Le leader communiste, icône du mouvement national marocain
Soixante trois, jour pour jour, s’éteignit Abdelkrim Benabdallah. Militant de gauche et unioniste de la première heure, le défunt fut l’une des figures de proue du mouvement national. Natif de Oujda et d’origine algérienne, ce combattant de première heure s’est rendu en à l’école supérieur des mines à Paris, après avoir accompli ses études antérieures au bercail.
Durant cette période en France, plus précisément en 1947, il rallia le parti communiste marocain où il s’est particulièrement distingué au sein de l’espace des étudiants dont il était l’un des fondateurs, en compagnie de Hadi Mesouak, Abderrahim Bouabid et d’autres. Dans le même entrain, il s’est chargé de l’organisation de la jeunesse communiste marocaine et conduisit la délégation au festival mondial des jeunes et des étudiants à Berlin en 1951.
Après son retour de l’Hexagone, il fut recruté au département des mines et fit partie de la direction du parti communiste marocain dont certains des membres s’activaient au sein l’organisation du croissant noir pour la résistance, aux côtés de militants de tous bords. De même, il fut à l’origine de la création d’un magazine culturel baptisé «L’idée nationale». Après les événements de 1952 où le mouvement national avait subi la répression des autorités du protectorat, en particulier la CGT, le parti de l’Istiqlal et le PCM, il rejoint ses compagnons de lutte pour poursuivre sa militance dans la clandestinité, en renonçant à sa fonction administrative, en tant qu’ingénieur à la direction des mines à Rabat. Et ses 100 000 francs, à l’époque.
Pendant ce temps, il s’est montré très actif et chevronné, en compagnie d’autres militants tels Abdeslam Bourquia, Abdallah Ayachi, Mohamed Koukji, Mohamed Setti, Maati Yousfi, Ahmed Madi qui avaient l’intention de créer une organisation de résistance armée. C’est ainsi que sous la direction du PCM, cette organisation a adhéré au militantisme armé, en coordination avec l’organisation «La main noire», avec Abdallah Haddaoui et Lahcen Glaoui. Tous ces efforts ont abouti à la constitution de l’organisation armée « Le croissant noir», sur proposition du militant Abdallah Haddaoui. Cette organisation a accompli de sérieuses actions, notamment la neutralisation de collaborateurs et de colons, le jet des bombes dans les quartiers européens de Casablanca, des rassemblements succincts devant les grandes fabriques, la rédaction de slogans et d’affiches, la distribution de tracts, l’impression en ronéo du journal du parti «Espoir» et «Vie du peuple», la diffusion de l’appel du parti à travers la radio «Voix de l’indépendance et de la paix», qui éméttait de Prague en Tchécoslovaquie, par l’intermédiaire du militant communiste Mohamed Farhat, expulsé par les autorités coloniales en 1948. Après l’avènement de l’indépendance du Maroc et la formation du premier gouvernement marocain, Abdelkrim Benabdallah est intervenu, à la tête d’une délégation, pour revendiquer une amélioration des salaires.
Le défunt était marié à Suzanne Larpierre, une française, médecin et fille d’un gynécologue de haute renommée installée à Oran. Il est père de Mourad et Assia qui vivent actuellement en France. Abdelkrim Abdallah avait été assassiné le samedi 31 mars 1956, quelques jours après l’indépendance, alors qu’il empruntait la route de Médiouna pour se procurer quelques médicaments pour son enfant. Il comptait participer à l’une des sessions du conseil mondial de la paix dont il était membre à part entière. Ses obsèques ont été observées par des militants du parti de l’Istiqlal, du parti de Choura et l’Istiqlal et de plusieurs organisations marocaines et algériennes. Le PCM avait considéré que la partie responsable de cet assassinat est le même qui avait exterminé Ahmed Chraibi, Touria Chaoui et d’autres résistants. Il faut bien rappeler que l’organisation « Le croissant noir » n’était pas marxiste, mais un espace unioniste qui avait pu rassembler les patriotes tous courants confondus dont des militants communistes. Comme l’a bien relaté Abdallah Ayachi, membre du bureau politique du PCM, cette organisation était autonome au niveau organisationnel, politique et idéologique, ce qui caractérisé la résistance de cette structure. Après les négociations de Saint-Cloud et Aix-lebain, on avait confié à cette organisation une mission spéciale, sous l’autorité d’une seule tendance déterminée, ce qui généré une forte anarchie et la mort de plusieurs militants du parti communiste marocain et bien d’autres résistants. C’est en cette période que fut assassiné Abdelkrim Benabdallah et c’était vraiment une période lugubre de l’histoire de notre résistance, voire l’histoire de notre national et progressiste en particulier.
Saoudi El Amalki