Par: Abdeslam Seddiki
Le peuple marocain a célébré le 13 janvier dernier le nouvel an 2968 du calendrier amazigh, dite fête «Yennayer». Cet événement prend de plus en plus d’ampleur et d’engagement populaire au fil des ans, traduisant ainsi la réconciliation avec notre passé et la prise en compte de notre mémoire collective en tant que peuple dont les racines sont plongées dans une histoire millénaire que personne ne peut effacer, ni façonner en fonction d’objectifs inavoués.
C’est une chance inouïe pour nous autres Marocains de fêter trois fois «nouvel an» en une seule. Chacun renvoie à des repères spécifiques dans une parfaite symbiose faisant du Maroc et du Marocain ce qu’ils sont présentement. Le calendrier grégorien nous place dans l’universalisme et nous permet de communiquer avec le monde pour pouvoir nous situer dans cet espace planétaire commun à l’humanité et être en phase avec les exigences du moment.
Le calendrier musulman nous plonge dans la spiritualité et le partage de notre vécu avec la «oumma». Ainsi, l’année de l’hégire est porteuse de toute une symbolique et chargée de signification. Outre le nouvel an de l’hégire correspondant au 1er Moharrem, les Musulmans, de parle monde, fêtent comme il se doit une série d’autres évènements qui constituent des moments propices de partage et de communion.
Le calendrier amazigh, qui remonte à près de trois siècles, est le plus ancien de tous. L’origine, semble-t-il, remonte à l’accession d’un Amazigh au statut de Pharaon d’Egypte en l’an 950 Av. JC. On l’appelle également l’année agricole dans la mesure où les saisons de l’année amazighe s’accommodent mieux au déroulement des travaux agricoles. Ainsi, en célébrant le Premier jour de l’An le 13 janvier, autour d’un repas partagé en famille, les Amazigh se préparent dans une liesse populaire et dans une ambiance festive à l’année agricole avec l’espoir d’engranger une bonne récolte (assabath/anebdu en amazigh) pendant que les enfants se mettent à danser au rythme de «hagouza».
Cet attachement à la terre n’a fait que se renforcer au fil des ans et des siècles. C’est dire que la paysannerie marocaine n’est pas née de la dernière pluie. C’est la résultante d’un long processus historique qui s’étale sur des siècles au cours desquels elle a acquis une dextérité et un savoir-faire reconnus tant en matière de techniques d’irrigation que de travail des sols ou de l’organisation des assolements.
C’est cette culture ancestrale, physiocratique et écologique, qu’il convient aujourd’hui de préserver et de renforcer. Notre pays, après quelques hésitations de départ a su comment apporter progressivement des réponses positives à cette problématique. Le discours royal d’Ajdir de 2001 ayant annoncé la création de l’IRCAM a déclenché une véritable dynamique en rétablissant des rapports de confiance par la reconnaissance de la composante amazigh de notre culture nationale et en coupant l’herbe sous les pieds des pêcheurs en eaux troubles. La constitution de 2011 est venue mettre définitivement les pendules à l’heure et régler le pays sur l’horloge amazigh, en considérant la langue amazigh comme langue officielle à côté de l’arabe.
La question identitaire du pays ne souffre désormais d’aucune équivoque : le préambule de la constitution est on ne peut plus clair. Il faut juste œuvrer à rendre opérationnelles et effectives les dispositions constitutionnelles. Par contre, Là où il faut faire plus d’effort, c’est au niveau du développement des zones de montagnes et des régions reculées du pays. C’est une question de justice sociale et de réparation de préjudices subis par le passé.
En cette occasion de la nouvelle année amazigh, il est permis d’affirmer et d’exprimer notre fierté d’être à la fois des Amazigh (Imazighen), des Arabes et par-dessus tout et avant tout des Marocains. Assougass ambarki!!