« Un théâtre de rupture » d’Ahmed Massaia
Mohamed Nait Youssef
Une référence incontournable. Ahmed Massaia, auteur du « Répertoire du théâtre marocain », signe « Un théâtre de rupture », essai sur la jeune création théâtrale au Maroc (Virgule Editions). A la fois chercheur, critique de théâtre, agitateur culturel, l’ auteur de cet ouvrage volumineux de 347 pages riche et chargé de références, d’informations et d’anecdotes, dresse d’abord un bilan du théâtre marocain, son évolution, ses hauts et ses bas, ainsi que les grandes étapes et périodes qui l’ont marquées, écrivait l’auteur, la première période (de 1923-1953) date de la venue au Maroc des premières troupes du Moyen-Orient, la deuxième période qui a vu la création de plusieurs troupes de théâtre, dont la Troupe du Théâtre Marocain, la Troupe Maamora, le Théâtre National Mohammed V, le Théâtre d’Aujourd’hui, ainsi qu’une troisième période des premiers lauréats de l’Institut Supérieur d’Art Dramatique et d’Animation Culturelle (ISADAC) à laquelle ce livre est consacré.
« Ce livre se propose de rendre compte de l’activité théâtrale au Maroc durant les trente dernières années, c’est-à-dire depuis la sortie des premiers lauréats de l’Institut Supérieur d’Art Dramatique et d’Animation Culturelle (ISADAC). », souligne Ahmed Massaia dans l’introduction du livre. Selon lui, « il s’agit, d’une part, de rendre compte des circonstances politiques, administratives et artistiques qui ont présidé à la création et à la gestion de cet Institut, d’évaluer les dispositions administratives et financières qui avaient jusqu’à présent régi l’activité théâtrale et, d’autre part, de dresser un panorama des différentes orientations esthétiques des troupes théâtrales constituées par ces lauréats qui ont animé la scène théâtrale nationale depuis le début des années quatre-vingt-dix et qui ont constitué une rupture esthétique avec le théâtre des pionniers. »
Témoigne de son temps, l’auteur apport, à travers cette publication importante, un éclairage sur une phase ayant marqué le théâtre marocain, mais aussi et surtout d’une jeune expérience et d’un nouveau souffle esthétique, technique, artistique ayant laissé une empreinte singulière et profonde dans l’histoire du père des arts nationaux.
Sous la loupe alors de Massaia, le lecteur y voit en effet les circonstances politiques qui ont présidé à la création de l’ISADAC, l’apport assez riche des lauréats de cette institution académique en matière de la recherche et de la création théâtrales. Sans oublier bien entendu les articles et les critiques qui ont été écrits à l’issue des spectacles et des représentations théâtrales.
Habité par le théâtre et hanté par ses questions majeures, l’auteur braque les lumières dans ce livre important sur la nouvelle génération d’artistes et de comédiens ayant rompu les liens avec le passé, tout en s’inscrivant dans un changement et renouvellement esthétique, académique et professionnel. L’auteur la définit ainsi : «La jeune création théâtrale est le fruit d’une série de circonstances politiques qui ont jalonné l’histoire récente de notre pays.»
Par ailleurs, l’auteur a mis l’accent sur les atermoiements administratifs qui ont, selon lui, freiné sa bonne marche malgré les efforts de formation déployés par les responsables de l’ISADAC. Massaia, était à la tête de cet institut de 1993 à 2004, revient également dans ce livre sur le faux départ de cette institution. Car les premiers lauréats, dès leur sortie, dit-il, sont confrontés à des difficultés administratives et artistiques pour pratiquer le métier.
Connu par son franc parlé, l’auteur, qui n’a pas mâché ses mots, dit tout sur cette nouvelle génération, ses hauts, ses bas et le contexte dans lequel elle a évolué.
En outre, le volet esthétique et sa diversité ont occupé une place prépondérante dans le livre. Un théâtre qui s’ouvre sur de nouveaux horizons modernes et postmodernes, un théâtre qui brise les tabous et qui s’inscrit dans une quête permanente du nouveau et du renouveau.
Qui dit théâtre, dit ses femmes et ses hommes. L’auteur de l’ouvrage n’a pas manqué de mettre les lumières sur certaines figures de proue ayant marqué cette génération : Hassan Hammouch, Amine Nassor, Naïma Zitan, Bousselham Daïf, Mohamed El Hor, Jouad Essounani, Mahmoud Chahdi, Ahmed Hammoud, Ghassan El Hakem, Faouzi Bensaïdi, Hafid Badri, Asmaa Houri, Abdelmajid Elhaouasse.
« Un théâtre de rupture », essai sur la jeune création théâtrale au Maroc, est sans doute une référence pour les chercheurs, les étudiants et les lecteurs.
