Carburants: La réouverture de la Samir indispensable pour éteindre la polémique

Le plafonnement des prix des carburants permettra-t-il réellement de mettre fin à la polémique qui touche le secteur depuis la sortie du rapport de la commission d’enquête parlementaire et préserver le pouvoir d’achat des consommateurs ? A elle seule, la formule proposée par le gouvernement pour maitriser les marges des pétroliers ne pourrait vraisemblablement pas apaiser les inquiétudes des consommateurs.

Elle ne constitue qu’une mesure parmi tant d’autres, de l’avis des experts réunis jeudi à l’occasion d’une journée d’étude organisée sur l’approvisionnement en produits pétroliers et la maitrise des prix par le groupe de la CDT à la Chambre des conseillers.Les avis sont unanimes : la réanimation de la Samir est indispensable pour mieux maîtriser les prix.  Houcine El Yamani, secrétaire général du Syndicat national des industries du pétrole et gaz, relevant de la CDT, estime que le sauvetage de la raffinerie de Mohammedia aurait l’avantage d’imposer un référentiel des prix. Selon lui, l’absence d’un référentiel, combiné à la hausse des prix de plus de 1 DH/L, aurait permis aux distributeurs de dégager des marges de plus de 21 milliards de DH sur deux ans. De plus, la fermeture de la raffinerie engendrerait la perte de 20 milliards de DH en tant que dette déjà contractée.

La réanimation de la Samir s’impose aussi pour valoriser les capacités de stockage. Les dernières statistiques officielles sont mises en doute.  Houcine El Yamani, affirme que contrairement à ce qui a été annoncé, le Maroc ne dispose pas de 45 jours de stock. Or, l’Agence internationale de l’énergie recommande 6 mois de stock. Un constat confirmé par Mehdi Daoudi, expert en énergie et ancien responsable à la Samir. Si rien n’est fait pour redresser la Samir, «le stock continuera à baisser», prévient-on. C’est pourquoi il est indispensable de réactiver la Samir pour assurer l’approvisionnement.

D’autant plus que le stock de sécurité n’est plus soumis au contrôle depuis que la Samir et au point mort. Mehdi Daoudi met également en garde contre l’absence de contrôle de la qualité des produits pétroliers depuis la fermeture de la raffinerie. Aujourd’hui, l’inspection effectuée par les services de la Douane au niveau des ports se limite à la nature du produit importé pour déterminer les impositions fiscales à appliquer. Les craintes portent aussi sur la dégradation des équipements de la raffinerie. «Si ces équipements ne sont pas entretenus, la Samir ne trouvera pas de repreneur», souligne Mehdi Daoudi. Or, la dégradation de ces infrastructures coûterait des pertes estimées entre 100 et 150 milliards de DH.

La rencontre organisée par le groupe de la CDT a été également l’occasion de revenir sur les conditions qui ont marqué la privatisation de la Samir. L’économiste et expert-comptable, Mehdi El Fakir,estime que la privatisation de la raffinerie s’est faite dans l’opacité, puisqu’elle s’est passée dans le cadre d’une cession de gré à gré alors que la commission de transfert avait fixé une procédure d’appel d’offres.  Il rappelle d’autres déboires de cette privatisation, notamment au niveau de la régulation publique. El Fakir reproche à l’Etat de ne pas avoir rempli son rôle de garant en restant dans le tour de table de la Samir. «Mais lorsque le gouvernement affirme que le sort de la Samir est entre les mains de la Justice, c’est à se demander si des considérations politiques ne sont pas derrière le blocage de la mise en vente», s’interroge Houcine El Yamani. Or, «une vingtaine d’offres ont été proposées depuis la publication de l’appel à manifestation d’intérêt, mais nous n’arrivons toujours pas à conclure avec un repreneur», conclu Mehdi El Fakir.

Hajar Benezha

 

 

Appel à soumettre les pétroliers à un nouvel impôt

L’économiste Mehdi El Fakir a profité de son passage au Parlement pour proposer aux parlementaires de se pencher sur l’élaboration d’une proposition de loi destinée à soumettre les distributeurs à un prélèvement exceptionnel. Cet impôt pourrait être fixé à 50 centimes par litre pour le gasoil et à 1 dirham pour l’essence sur les quatre années à venir. Entre 3,5 à 4,5 milliards de DH pourraient être mobilisés grâce à cette mesure, affirme El Fakir. Ces recettes viendraient alimenter les Fonds mis en place pour soutenir certains secteurs stratégiques.

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