C’est demain, mercredi 5 juillet, à la prestigieuse place Al Amal d’Agadir, que s’ouvre aux battants la grande messe Timitar. Cet imposant rendez-vous annuel d’envergure est dans nos murs, du 5 au 8 courant, dans les espaces habituels de la capitale du Souss qui vibreront aux rythmes des musiques amazighes et du monde, en parfait maillage convivial.
Depuis déjà une quinzaine d’années, sans relâche, il persévère, avec son cachet qui lui est propre et s’ancre plus que jamais dans la terre bénite de toute une région euphorique, en congratulation avec ses convives plurielles. Au départ, le challenge a été enfourché de pied ferme pour doter la cité d’une tradition artistique de haut niveau, dans une ambiance nationale, éprise des grands festivals. Agadir ne pouvait alors s’émousser devant cette contagion infaillible. Il fallait partir du bon pied et se frayer le chemin approprié.
Il fallait trouver les compétences idoines pour gagner le pari. Il fallait enfin faire confiance à un jeune prodige du terroir qui émergeait du lot. Brahim El Mezned, à qui on confia donc la lourde mission d’aller puiser dans le répertoire musical national et planétaire pour combler tous les désirs et les attentes des grandes foules de plus en plus averties et exigeantes. Cet enfant terrible de la programmation, passionné jusqu’à la moelle par les sonorités de tous bords, s’est fait son bout de parcours en autodidacte acharné et surtout avec tant d’éveil et de flair qui le conduisent au summum de la gloire. Telle une abeille secrétant du miel sans compter, le beau fouineur s’en alla faire le tour des concerts du globe, côtoyant les musicologues les plus prisés, afin de s’approvisionner encore davantage, d’être constamment en phase des novations en galopante apparition et de rehausser de plus belle la qualité de son enfant bien-aimé, Timitar.
Depuis la création de cet événement au début de la précédente décennie, il a été question d’opter pour la régularité et la fidélité par rapport au slogan initial. Cette continuité a, sans doute, permis de dénicher encore davantage dans ce brassage de diversité qui fait toujours le fort de cette manifestation culturelle tolérante dans ses principes de base. Le souci majeur était, depuis longtemps, celui de rapprocher et faire évoluer des prestations parfois diamétralement opposées. À cet égard, il était loisible de garder en permanence ce recul pour mieux apprécier les produits, car, dès le départ, il était exclu de se livrer à la culture unique, aussi bien dans le patrimoine arabo-amazigh varié et riche en expressions et rythmes, ancrés dans les tréfonds de toute une nation que dans la pléthore musicale universelle. C’est surtout une distinction particulièrement éducative et pédagogique dont il s’est agi avec insistance par rapport au festival qui maintient sa même philosophie depuis sa naissance.
On a l’impression que le contenu et la qualité de cet événement baissent de panache par rapport aux précédentes éditions, du fait qu’il n’y a plus de grosses pointures. Mais, il faut bien dire qu’au début, on mettait tout le paquet sur une ou deux stars de renommée mondiale. Cette approche était dictée par le fait que le rendez-vous était à ses débuts et cherchait à focaliser l’attention et drainer les masses. Ces têtes d’affiches finissent, en conséquence, par reléguer tous les autres au second plan, en dépit de leur notoriété. Aujourd’hui, on fait appel à des sommités moins connues dans nos contrées, mais qui font l’actualité dans toutes les scènes du monde. C’est une responsabilité lourde qui doit répondre à tous les goûts, sans pour autant faillir au fil conducteur de cette manifestation dont le mot d’ordre : « Les amazighs accueillent la musique du monde ». Le festival Timitar a donc toujours brillé par cette approche professionnelle. Aucune annulation n’a été enregistrée durant tout cet itinéraire. Tout l’intérêt est ensuite porté sur le côté technique avec la logistique qu’il faut, engagé suivant les cahiers des charges.
D’aucuns constatent que Timitar n’est pas thématique, à la différence de nombre de festivals du royaume.
Or, au Maroc, les thématiques tendent à s’effriter car on a toujours tendance à faire appel à des prestations,quoiqu’elles ne s’insèrent pas dans le registre du festival. Timitar tâche de mettre dans les places publiques une multitude de créations d’artistes amazighs. Maintenant, l’amazighité est une réalité identitaire indissociable de l’entité nationale et n’a pas à rougir devant les rythmes musicaux qui viennent de tous les horizons. C’est bien cela la devise fondamentale. Timitar n’est donc pas un simple rassemblement d’artistes sur des plateaux, mais une quête des vertus de coexistence et de symbiose, sur une terre d’ouverture par excellence. Ces mêmes principes qui animent Timitar font éclater les frontières vers d’autres cieux, où la musique est véhiculaire des valeurs humanistes.
Saoudi El Amalki