Un devoir de mémoire et de transmission !

«Souvenirs de jeunes filles » 

Mohamed Nait Youssef

Un livre transmission par excellence. Une immersion. Un pan d’histoire. Une leçon de mémoire aux générations actuelles et futures. «Souvenirs de jeunes filles», dont la coordination a été assurée par Amina Lemrini, nous plonge dans les souvenirs vivaces de l’internat Zaynab Nefzaouia, couvrant la période 1965-1971. Un véritable voyage dans l’espace, et dans le temps.  Nous sommes dans la moitié des années soixante, à Oujda. Trente  anciennes  internes ne font découvrir, par le biais du texte et de l’image, des expériences enrichissantes, fructueuses et singulières. Délicieux. Ce recueil retrace à la fois les parcours, les vécus et les moments partagés dans cet espace, chargé de souvenirs, de savoir, d’échange. «Dans le présent ouvrage, c’est une trentaine d’anciennes élèves de cet établissement qui ont eu l’idée originelle, après des retrouvailles grâce aux réseaux sociaux, de revisiter un pan de l’histoire commune et de le partager avec le grand public. », écrivait  Jamaâ Baïda, historien et ex-directeur des Archives du Maroc, dans la préface du livre.

Célébration de la mémoire collective

Sous les plumes des autrices : Amina Lemrini, Rachida Baroudi, Amina Belouchi, Sfia Bouarfa, Majida Bouchta, Rachida Cherifi, Karima Khaldi et Naima Ouarraoui, ce recueil  très bien documenté et basé sur  des témoignages et des archives personnelles, dont environ 200 photos pour illustrer les textes et les descriptifs, invite les lecteurs à une découvrir l’historique de cet établissement, son encadrement administratif, la vie, les débuts, les conditions et les activités des internes. Dans ce livre rien n’est laissé au hasard ; car chaque détail est soigneusement accompagné par des textes et des images, entre autres, l’uniforme, le tablier, la tenue du sport, les détails du bâtiment, les dortoirs, le réfectoire, le foyer… les différentes activités à l’internat.

«Ce recueil n’est ni un ouvrage d’Histoire, ni un essai de Sociologie. Nous n’en avons pas la prétention, encore moins les compétences requises. Nous avons tenu à célébrer notre « mémoire collective » par un retour à nos lointains souvenirs et à nos expériences vécues durant une tranche de notre vie à l’internat Zaynab Nefzaouia, à Oujda.», peut-on lire dans le préambule du recueil.  

Les récits sont captivants et donnent envie de submerger dans chaque souvenir, moment, témoignage… et chaque jour à l’internat. C’est aussi un clin d’œil à une époque où le Maroc est en pleine mutation et transformation.  À savourer sans modération!

«Les témoignages sont captivants et instructifs ; on y relève un fervent engagement de restituer, non sans une certaine nostalgie, les moindres détails d’un passé de vie commune aux « anciennes » de l’établissement Zaynab Nefzaouia. Les récits, qui n’esquivent point les problèmes rencontrés, sont richement illustrés par l’apport des archives personnelles (photos et documents) des unes et des autres ; chose à laquelle l’auteur de cette préface a été très sensible.», a révélé Jamaâ Baïda.

À l’internat Zaynab Nefzaouia, la vie était bien animée et rythmée avec les fêtes, les activités parascolaires, les activités des fins de semaine,  l’apprentissage, les réflexions partagées,  les relations interpersonnelles sans oublier bien entendu les interactions avec le contexte politique de l’époque.  

 «Il va sans dire que cette narration de souvenirs croisés, couvrant la période 1965-1971, est indissociable de l’environnement social, politique et culturel du Maroc et du monde : les suites de la répression du 23 mars 1965 à Casablanca, les événements de Palestine en juin 1967 et de mai 68 à Paris, etc.», a-t-il affirmé.

Les retrouvailles…  

En publiant ce recueil, des fragments de mémoires collectives ont été restitués, conservés de l’amnésie…, puis transmis  aux générations actuelles et futures. Une initiative à saluer! Ainsi, malgré les eaux qui se sont passées sous les ponts et les chemins qui se sont séparés au gré des parcours personnels et professionnels, la volonté de sauvegarder et de revivre la mémoire a toujours hanté les esprits des autrices du recueil.  

«L’intérêt et le sens de nos retrouvailles ont, sans aucun doute, pesé sur nos vagues mais réelles intentions de restituer les souvenirs condensés de notre mémoire. À vrai dire, au départ, notre préoccupation majeure constituait à nous retrouver sans que la question du «pourquoi» soit réellement posée, ni celle, d’ailleurs, du « pourquoi maintenant» après plus d’un demi-siècle de séparation. Mais curieusement, au fur et à mesure que le groupe créé par les fondatrices s’agrandissait et que les témoignages tombaient, ce passé si lointain est remonté à la surface.», peut-on lire dans l’introduction du livre.  

Les retrouvailles. En mi-décembre 2021, à Rabat, la première rencontre a eu lieu entre les cinq fondatrices : Amina Lemrini, Rachida Cherifi, Fattouma Masmoudi, Karima Khaldi et Rachida Baroudi. C’est ainsi que l’idée de créer un groupe IZN sur les réseaux sociaux a vu le jour. Enfin !  Les rencontres et les échanges ont débouché sur un livre.

Les archives, une question majeure…

Ce recueil nous livre une leçon sur  l’engagement, la persévérance, la passion et l’importance de la sauvegarde de la mémoire. «Souvenirs de jeunes filles » est un livre de transmission, mais il y interroge l’intérêt accordé à la question  des archives par les établissements scolaires et les autorités éducatives : une question majeure sur laquelle il faut se pencher  afin de préserver ces pans de mémoires ayant contribué à la construction de notre histoire collective.   

Il est à rappeler qu’une présentation du livre a lieu, jeudi 20 février, au centre d’accueil et de conférences de la Fondation Mohammed VI pour l’Éducation, en présence de ses autrices. À découvrir !   

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