Thaïlande : La crise politique se prolonge

Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

Trois mois après la tenue des élections législatives qui avaient été remportées, le 13 mai dernier, par le leader de «Move Forward» (Aller de l’avant), le réformiste Pita Limjaroenrat, sur la base d’un programme clair et ambitieux visant à «démilitariser» la vie politique du pays, à le sortir du «cycle des coup d’Etats», à casser les monopoles constitués par les groupes d’intérêts qui gravitent autour du pouvoir et à réformer cette fameuse loi de lèse-majesté qui relève d’une époque révolue, c’est toujours l’impasse politique en Thaïlande car, dans le système électoral de ce qui fut l’ancien « Royaume de Siam », c’est un vote distinct du Parlement qui, après les élections législatives, permet de désigner le Chef du gouvernement.

Ainsi, après avoir été rejetée, le 13 Juillet dernier, par des sénateurs tout acquis aux forces armées qui les ont désignés, la candidature de Pita Limjaroenrat avait été récusée par la Cour Constitutionnelle, une seconde fois le 19 Juillet au motif que l’intéressé détient des parts dans une chaîne de télévision alors même que celle-ci ne diffuse plus depuis 2007.

Mais, après le dépôt, par l’intéressé, d’une plainte auprès de la Cour Constitutionnelle, cette dernière a ajourné sa décision au 16 Août.

Aussi, en déclarant que, dès lors qu’il « touche au principe administratif (…) le vote pour le Premier ministre… est reporté », Wan Muhamad Noor Matha, le président de la chambre basse du parlement, avait tenu à préciser que le réexamen de cette candidature ne pouvait pas avoir lieu le 3 Août comme convenu car il reste subordonné à la décision qui sera prise par la Cour constitutionnelle le 16 août.

Or, pour de nombreux observateurs, ceci n’est rien d’autre qu’une grossière manœuvre politicienne ayant pour but de «dénier aux Thaïlandais le droit d’être dirigés par ceux qu’ils ont choisis».

Ainsi, face au blocage opposé à la candidature de Pita Limjaroenrat du fait notamment de son insistance à vouloir réformer la loi portant sur le lèse-majesté, la coalition pro-démocratie qui soutenait le MFP a volé en éclats si bien qu’en sautant sur cette occasion, le «Pheu Thai», un autre parti issu de l’opposition traditionnelle, a essayé de constituer une nouvelle majorité qui ne comprendrait pas le MFP, avec des partis pro-militaires, autour de l’homme d’affaires Srettha Thavisin.

Le parti de Pita Limjaroenrat est donc acculé à s’installer dans l’opposition du fait notamment de son refus d’abandonner l’idée de réformer la loi sur le crime de lèse-majesté qui bien qu’étant inacceptable aux yeux des conservateurs reste, sans conteste, le point nodal du programme qu’il s’est engagé à mettre en œuvre pour rallier à lui une grande partie de cette jeunesse thaïlandaise qui a hâte de se débarrasser des militaires.

En considérant que le clivage de la scène politique thaïlandaise a été mis à nu par le report sine die de l’annonce de la constitution de la nouvelle coalition gouvernementale très disparate qui pointe le bout de son nez au moment où le MFP a été poussé vers l’opposition, attendons pour voir…

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