Débat sur la flexibilité du dirham à l’initiative du PPS

Les avis des experts divergent

Le PPS veut apporter sa pierre à l’édifice de la réforme du régime de change. Son Bureau politique a réuni, lundi dernier, des experts pour décortiquer le passage à un régime plus flexible.

Les intervenants étaient appelés à examiner les effets éventuels du nouveau régime, dont l’entrée en vigueur a été reportée sine die par le chef du gouvernement au grand dam de Bank Al-Maghrib. Sur ce point, les avis divergent. Alors que Jilali Kenzi, représentant du ministère de l’Economie et des finances s’est voulu rassurant, d’autres panelistes n’ont pas caché leurs craintes. Pour justifier la libéralisation du nouveau régime, le responsable des finances a, comme on pouvait s’y attendre, invoqué les arguments déjà avancés par la tutelle et le wali de Bank Al-Maghrib. Selon Jilali Kenzi, toutes les conditions sont réunies pour migrer vers un régime plus flexible. Les indicateurs macro-économiques, notamment les comptes extérieurs et les réserves de change, sont favorables à cette transition.

«Le ratio de la dette s’est stabilisé, le déficit budgétaire tend à baisser et le taux d’inflation figure parmi les plus bas», a-t-il dit. Pour le représentant du ministère, «le système de change actuel ne permet pas d’accompagner la transformation structurelle de l’économie marocaine». «Il ne permet pas de préserver la compétitivité des exportations marocaines sur les marchés traditionnels ni de conquérir de nouveaux marchés», estime-t-il. Un avis que partage le PDG du CIH, également présent à cette rencontre. «Il faut ouvrir le régime de change pour que les entreprises marocaines aient les mêmes instruments de travail que les opérateurs établis à l’étranger», dit-il.

Il explique qu’actuellement, «l’entreprise marocaine qui subit la réglementation de change est moins avantagée que celle qui exporte vers le Maroc». Sur ce registre, Ahmed Rahhou se montre catégorique : «Le régime de change actuel bloque l’évolution de certaines entreprises, dans la mesure où il ne leur permet pas de régler les facteurs de compétitivité».

Or, «quand un exportateur voit qu’il perd en compétitivité, le seul levier dont il dispose pour réduire les pertes est l’ajustement des salaires». D’autant que, sur le long terme, la valeur de la monnaie s’apprécie en fonction du niveau de compétitivité des entreprises.

Pour calmer les ardeurs, le représentant du ministère ajoute que le marché de change offre tous les instruments de couverture pour protéger les opérateurs. De plus, «l’approche graduelle du passage au nouveau régime permet de limiter le risque de volatilité», dit-il. Pour autant, Jilali Kenzi n’écarte pas le risque de dépréciation. À en croire ce dernier, la dépréciation de la monnaie nationale restera soutenable. Les arguments du représentant du département des finances ne sont pas du goût de Ahmed Kassal, entrepreneur et professeur universitaire. Il met en garde contre l’impact de la dépréciation sur les opérateurs économiques, particulièrement la PME. «En cas de dépréciation du dirham, les intrants vont coûter plus cher, ce qui va impacter la compétitivité-prix de l’offre marocaine sur le marché international», prévient-il.

Ahmed kassal avertit aussi sur un éventuel impact négatif sur le pouvoir d’achat des citoyens, et par conséquent sur la demande interne qui reste le principal moteur de la croissance. Abdelouahed Souhail, membre du Bureau politique du PPS est du même avis. Il craint également un effet négatif sur le pouvoir d’achat dans la mesure où la dépréciation va engendrer une hausse du coût des intrants et par conséquent, une augmentation des prix des produits importés.

Pour l’ex-ministre, il faut être très attentif sur les fragilités du pays, comme sur le manque de diversification des exportations. Selon lui, «doper les exportations en dépréciant le dirham revient à faire supporter à l’économie nationale un coût supplémentaire».

Hajar Benezha

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