Merkel en visite d’adieu en Ukraine

Alliée déçue de Berlin

Angela Merkel est arrivée dimanche en visite d’adieu en Ukraine, un allié pro-occidental que la chancelière allemande s’est efforcée d’épauler face à Moscou, mais qu’elle a aussi beaucoup déçu par son appétit pour le gaz russe.

Elle rencontre d’ailleurs le président ukrainien Volodymyr Zelensky, 48 heures après un passage à Moscou pour y voir Vladimir Poutine, alors qu’elle quitte à l’automne, après 16 ans au pouvoir, ses fonctions de chancelière.

La rencontre de Mme Merkel avec le président ukrainien a commencé après 10H00 GMT. Les deux responsables doivent ensuite donner une conférence de presse.

Kiev est reconnaissant à Mme Merkel pour son soutien face à Moscou depuis l’annexion de la Crimée ukrainienne par la Russie, suivie d’un conflit avec des séparatistes prorusses dans l’Est en 2014.

Mais elles lui reprochent aussi d’avoir exclu du champ des sanctions européennes contre Moscou la question gazière, insistant sur la construction du gazoduc sous-marin russo-allemand Nord Stream 2 qui doit s’achever sous peu et contourne la voie de transit traditionnelle qu’est l’Ukraine.

«On peut appeler ça une approche pragmatique», a relevé cette semaine le président Zelensky dans un entretien accordé à plusieurs médias. «Mon opinion, est qu’elle avance sur un chemin délicat, d’équilibriste. Pour moi, c’est trop faible», a-t-il encore jugé.

Sur la guerre dans l’Est, elle a toujours dénoncé l’implication russe au côté des rebelles tout en se faisant, avec la France, médiatrice entre Moscou et Kiev, mais a toujours refusé de vendre des armes à l’Ukraine, au grand dam de cette dernière.

Le rôle de Merkel a été crucial pour arracher les accords de paix de Minsk en 2015 et qui ont permis de mettre fin au pire des combats. Mais le règlement politique est toujours au point mort, un statu quo qui arrange avant tout Moscou.

Angela Merkel a plaidé vendredi pour «maintenir en vie» les négociations de paix, «même si les avancées ne sont pas aussi rapides que nous l’espérions».

«Il n’y a aucun autre instrument pour aboutir à la paix», a insisté de son côté M. Poutine, qui accuse l’Ukraine de saboter les pourparlers alors que son pays est largement considéré par les Occidentaux et Kiev comme le parrain des séparatistes qui les arme et contrôle.

Beaucoup à Kiev se sont par ailleurs indignés du choix de la chancelière de ne pas participer lundi, au lendemain de sa visite, à un sommet international consacré à l’annexion de la Crimée, événement d’envergure inédite pour l’Ukraine.

Cette décision de la chancelière a été qualifiée de «manque de respect», voire de «gifle» par des experts ukrainiens.

Merkel «souhaite à nouveau jouer le rôle d’un arbitre neutre là où il faut exprimer clairement sa position» et choisir son camp «dans la guerre de la Russie contre l’Ukraine», a relevé sur Facebook Aliona Getmantchouk, directrice du centre d’analyse Nouvelle Europe, à Kiev.

Avant de quitter ses fonctions, Mme Merkel aura donc à coeur de rassurer l’Ukraine. Sur le gaz en particulier.

Kiev espère qu’elle viendra porteuse d’un message du Kremlin garantissant un «minimum de transit gazier», selon M. Zelensky, les droits que perçoit l’Ukraine en la matière étant une ressource financière cruciale.

M. Poutine a en effet assuré vendredi, à l’issue des pourparlers avec Mme Merkel, que la Russie allait «pleinement remplir ses obligations dans le cadre du contrat de transit» actuel qui expire en 2024, «même après le départ de la chancelière de son poste».

La mise en service de Nord Stream 2, initialement prévue au début 2020, a connu d’importants retards en raison de l’opposition de certains pays européens et de la menace de sanctions américaines.

Mais les Etats-Unis ont finalement renoncé en mai à prendre des sanctions, pour ne pas affecter les liens avec l’Allemagne. Et en juillet, un accord a été trouvé entre les deux pays pour que le tube puisse être achevé.

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