Ce mercredi, la Cour Internationale de Justice (C.I.J.) a jugé recevable la demande de l’Iran de récupérer quelques deux milliards de dollars d’avoirs gelés par Washington alors que cette dernière estime que, d’une part, ces sommes doivent revenir aux «victimes d’attaques» attribuées à la République islamique qui a «les mains sales» du fait de ses liens présumés avec le terrorisme et que, d’autre part, l’instance judiciaire internationale sise à La Haye ne serait pas «compétente en cette affaire».
Mais si, au terme de la lecture de son arrêt le juge-président Abdulqawi Ahmed Yusuf a déclaré que c’est à l’unanimité que la C.I.J. a rejeté «la première exception préliminaire d’incompétence soulevée par les Etats-Unis d’Amérique», force est de reconnaitre, toutefois, que bien que la décision prise par le principal organe judiciaire de l’Organisation des Nations-Unies soit contraignante et ne peut faire l’objet d’aucune procédure d’appel, la C.I.J. ne dispose d’aucun moyen de coercition pour la faire appliquer.
Ainsi, même si la date des audiences au cours desquelles sera examinée la question de savoir si Téhéran peut récupérer ses avoirs gelés par Washington n’a toujours pas été fixée, la «recevabilité» même de ce dossier, par la Cour Internationale de Justice, ne peut qu’envenimer davantage les rapports déjà tendus entre Washington et Téhéran lesquels n’entretiennent plus de relations diplomatiques depuis 1980.
Il convient de préciser, également, que ce n’est pas la première fois que la Cour Internationale de Justice réfute les arguments des Etats-Unis puisqu’en Octobre dernier l’administration américaine avait déjà été sommée, en application des dispositions du traité d’amitié signé entre les deux pays en 1955, de mettre fin aux sanctions contre Téhéran visant des biens «à des fins humanitaires» à la suite du retrait unilatéral de Washington de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien.
Considérant donc que c’est en se basant sur ce même traité que l’Iran cherche à «récupérer» lesdits avoirs, Mike Pompeo, le secrétaire américain aux Affaires étrangères avait, immédiatement, annoncé que les Etats-Unis mettaient fin au dit accord et dénoncé, lors des audiences tenues à la C.I.J. au titre du «déblocage des avoirs iraniens», «la mauvaise foi» de la République islamique d’Iran qui «a les mains sales» du fait de son «soutien» à des «activités terroristes».
Aussi, du point de vue du chef de la diplomatie américaine, les sommes réclamées par l’Iran devraient servir au dédommagement des victimes et des familles de victimes tombés au cours d’attentats fomentés ou soutenus par l’Iran parmi lesquels les proches des 241 soldats américains tués lors des deux attentats-suicide qui, le 23 Octobre 1983, avaient frappé, à Beyrouth, le contingent américain de la Force multinationale de sécurité.
S’adressant au juges de la C.I.J., Richard Visek, le conseiller juridique du Département d’Etat, estime qu’en invoquant le traité de 1955, l’Iran fait preuve d’un «abus de droit» dans la mesure où les relations d’amitié qui prévalaient au moment de sa signature «n’existent plus» et qu’elles n’ont jamais pu être restaurées principalement à cause «du comportement malveillant» et «des actes violents» commis contre les USA par l’Iran qui est «de mauvaise foi» et qui a «les mains sales».
La position ferme et sans équivoque adoptée par Washington dans ce dossier laisse entendre que le dégel des avoirs iraniens n’est pas pour demain mais attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi