Chambre des représentants
Par Jamal Eddine Felhi
Lors de la séance plénière du lundi 23 décembre, la Chambre des représentants a annoncé avoir reçu du Groupe du Progrès et du Socialisme une proposition de loi visant à protéger les enfants et les adolescents de moins de 16 ans des dangers que représente l’accès aux plateformes et réseaux sociaux sur Internet.
Dans le préambule de ce texte, les députés du Progrès et du Socialisme soulignent les préoccupations croissantes des pouvoirs publics face à l’impact du numérique sur la vie privée des enfants et des adolescents, compte tenu de la vulnérabilité des plus jeunes et leur besoin de bénéficier d’une protection particulière en raison, notamment, de la recrudescence des risques qui menacent leurs droits reconnus au niveau international et consacrés par la législation nationale.
Parmi les droits les plus bafoués et gravement violés des plus jeunes sur le net figurent ceux liés à leurs données personnelles, ce qui porte une atteinte flagrante à leur vie privée. Cette atteinte revêt toutes les formes de violence, d’escroquerie, et d’exploitation, dans « un contexte marqué par des avancées technologiques fulgurantes et une prolifération des plateformes et des réseaux sociaux qui ne connaissent ni frontières ni lignes rouges », relèvent les députés du Progrès et du Socialisme.
Ils rappellent, à cet égard, l’avis émis par le Conseil économique, social et environnemental (CESE) intitulé « Pour un environnement numérique inclusif et protecteur des enfants ». Un avis comportant une série de recommandations pertinentes sur le sujet, essentiellement la nécessité d’actualiser et d’adapter le cadre juridique national aux normes internationales relatives aux droits de l’enfant, en tenant compte particulièrement du rythme effréné de l’évolution de l’environnement numérique.
Il s’agit surtout de définir les crimes commis sur Internet, de préciser les responsabilités des entreprises technologiques et des opérateurs de télécommunications, et de fixer les règles encadrant l’utilisation des réseaux sociaux et l’accès des enfants aux plateformes.
Le Conseil a également recommandé de fixer des conditions claires concernant l’âge minimum des jeunes autorisés à utiliser les réseaux sociaux sans l’accord des parents ou des tuteurs légaux, comme c’est le cas dans de nombreux pays, notamment en Europe où le Règlement général de l’UE sur la protection des données (RGPD) fixe des limites d’âge. A titre d’exemple, l’Allemagne et l’Irlande fixent cet âge à 16 ans, tandis qu’il est établi à 15 ans en France et en Italie, et à 13 ans en Espagne et aux Pays-Bas.
D’autres expériences internationales, comme celle de l’Australie, fixent l’âge numérique légal à 16 ans, alors qu’il est de 14 ans en Chine et en Corée du Sud, et de 13 ans au Royaume-Uni et aux États-Unis.
Bien que la fixation d’un âge numérique légal pour accéder aux réseaux sociaux pose certaines difficultés objectives et pratiques, il est devenu impératif pour le Maroc, souligne le GPS, de légiférer en la matière et de prendre des mesures restrictives à l’encontre de ces plateformes et réseaux, telles que l’obligation de refuser l’accès des mineurs de moins de 16 ans sans l’autorisation de leurs parents ou leurs tuteurs légaux, 16 ans étant un âge qui pourrait être considéré comme approprié pour accompagner l’éducation des enfants marocains, à la lumière des transformations sociétales rapides intervenues au cours des dernières années et des opportunités d’apprentissage, d’épanouissement et d’ouverture à travers une participation positive à l’environnement numérique.
Pour les députés du PPS, l’objectif principal de cette mesure est de protéger les enfants des risques liés à l’accès à l’environnement numérique, tels que l’exploitation des données personnelles, le harcèlement et l’intimidation en ligne, l’exposition à des contenus inappropriés, et d’autres dangers similaires. Par conséquent, les plateformes numériques doivent ainsi obtenir un consentement explicite des parents ou des tuteurs légaux lors du traitement des données personnelles des enfants en dessous de l’âge légal numérique.
La définition d’un âge légal pour l’accès aux plateformes et services numériques vise également à renforcer la responsabilité numérique chez les jeunes, en les incitant à utiliser leurs données personnelles de manière consciente et prudente, lit-on aussi dans le préambule du projet de loi.
L’implication de la Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel (CNDP) est essentielle pour préserver la vie privée numérique des enfants, compte tenu de ses missions principales d’information, de sensibilisation, de conseil, de proposition, de protection, de contrôle, d’enquête et de veille juridique et technologique.
Les membres du Groupe du Progrès et du Socialisme soulignent, en conclusion, que leur initiative législative vise à contribuer à la mise à jour et à l’efficacité de la loi n°09.08 relative à la protection des personnes physiques contre les abus d’utilisation de leurs données à caractère personnel, en vigueur depuis plus de 14 ans, afin de définir de manière précise l’âge légal numérique et de protéger les données personnelles des enfants face à l’évolution technologique, leur utilisation d’Internet et ses impacts sur leur santé physique et mentale, tout en les protégeant contre la cybercriminalité.