Peine de mort: les abolitionnistes montent au créneau

La peine capitale suscite toujours un vif débat entre partisans et abolitionnistes partout dans le monde, divisés sur une « question de vie ou de mort ». Devant un crime gravissime, la société doit-elle prendre sa revanche ou se montrer clémente envers son auteur ?

En tout cas, la Journée mondiale contre la peine de mort, célébrée le 10 octobre depuis 2003 offre l’opportunité pour les acteurs des droits de l’Homme et un pan entier de l’opinion publique internationale pour réitérer leur engagement pour l’abolition pure et simple de la sentence capitale.
Au Maroc, les abolitionnistes invoque comme argument la Constitution de 2011 et les conventions internationales qui consacrent le droit à la vie, rappelant que la peine de mort constitue « une violation grave » de ce droit fondamental.
Les débats sur cette question battent leur plein à différentes échelles politique et associative, entre ceux qui préconisent des peines alternatives en se basant sur une revendication purement humaine, contenue dans le protocole se rapportant à la Déclaration universelle des droits de l’Homme, et ceux qui se rangent, plutôt, du côté d’une politique pénale sévère pour endiguer la criminalité et le terrorisme.
La communauté internationale a depuis des décennies franchi d’importants pas pour consolider les droits humains et veiller à leur protection, une dynamique qui a abouti à l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’Homme qui reconnaît à chaque individu le droit à la vie.
C’est dans cet esprit que le deuxième Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques lie intimement l’abolition de la peine de mort à l’évolution progressive des droits humains, en qualifiant toute mesure contre ce châtiment cruel d’évolution en faveur de la dignité humaine.
Sur le plan national, la politique marocaine en la matière semble opter pour une démarche progressive, visant à réduire le recours à la peine capitale, en harmonie avec les engagements internationaux du Royaume, tout en favorisant un débat public dans le but d’aboutir à un consensus autour de cette question.
De l’avis des observateurs, le Royaume qui a opté pour un moratoire sur l’exécution de la peine de mort depuis 1993, s’apprête à franchir un nouveau pas à travers la réduction du nombre d’infractions passibles de cette peine.
Au cours d’un séminaire régional sur la peine de mort en Afrique francophone, le ministre de la Justice Mohamed Aujjar a souligné que le législateur marocain s’engage sur cette voie à travers le projet du nouveau Code pénal, qui prévoit la réduction du nombre d’infractions passibles de la peine capitale de 31 à 11 crimes, en harmonie avec les dispositions de la Constitution.
Le ministre n’a pas manqué de relever que l’abolition de la peine capitale suscite un grand débat politique et social et divise encore l’opinion publique, affirmant que l’objectif ultime est de trouver un équilibre entre la protection du droit à la vie et le maintien de l’ordre public.
Pour le président du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), Driss El Yazami, l’abolition de la peine de mort est devenue une tendance universelle, tant et si bien que de nombreux outils juridiques internationaux poussent dans cette direction et que plus de deux tiers des pays ont mis fin à cette pratique dans la loi ou les faits. C’est le cas justement du Royaume, un abolitionniste de fait fortement engagé dans cette dynamique.
Dans une déclaration à la MAP, le directeur général d’Amnesty International, section Maroc, Mohamed Sektaoui a estimé que la peine capitale n’est pas un moyen dissuasif de la criminalité, mais plutôt une vengeance au nom de la loi, soulignant que « son exécution n’était jamais une solution car elle ne rend pas justice aux familles des victimes ».
Tout en rappelant que plus de la moitié des pays dans le monde ont aboli la peine de mort, M. Sektaoui a considéré que le Royaume « devrait prendre des mesures plus décisives pour qu’il soit en phase avec la tendance mondiale penchant en faveur de l’abolitionnisme ».
« Lors de la Déclaration de Stockholm, le premier manifeste international en faveur de l’abolition de la peine de mort, seuls 16 États avaient aboli ce châtiment en droit et en pratique, mais aujourd’hui, le nombre a atteint 107 pays », a-t-il fait observer.
Même son de cloche chez le président de l’Organisation marocaine des droits humains (OMDH), Boubker Largou, qui a appelé dans une déclaration similaire « à accélérer la dynamique en cours de façon à opérer une révision réelle de la législation nationale et de la pratique judiciaire ».
Dans ce sens, il a fait savoir que l’OMDH célèbre la Journée mondiale contre la peine de mort sous le thème « la dignité pour tous », relevant que l’accès aux couloirs de la mort est très restreint et les conditions de vie des personnes condamnées à mort provoquent fréquemment une déshumanisation au mépris de la dignité des individus.

Par Imad Dlia (MAP)

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