L’enfance

Par : Abdeslam Seddiki

La célébration des journées mondiales ont au moins un mérite. Elle nous donne l’occasion de faire des bilans, d’exprimer des solidarités, d’attirer de nouveau l’attention des pouvoirs publics  et des instances concernées par le sujet et pourquoi pas d’envisager des solutions et des alternatives.  C’est ainsi que le HCP, à l’occasion de la journée mondiale contre le travail  des enfants (12 mai de chaque année), vient de publier un communiqué sur le travail des enfants au Maroc dont la tranche d’âge varie entre 7 et 17 ans en introduisant la notion de travail dangereux.  Bien que les chiffres fournis par le HCP aient été largement repris par la presse, il nous semble utile d’y revenir en les réexaminant sous un angle nouveau et dans une perspective dynamique  d’une part tout en proposant des pistes de réflexion pour réduire, voire éradiquer, ce phénomène  d’autre part.

Les données du HCP sont les suivantes : sur les 7.049.000 enfants âgés de 7 à 17 ans, 247.000 exercent un travail, soit 3,5%. Parmi ces derniers, 162.000 exercent un  travail revêtant  un caractère dangereux, ce qui correspond à un taux d’incidence de 2,3%. Les enfants astreints à ce type de travail sont à 76,3% ruraux, 81% masculins et à 73% âgés de 15 à 17 ans.

Quatre régions abritent 70% des enfants astreints à ce type de travail. La région de Casablanca-Settat vient en tête avec 25,3%, suivie de Marrakech-Safi (20,3%), puis Rabat-Salé-Kenitra (12,7%) et enfin la région de Fès-Meknès avec 11,7%.

Par ailleurs, 10,6% des enfants exerçant un travail dangereux sont en cours de scolarisation, 81,4% ont quitté l’école et 8% ne l’ont jamais fréquentée.

Le travail dangereux reste concentré dans certains secteurs économiques et diffère selon le milieu de résidence. En zones rurales, les enfants exerçant un travail dangereux se retrouvent en particulier dans le secteur de l’ »agriculture, forêt et pêche » (82,6%). En revanche, en villes, ils sont concentrés dans les « services » (52,7%) et dans l’ »industrie y compris l’artisanat » (32%).

Il faut rappeler que le Maroc a fait des efforts en la matière bien qu’ils restent insuffisants  pour réduire le travail des enfants. Un effort législatif d’abord  en ratifiant toutes les conventions internationales relatives aux droits de l’enfant ; un effort sur le terrain en matière de scolarisation des enfants notamment dans le monde rural, en sensibilisant la population concernée contre ce fléau, en faisant associer  la société civile. Ainsi, pour la  tranche d’âge 7-15 ans,  le nombre d’enfants au travail est passé de 517 000 en 1990 (9,7% de la tranche d’âge)  à 147 000 en 2010 (3%) , 86000 en 2013 et 69000 en 2014.

Il convient de poursuivre cet effort voire l’intensifier pour éradiquer le travail des enfants. Pour ce faire,  Il faudra en premier lieu lutter contre l’abandon scolaire qui est l’une des causes principales du travail de l’enfant. Nous touchons ici à la problématique de l’éducation dans le pays et aux déboires de notre système éducatif.

En deuxième lieu, il faudra mobiliser davantage le tissu associatif qui a montré son efficacité sur le terrain. L’expérience conduite par le Ministère de l’Emploi, en partenariat avec quelques associations, sur la base d’un cahier de charges a montré qu’on pourra atteindre des résultats probants au moindre coût. Nous pensons qu’il sera utile d’étendre cette pratique à l’ensemble des régions et viser une population beaucoup plus large.

En troisième lieu, il faut absolument renforcer le corps des inspecteurs de travail  en ressources humaines suffisantes  et en moyens de travail adéquats.  Ce n’est pas avec  400 inspecteurs de travail au niveau national que l’on peut procéder au contrôle des « entreprises » qui  violent les lois en vigueur  et qui bafouent les règles de base en matière de santé et  sécurité au travail.  Quant à la médecine du travail, elle est pratiquement inexistante !!

En dernier lieu, et partant du principe que «les mêmes causes produisent les mêmes effets», il faut s’attaquer au problème de la pauvreté et à l’amélioration du pouvoir  d’achat des populations. Ce qui passe ipso facto par la mise en œuvre d’un nouveau modèle de développement que tout le monde appelle de ses vœux …Plus vite fait mieux c’est!

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