitane,  président-fondateur dudit centre d’études et de recherches, et que la ville d’Essaouira représente à travers plusieurs événements d’une grande valeur, et dont cette rencontre montre une belle facette où la sérénité académique des interventions est rehaussée par la symbolique profonde du lieu, ce bayt Dakira où il y avait dans le temps un tribunal rabbinique. C’est riche et hautement instructif.

Au bout de l’écoute suivie et intéressée des études échelonnées le long de cette journée,  on sort avec la conviction claire et nette que le droit hébraïque est une des constantes du droit marocain. Un droit qui continue à être effectif. Le conseiller du de S.M le Roi a cité un nouvel exemple où il a été sollicité. Il a été contacté par notre ambassadeur au Mexique qui lui a narré l’histoire de juifs mexicains d’origine marocaine. Ces derniers ont voulu récupérer la citoyenneté marocaine. Les voies légales ont été suivies et leur vœu a été exaucé et ils ont reçu le document attestant la citoyenneté, cosigné par un rabbin et un haut fonctionnaire du ministère de la justice, en arabe et en hébreu. Ce fût un tel événement qu’ils l’ont exhibé fièrement. Cela a créé un fort intérêt dans les milieux notamment universitaires et un vrai buzz dans les milieux sociaux.

Et comme pour démontrer cela par la preuve scientifique, les intervenants ont détaillé à force d’exemples, de faits historiques et de décrets, l’effectivité réelle de ce droit dont Abraham Zagouri fut un éminent pionnier. Il s’agit des professeurs suivants: le doyen de la faculté de droit de Rabat, Farid Elbacha, Steffen Krüger de Konrad Adenauer Stiftung, du professeur de Sciences Po Baudouin Dupret de Bordeaux, d’Elmustapha Aouine de l’université de Fès,  de David Ouanounou spécialiste du droit hébraïque, d’Ahmed Driouch de l’université de Rabat qui a présenté  brillamment son ouvrage sur David Santillana, le juriste hébraïque tunisien qui se referait dans ses études tant à  la tradition hébraïque qu’au Saint Coran, de Ghita Rabouli directrice de Bayt Dakira qui a, quant à elle,  fourni des témoignages poignants et emprunts d’émotion sur son expérience et son vécu dans ce haut lieu de la mémoire et de l’étude, du chercheur Nourreddine Oulaabbass, et enfin du président de la fondation Séfarade au Canada  Avram El Arrar. La modération a été assurée par Youssef Jajili.

À la fin de son intervention vidéo, David Ouanounou a crée un moment de joie en incitant les gens présents à chanter ensemble la qasidat-chant Alfiyachia.

On pourrait dire que cette journée parfaitement maitrisée côté organisation a tenu ses promesses en ces temps difficiles où sévit le corona et certains courants d’intolérance. Parler de l’esprit de partage civilisationnel et culturel, de la tolérance à  tous les niveaux et du vivre en commun la différence et la diversité est un vrai défi. Surtout lorsque les ponts sont dressés via le savoir profond et le respect des valeurs humaines. Que ça se passe dans la slat Simon Atia, devenu le foyer de la mémoire contre l’occultation et l’oubli n’est que dans l’ordre des choses. La spiritualité heureuse gouverne le lieu, celle qui dote la vie de ce qui la soutient dans les sentiers du salut de l’homme.

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