«Le PLF-21 est un projet de loi de finances qui intervient dans un contexte qui est très complexe»

PLF 2021: Interview avec l’expert comptable El Mehdi Fakir

Par  Aya Lankaoui

Un projet de loi de finances qui intervient dans un contexte marqué par la crise économique liée à la pandémie. Quelles sont alors les principales mesures du PLF-21 ? Est-ce que les secteurs affectés par la pandémie peuvent-ils bénéficier d’une amnistie fiscale ? Expert comptable, analyste économique, El Mehdi Fakir répond aux questions de l’équipe d’Al Bayane.

Al Bayane : On parle actuellement beaucoup d’un projet de loi de finances, d’après vous par quoi se caractérise le PLF-21?

El Mehdi Fakir : Le PLF-21 est un projet de loi de finances qui intervient dans un contexte qui est très complexe, très particulier, très singulier qui se caractérise par un ensemble de contraintes. Ce qui fait que l’exécutif n’a pas eu trop de chance ou plutôt trop de marge de manœuvre. Donc, c’est tout à fait normal aujourd’hui qu’on se retrouve devant une loi de finances où le mot d’ordre est le maintien d’équilibre et la détermination de garder une certaine volonté bien sûr, de la décision politique et la souveraineté économique. Cela explique un peu pourquoi on parle beaucoup de souveraineté économique parce qu’on cherche à éviter au maximum l’endettement. Donc, ça reste très compliqué de se maintenir debout pour le restant de l’année. Voilà pourquoi je pense intimement que c’est un contexte qui est très particulier.

Quelles sont les priorités du PLF-21?

Les priorités du PLF-21, sont les priorités dites dans le discours de SM, notamment, la relance économique, la généralisation de la couverture sociale à l’ensemble de la population, la réforme du secteur public et la rationalisation de la gestion de l’administration, ainsi que de confirmer la poursuite des grands chantiers durables.

Quid des mesures fiscales?

Alors, pour les mesures fiscales je pense qu’il y a deux mesures très populaires : celles de la contribution solidaire. Et je pense qu’ils font l’objet de beaucoup de discussions parlementaires. Cette contribution concernera les sociétés soumises à l’IS (Impôt sur les Sociétés), les sociétés exerçant leurs activités dans les zones d’accélération industrielle et les sociétés de services bénéficiant du régime fiscal prévu pour CFC. Cette contribution est censée rapporter 5 milliards de DH aux caisses de l’Etat. La deuxième mesure à mon avis, ça reste l’exonération dans le CDI pour une période de deux ans de l’IR (Impôt sur le Revenu).

Que dire des mesures douanières?

Pour les mesures douanières, il y a principalement un relèvement de l’impôt sur certains produits manufacturiers, notamment le cacao, le chocolat, le toner, les parapluies par exemple… dont l’objectif est de soutenir la production locale et bien sûr la volonté de rééquilibrer un petit peu les choses.

Et les mesures budgétaires?

S’agissant des mesures budgétaires, je pense qu’il faut principalement saluer quand même l’augmentation des budgets de l’Etat, notamment de la santé et de l’éducation. Et de maintenir un petit peu leur augmentation, car c’est toujours pas du tout suffisant par rapport à ce qu’il faudrait. Je pense qu’il y a un peu près de 18 milliards de DH comme budget général pour la santé, et ce n’est pas du tout suffisant ! il faut un peu plus pour maintenir la soutenabilité. Mais sur un autre volet, je pense personnellement que le sujet également porte sur le maintien de l’investissement public, ce qui est bien. Donc, la commande publique devrait être maintenue, et c’est un signal positif.

Que pensez-vous de la taxe de solidarité?

Le principe de la taxe de solidarité est bien. Maintenant bien sûr, il y a toute une discussion et tout un débat sur les modalités par rapport au barème. Il faut juste prendre le soin que cette contribution ne soit pas invisible à la demande intérieure. Personnellement, je défends le principe, maintenant effectivement la partie concernant les salariés ne fait pas l’unanimité. Je pense que cela regarde les salariés qui perçoivent un net de 10.000 DH par mois.

Pouvez-vous nous en dire plus sur la digitalisation des prestations fiscales?

C’est un choix opérationnel. C’était opéré depuis des années, notamment depuis 2009, l’année de la mise en place de la télé-déclaration et télé-paiements pour la première fois au Maroc. C’est quelque chose qui est bien parce que ça permet de renforcer la transparence et la confiance en administration. Je pense que c’est un chantier qu’il faut parachever et ça ne pourrai être que bien pour les budgets de l’Etat et pour la situation du contribuable et la transparence, comme ça, il n’y a pas de surprise.

Peut-on imaginer une amnistie fiscale en 2021, notamment pour les secteurs affectés par la pandémie?

Non, je ne le pense pas ! Sincèrement, je ne le pense pas ! Je crois que l’ère de l’amnistie est révolue. Aujourd’hui, le Maroc est tenu par beaucoup d’engagements internationaux. Donc, je pense qu’il faut profiter des amnisties pour le peu de temps qui reste concernant la fin de 2020.

D’après vous, quel est le grand changement qu’apportera le PLF-21 en 2021?

Je pense que le grand changement à mon avis, c’est l’intégration du composant chantier structurant, parce que ce projet annonce des chantiers structurants. Et je pense que les prochains projets vont se baser sur ce projet de loi. Pour continuer ce qui était initié en matière de recyclage, de réformes liées au plan de relance économique nationale, et de généralisation de la couverture sociale. Je crois qu’il s’inscrit dans cette logique. C’est une loi de fiances qui a consacré le début des chantiers structurants et qui sont très importants pour le royaume. C’est le changement majeur à mon avis.

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