Œuvrer pour une pratique professionnelle exigeante

Ahmed Badry, ex- directeur de l’Isadac

Plus de soixante années après une naissance prometteuse au début des années 50, où va le théâtre marocain? Je parle du théâtre dans sa forme esthétique avec la pluralité de ses expressions et  ses mutations.

A sa naissance, la pratique théâtrale au Maroc a su concilier les exigences esthétiques admises avec l’héritage culturel marocain, notamment dans ses formes orales et ses pratiques spectaculaires organisées. On se souvient des remarquables succès internationaux de ce théâtre, notamment à l’occasion des sessions du «Théâtre des Nations» à Paris, aux premières années de l’indépendance de notre pays. On se souvient de l’effervescence créatrice du théâtre amateur du début des années soixante-dix ; mais on se souvient également de son essoufflement, conséquence d’une part de son écrasement par des décisions administratives prises par les autorités de tutelle de l’époque, d’autre part, de l’absence d’espaces et d’actions de formation.

L’ouverture de l’Institut d’art dramatique et d’animation culturelle a redonné un souffle vivifiant à une pratique moribonde. Aujourd’hui, la scène marocaine dispose, depuis plus de deux décennies de comédiennes et comédiens de talents, de metteurs en scènes, scénographes, inventifs, ainsi que d’animateurs dynamiques. Les compétences sont là, mais non les structures pérennes, indispensables, à même d’illuminer encore plus nos scènes et contribuer à la formation d’un public pour le théâtre…

Les formes de subventions jusqu’alors adoptées ont montré leurs limites. Bien plus, elles ont ouvert les portes à des abus et un mercantilisme contraire au bien-être de la création théâtrale.  Où va le théâtre au Maroc dans ces conditions ? Il ne peut que piétiner, malgré le potentiel dont il dispose, si les pouvoirs publics se contentent d’une politique de saupoudrage au lieu de mesures structurantes déterminantes, propices à une pratique professionnelle exigeante.

Related posts

Top