A quelques jours de la journée mondiale contre la peine de mort, célébrée chaque année le 10 octobre, les militants de l’abolition de ce châtiment suprême se sont encore mobilisés pour faire pression sur le gouvernement.
Le but est de pousser le Maroc à voter le moratoire, après plusieurs abstentions. C’était lors d’un séminaire organisé par le CNDH en collaboration avec l’Association francophone des commissions nationales des droits de l’Homme, mercredi à Rabat sur la peine de mort en Afrique francophone.
Le ministre de la Justice, Mohamed Aujar, présent à cet événement n’a pas affiché une position claire sur la question, se contentant de rappeler les contradictions entre les dispositions du Code pénal et celles de la Constitution de 2011. «Alors que l’article 20 de la Constitution consacre le droit à la vie, le Code pénal prévoit la peine capitale dans certains cas», a-t-il rappelé. Son prédécesseur, Mustapha Ramid, actuellement en charge du département des droits de l’homme, s’était toujours montré intraitable sur ce sujet. D’ailleurs, la réforme du Code pénal, menée sous son mandat, a maintenu la peine de mort avec toutefois une atténuation des crimes passibles de ce châtiment. Dans la dernière version du projet de code pénal, 11 cas donnent lieu à la peine de mort contre 31 actuellement. Selon Aujar, le débat sur la peine de mort a dégagé trois visions, celles des pro-peine de mort, des abolitionnistes et du courant du juste-milieu qui prône l’atténuation des cas.
Aujar reconnaît en tout cas que la majorité de la société (citoyens et institutions) est en faveur de l’abolition de la peine de mort. «Mais en attendant que le débat gagne davantage en maturité, le Maroc continuera à s’abstenir lors du vote de la résolution de l’ONU sur la peine de mort», a-t-il fait-savoir. Pourtant, dans la réalité, le Maroc est abolitionniste de fait puisque la dernière exécution remonte à 1993 avec l’affaire Tabit, commissaire condamné à la peine capitale pour viol avec violences. Depuis, 90 condamnations à mort ont été prononcées, mais sans exécution.
Les partenaires du CNDH ont en tout cas réitéré leur volonté de voir le Maroc voter le moratoire onusien. Nasos Makrythanasis, attaché de programmes au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie a été on ne peut plus clair : «Le premier droit de l’homme est le droit à la vie. C’est un droit qui est inaliénable comme le stipule la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948», a-t-il rappelé. Pour inciter le Maroc à franchir le pas de l’abolition, il a indiqué que trois quarts des Etats francophones ont aboli la peine de mort. Au 31 décembre 2016, la majorité (20) des Etats membres de l’Union africaine ont aboli cette sentence en droit ou appliquent un moratoire de fait sur les exécutions tandis que 4 autres l’ont maintenu. Cependant, «ce chiffre encourageant ne doit pas masquer un recul inquiétant », a-t-il déploré. Il s’agit, en effet, de la hausse depuis 2014 du nombre de condamnation à mort et d’exécutions dans le monde. Des pays classés comme abolitionnistes de fait ont procédé à des exécutions.
Hajar Benezha