La guerre d’Ukraine et les « hésitations » de l’Allemagne

Attendons pour voir…

En divisant aussi bien la société civile que la classe politique allemande, la décision prise ce vendredi, par le gouvernement de Berlin, de débloquer un milliard d’euros au profit de l’Ukraine afin de lui permettre d’acheter des armes lourdes met le chancelier Olaf Scholz dans l’embarras et ce, d’autant plus que, par ses sollicitations de plus en plus pressantes, Kiev s’acharne à vouloir faire croire au dirigeant allemand, qu’elle accuse de traîner les pieds – aussi bien pour la livraison d’armes que pour l’instauration de sanctions plus sévères comme l’embargo sur le gaz et le pétrole russe –  que l’issue du conflit russo-ukrainien dépendra, en grande partie, de la célérité que Berlin mettra à livrer des armes à l’Ukraine.

Aussi, en considérant qu’une victoire dans l’est de l’Ukraine serait, désormais, un des principaux objectifs du Président Poutine après l’échec qu’il a essuyé à Kiev, Oleksii Arestovitch, le conseiller du président Zelensky avait clairement déclaré, le 13 Avril, que le sort de Marioupol et du Donbass restent liés à la livraison, par l’Allemagne, des armes à l’Ukraine.

Mais le conseiller du président ukrainien n’est pas le seul à pointer l’Allemagne du doigt car, avant lui, c’était le président Zelensky, lui-même, qui, dans un entretien accordé le 10 Avril à l’hebdomadaire « Die Welt Am Sonntag », avait déclaré « l’Allemagne se montre froide à notre égard » et que, de son côté, l’ambassadeur d’Ukraine en Allemagne, Andriy Melnyk, ne cesse de demander plus d’armes à Berlin au risque d’entrer ouvertement en conflit avec la ministre allemande de la Défense Christine Lambrecht.

Les autres dirigeants européens ayant critiqué le peu d’empressement que met l’Allemagne pour apporter son secours à l’Ukraine sont le vice-Premier ministre polonais, Jaroslaw Kaczynski, qui a fermement critiqué les hésitations de Berlin et l’ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, qui a estimé qu’en tant que « grande démocratie », l’Allemagne est tenue de « montrer l’exemple ».

Et, pour enfoncer le clou encore plus, c’est le président allemand, Frank-Walter Steinmeier, qui a été sévèrement  humilié quand après avoir fait part de son intention de se rendre à Kiev, il lui avait été annoncé, le 12 Avril, que le gouvernement ukrainien n’entend pas le recevoir. En cause, la politique plutôt accommodante envers la Russie de ce cacique du SPD lors de l’annexion de la Crimée alors qu’il avait été, à deux reprises, ministre des Affaires étrangères d’Angela Merkel mais, surtout, le fait que Zelensky, qui n’entend point se satisfaire de la visite d’un responsable dont le pouvoir est symbolique, voudrait plutôt recevoir à Kiev le chancelier allemand Olaf Scholz après y avoir rencontré d’autres dirigeants européens comme le président français Emmanuel Macron, en Février, et le Premier ministre britannique Boris Johnson, le week-end dernier.

Mais, le président ukrainien et le chancelier allemand n’auront pas encore l’occasion de discuter « des décisions pratiques » concernant la « livraison d’armes lourdes » comme l’espérait le conseiller du président ukrainien ; ce qui gêne profondément l’Ukraine qui était décidée à pousser Olaf Scholz à mettre en œuvre sa fameuse « Zeitenwende », ce changement d’époque qui lui tient tellement à cœur et qui implique une position moins pacifiste de Berlin avec, bien entendu, des livraisons d’armes.

Or, en considérant que jusqu’à présent les pays qui soutiennent l’Ukraine ne lui envoyaient que des missiles anti-aériens ou anti-tanks, le chancelier allemand ne voudrait, en aucun cas, être le premier à lui envoyer des armes offensives, comme des chars d’assaut, car cela équivaudrait à prendre une part très active dans le conflit ; ce qui, d’après une déclaration faite au journal « Die Welt » par le général Erich Vad, qui fut un ancien conseiller d’Angela Merkel, « risquerait d’être perçu, par la Russie, comme étant un acte de guerre qui pourrait entraîner le monde dans la 3ème guerre mondiale ».

Jusqu’à quand va durer cette valse-hésitation à laquelle s’adonne le chancelier allemand alors que la guerre d’Ukraine bat son plein et qu’elle semble être sur le point de faire entrer le monde dans ce troisième conflit planétaire tant redouté ?

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

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