New Delhi: Violences intercommunautaires…

Rien ne va plus à New Delhi et la population craint le pire depuis qu’une loi sur la nationalité éminemment discriminatoire à l’égard des musulmans et orchestrée par les nationalistes hindous, avec à leur tête le Premier ministre Narendra Modi, a été approuvée par le Parlement indien.

Dite «Citizen Amendment Bill» (CAB) ou «Citizen Amendment Act» (CAA) mais très mal accueillie non seulement par la communauté musulmane du pays, forte de 200 millions d’âmes, mais aussi par l’ensemble des organisations de défense des droits de l’homme, cette loi qui facilite l’octroi de la citoyenneté indienne à toutes personnes issues des minorités qui fuiraient la répression en Afghanistan, au Bangladesh, au Pakistan – à condition qu’elles ne soient pas musulmanes – a cristallisé les craintes des musulmans de se voir reléguée au rang de «citoyens de seconde zone» dans un pays où les hindous représentent 80% de la population totale du pays estimée à 1,4 milliard de personnes.

La visite d’Etat effectuée cette semaine à New Delhi par le président américain Donald Trump et les entretiens que ce dernier a eu avec le Premier ministre Narendra Modi ont ajouté de l’huile sur le feu et exacerbé les tensions entre les deux communautés, musulmane et indienne, si bien que les quartiers du nord-ouest de la capitale indienne, se trouvant à une dizaine de kilomètres du centre de la ville et occupés, en majorité, par des musulmans, sont devenus, ces derniers jours, le théâtre d’une violence extrême.

Des hordes d’émeutiers hindous casqués et armés de bâtons, pierres, sabres ou encore pistolets et arborant des drapeaux safran – la couleur des nationalistes – ont pris d’assaut cette zone et mis le feu à des véhicules, des échoppes et des maisons appartenant à des musulmans sous le regard impassible d’une police absolument débordée par les évènements.

Des vidéos filmées par certains organes de presse montrent des groupes armées hindous s’en prenant violemment à des musulmans en criant «Jai Shri Ram» (Vive le Dieu Ram).

Le bilan provisoire communiqué à un correspondant de l’AFP par un responsable du principal hôpital du secteur fait état de la mort d’une vingtaine de personnes et de plus de 250 blessés dont dix seraient dans un état très critique.

Et si ce triste bilan a poussé Arvind Kejriwal, le ministre-en-chef de Delhi, à appeler «tout le monde à arrêter la violence (car) cette folie doit s’arrêter», il a aussi obligé de nombreux travailleurs migrants, craignant pour leurs vies dans une zone où «les gens se tuent les uns les autres et où des balles sont tirées», à abandonner leurs logements pour aller se réfugier dans leurs villages d’origine. Un couvre-feu a même été imposé dans les quartiers de Maujpur, Jafrabad, Chandbagh et Karawal Nagar où des renforts de policiers et de paramilitaires ont été déployés et le Premier ministre indien, jusqu’ici silencieux, face à cette vague de violence, a lancé ce mercredi un appel au calme en écrivant dans un tweet : «La paix et l’harmonie sont au cœur de notre philosophie.

J’invite mes sœurs et frères de New Delhi à maintenir la paix et la fraternité en tout temps». Sera-t-il entendu alors même qu’il est lui-même l’auteur du projet de loi à l’origine de ce regain de tension ? Rien ne l’indique pour l’heure ; bien au contraire. Alors, attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

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