La télévision au temps de Coronavirus et la reprise du pouvoir d’initiative

Par Jamal Elmohafide

Les stations de radio et les chaines de télévision publiques ont réussi à reprendre l’initiative et à se réconcilier avec l’opinion publique grâce à une couverture professionnelle des effets du Coronavirus réalisant ainsi des taux d’audience élevés dépassant les taux qu’elles réalisaient avant l’avènement de la pandémie Covid-19.

Ce changement d’approche de la part de l’audiovisuel national a eu pour conséquence d’enregistrer une réaction positive de la part de l’opinion publique qui a interagit avec les dispositions prises par les autorités, notamment les dispositions relatives au confinement et à la restriction de la circulation des personnes, pour limiter la propagation des effets de cette pandémie.

Ce même changement d’attitude de l’audiovisuel national a également été accueilli positivement par les professionnels de la communication et de l’information dans ce contexte difficile que traverse notre pays.

Importance de la presse professionnelle en temps de crise et nécessité de protéger les journalistes

Dans ce contexte, Younes Moujahid président du Conseil National de la Presse dans une déclaration privée a considéré que le traitement de la pandémie du coronavirus par les médias audiovisuels est un traitement professionnel de qualité donnant comme exemple la diversité des programmes et des éditions d’information, l’ouverture sur les experts de différents domaines, l’utilisation des schémas et tableaux illustrant l’évolution des effets de la pandémie, la réalisation de couverture sur le terrain dans l’objectif de permettre au public de suivre de près l’évolution de la situation et des conséquences de la propagation du virus.

Cette évolution remarquable dans le service offert par la télévision, selon Moujahid, confirme de nouveau l’importance cruciale des moyens d’information dans la consécration des règles du professionnalisme, le respect de l’éthique et de la déontologie, l’engagement de ne publier que des informations de source sûre et confirmée, contrairement à ce qui est diffusé la plupart du temps sur les réseaux sociaux.

Si la pandémie du Coronavirus a réaffirmé le besoin crucial de reconsidérer le service public de l’information en consolidant son rôle en la matière ainsi qu’en matière culturelle, de sensibilisation et de divertissement, il y a lieu de souligner qu’en dépit des efforts déployés par les équipes de journalistes et de techniciens du pôle public dans les différentes régions mettant en péril leurs vies en s’exposant aux risques de contamination, il est souvent rare que la question de leur protection et la garantie de leur préservation de ces risques soit prise en considération et ce comparativement à des professionnels d’autres secteurs.

Dans ce cadre, Younes Moujahid, par ailleurs président de la Fédération Internationale des Journalistes, considère que la question de la sécurité et de la protection sociale des journalistes reste posée avec acuité particulièrement en raison de la propagation du Coronavirus.

Pour sa part, Mourad Kadiri, président de «la Maison de la Poésie» en réponse à une question relative à sa perception du rôle de l’information dans ces conditions, «pense que depuis que le Coronavirus a commencé à se propager, tout le monde s’est précipité sur les moyens d’information pour chercher de quoi satisfaire sa curiosité».  et d’ajouter « qu’autant certains organes de presse, des chaines satellitaires et des sites électroniques ont réussi à présenter un service d’information objectif et transparent, respectant les dispositions d’information, les bilans médicaux et scientifiques, d’autres organes se sont précipités dans des approches populistes en diffusant de fausses informations ajoutant à la peur des gens au lieu de les rassurer et de calmer leur inquiétude».

Effort d’information et voie de réconciliation avec le système d’information national

Dans un contexte marqué par un déferlement de l’information causé par cette pandémie, le poète Kadiri a dit «qu’il salut l’effort d’information entrepris par certaines chaines de télévision publiques en couvrant les développements de cette pandémie répondant ainsi et avec professionnalisme aux attentes et aux questions des téléspectateurs et ce en plus de déployer des correspondants veillant près des centre hospitaliers à l’affût de la moindre information».

Et Kadiri de considérer «qu’il n’est pas étrange que certaines éditions d’information de la télévision publique soient suivies avec attention et considération par le téléspectateur marocain et qu’elles jouissent de son admiration et de son respect, ce qui permet à ce moment privilégié d’information d’être une passerelle vers la réconciliation avec les chaines nationales et un moyen de renouveler la confiance en elles ainsi que vis-à-vis des équipes dont elles disposent et qui sans aucun doute détiennent les compétences professionnelles qui leur permettent de participer activement dans la sensibilisation du téléspectateur marocain afin de le faire adhérer et le faire revenir à l’enceinte du champ médiatique national», d’après Mourad Kadiri, spécialiste des politiques culturelles.

Mourad Kadiri pense «qu’il est devenu indispensable pour les décideurs de considérer les journalistes œuvrant  sur le terrain et sur les premières lignes, au même titre que le personnel de la santé, médecins, infirmiers, secouristes, et placer leurs vies et leur sécurité parmi les principales priorités. C’est ce qui requiert de mettre à leur disposition les dispositifs de protection nécessaires et la préservation de leur sécurité d’un côté, et leur formation sur les moyens et les techniques de protection personnelle de l’autre».

Les prémisses de la réconciliation avec le citoyen et défi de «l’information de la vérité»

Par ailleurs, Abdelmajid Fenniche, journaliste et homme de théâtre chercheur en patrimoine, partage les points de vue de Younes Moujahide le journaliste et de Mourad Kadiri le poète, tout en soulignant que cette crise, à l’instar des autres professions ou métiers, restera entre les mains de ses spécialistes, à l’exception du métier de journaliste qui parait-il demeure un domaine plus vaste, sauf que le traitement de l’information le plus suivi et le taux de couverture révèlent les prémisses d’une réconciliation entre le citoyen marocain et les sources d’information marocaines, à travers le suivi, l’analyse et la prospection de l’évolution de cette pandémie.

Fenniche pense que c’est une opportunité offerte qu’il y a lieu de saisir pour réconcilier le traitement journalistique et le citoyen, cette opportunité peut être qu’elle ne se renouvellera pas pour une raison décisive relative à ce que autant la crise est mondiale et générale, autant le citoyen marocain ne cherchera pas les données la concernant que celles relatives aux aspects qui le touchent directement en priorité, c’est-à-dire à l’intérieur de l’espace marocain et à travers un traitement professionnel marocain aussi bien spirituellement que géographiquement.

En dépit que le Coronavirus fait partie des crises mondiales, il reste qu’il s’agit d’une opportunité de renforcer le front intérieur, et c’est ce qui requiert de la presse d’œuvrer à faire de cette crise sanitaire une occasion d’une profonde réconciliation avec le citoyen dans le futur proche.

S’il s’avère important de souligner les efforts exceptionnels déployés par les équipes de journalistes et de techniciens au niveau central et régional en matière de traitement de l’information relative au Covid-19, il reste tout de même nécessaire de redoubler d’efforts dans le futur non pas seulement de la part des journalistes qui ont fait preuve d’une veille informationnelle de grande qualité, mais aussi de ceux qui sont en charge de la gestion du service public d’information national en vue de permettre aux établissements audiovisuels publics de dépasser la simple reprise de l’initiative vers l’étape de consolidation de «l’information de vérité».

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