Fintechs
Kaoutar khennach
Le secteur financier africain traverse une phase de transformation marquée par une forte adoption des nouvelles technologies et un climat de confiance prudent pour les années à venir. Selon la 4e édition du Baromètre de l’Industrie Financière Africaine, réalisé par Deloitte en collaboration avec l’Africa Financial Summit (AFIS), 72% des acteurs du secteur se montrent optimistes quant à l’avenir à trois ans, un enthousiasme encore plus prononcé chez les fintechs (88%).
L’inclusion financière et la digitalisation apparaissent comme des leviers stratégiques pour cette évolution. Tandis que les banques et assurances adoptent une posture plus prudente, la transformation numérique s’accélère avec 36% des projets cloud déjà matures. De plus, les partenariats technologiques explosent, passant de 26% en 2023 à 84% en 2024, témoignant d’un véritable tournant stratégique dans le secteur.
Toutefois, un écart significatif subsiste entre l’adoption technologique et le niveau des compétences digitales. Seuls 2% des institutions jugent leurs compétences digitales matures, mettant en lumière un besoin urgent d’investissements en formation et en développement des talents.
Les défis réglementaires et macroéconomiques restent omniprésents. L’inflation est perçue comme le principal risque par 54% des répondants, suivie par la cybersécurité et la pénurie de talents. L’encadrement de la finance digitale et l’harmonisation des régulations à l’échelle panafricaine figurent parmi les priorités du secteur, alors que seulement 55% des acteurs considèrent que les exigences réglementaires actuelles sont claires.
Par ailleurs, l’attractivité du secteur financier africain suscite des interrogations. Près de 67% des professionnels estiment que cette attractivité stagne ou diminue, un constat qui pose la question de la capacité du secteur à attirer de nouveaux investisseurs et talents.
Les initiatives d’intégration financière telles que le PAPSS, la ZLECAf et l’AELP jouent un rôle clé dans cette transformation, mais leur mise en œuvre demeure inégale. PAPSS est considéré comme un « game changer » avec un niveau d’opérationnalité de 20%, tandis que la ZLECAf et l’AELP restent en retrait, respectivement à 8% et 7%.
L’intelligence artificielle, bien qu’omniprésente dans les discussions, en est encore à ses balbutiements : seuls 2% des acteurs ont déjà déployé des projets concrets, tandis que 71% envisagent de le faire.
Pour libérer pleinement son potentiel, l’industrie financière africaine doit accélérer certains chantiers stratégiques. Le développement de la coopétition entre banques, assurances, fintechs et télécoms ainsi que l’amélioration de l’interopérabilité des systèmes figurent parmi les priorités. De même, renforcer l’agilité organisationnelle et la résilience opérationnelle est essentiel pour absorber les chocs d’un environnement économique volatil. Enfin, proposer des solutions digitales accessibles et investir dans l’éducation financière apparaissent comme des axes incontournables pour une inclusion financière effective et durable.