Guerre de Bosnie: Radovan Karadzic de nouveau devant les juges…

Après avoir été condamné en Mars 2016, par le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), à 40 années d’emprisonnement pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l’humanité l’ancien dirigeant des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic, aujourd’hui âgé de 72  ans et qui, à l’époque, avait qualifié ce jugement de «monstrueux» comparait à nouveau ce lundi devant les juges internationaux saisis en appel de la part des deux parties.

Poète avant d’être président puis guérisseur l’homme porte aussi le titre de «boucher des Balkans». Après la mort, pendant son procès, de l’ancien président serbe Slobodan Milosevic, Radovan Karadzic reste, à ce jour, le plus haut responsable serbe à devoir rendre des comptes pour sa responsabilité durant la guerre de Bosnie-Herzégovine.

Mais si, pour les Croates et pour les musulmans de Bosnie, Radovan Karadzic est un «monstre mégalomaniaque » responsable de la mort de milliers de personnes – principalement des civiles – et «le pire purificateur ethnique » que l’Europe ait connu après Hitler, il restera, pour les Serbes, et à tout jamais, le «héros de la guerre de Bosnie».

Rêvant d’une Bosnie indépendante, débarrassée des autres communautés, Radovan Karadzic avait créé, dans les années 90 du siècle dernier, le Parti Démocratique Serbe (SDS) de Bosnie. Or, le référendum organisé en 1992 au titre de la création de la Bosnie est boycotté par les Serbes eux-mêmes ; ce qui poussera Karadzic à lancer des opérations militaires dont les résultats furent « apocalyptiques ». Ses troupes s’étaient livrées à une large opération d’épuration ethnique ciblant les non-serbes. Près de 100.000 personnes seront massacrés systématiquement et sans aucune forme de procès, un million seront expulsées de leurs domiciles et que plus de 20.000 femmes de tous âges seront violées.

Il est reproché notamment à Karadzic d’avoir organisé le «siège de Sarajevo» qui avait opposé d’Avril 1992 à Février 1996 les forces de Bosnie-Herzégovine qui avaient déclaré leur indépendance de la Yougoslavie aux paramilitaires serbes qui voulaient rester rattachés à leur ancienne patrie ainsi que le non moins tristement célèbre «massacre de Srébrenica» qui s’était déroulé en Juillet 1995 et dans lequel périrent près de 8.000 bosniaques.

Mais devenu, ainsi, une grosse épine dans le pied de Slobodan Milosevic son allié et ancien homme fort de Belgrade, Radovan Karadzic sera écarté des négociations de paix qui s’étaient tenues sous l’égide du président américain Bill Clinton le 21 Novembre 1995 dans la base aérienne de Wright-Patterson à Dayton dans l’Ohio.

Ces accords avaient été signés par le président Ali Izerbegovic, au nom des musulmans de Bosnie, Franjo Turdjman, au nom des Croates de Bosnie et Slobodan Milosevic pour les serbes de Bosnie. Ils avaient  divisé l’ancienne Bosnie en deux entités dotées chacune de son propre Parlement, d’un président et d’un gouvernement ; d’un côté la Fédération de Bosnie-Herzégovine, croato-musulmane, s’étendant sur 51% du territoire et, de l’autre, la Republika Srpska, république serbe, occupant les 49% restant.

Mais si, à l’heure actuelle, les trois signataires de cet accord ne sont plus de ce monde puisque Slobodan Milosevic est mort durant son procès, on ignore encore si le Tribunal Pénal International pour la Yougoslavie s’apprêtait également à poursuivre les deux autres protagonistes pour crimes de guerre.

Radovan Karadzic n’aura donc plus d’autre choix que celui de la clandestinité ; une clandestinité qui durera  13 années puisque ce n’est qu’en 2008 que celui qui se faisait passer pour un médecin spécialiste en médecine alternative et répondant au nom de Dragan Dabic sera rattrapé par son passé même caché sous une grosse barbe et une épaisse chevelure blanche.

Convaincu qu’il n’avait fait que son devoir lorsqu’en 2012, il dira aux juges «J’ai fait tout ce qui était humainement possible pour éviter la guerre et réduire la souffrance humaine», on raconte que le «boucher des Balkans» avait même fait ses valises avant le verdict en étant persuadé qu’il allait quitter sa cellule. La quittera-t-il cette fois-ci ? Au vu de  son âge et de la lourdeur de la peine qu’il encourt, il semble que, sauf  imprévu, il ne pourra en sortir que les pieds devant mais attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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